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L’apprentissage à la recherche d’un nouveau souffle

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Ouverte depuis 2000 pour les diplômes du travail social, la voie de l’apprentissage a modifié en profondeur le paysage de la formation en faisant de l’entreprise le lieu de transmission des savoirs. Un atout en même temps qu’une difficulté tant le lien nécessaire avec la théorie relève d’une ingénierie complexe. Face à l’éclatement des pratiques et des politiques régionales, le temps de la rationalisation du dispositif est venu.

Apprendre un métier du social par le biais de l’apprentissage Adrien, 26 ans, était loin d’y penser après deux années d’études en gestion d’entreprise, puis une école de commerce en alternance. Sauf qu’il y avait ces étés où il travaillait comme animateur-accompagnateur auprès de personnes polyhandicapées. « C’est un peu là où j’ai découvert ma voie », confie-t-il. Aiguillé par des travailleurs sociaux auprès de qui il s’informe, il interrompt ses études commerciales et réussit à se faire embaucher comme apprenti éducateur dans le service de prévention spécialisée de l’ADSEA 28 (Association départementale pour la sauvegarde de l’adulte à l’enfant d’Eure-et-Loir).

Au rythme mensuel de trois semaines au contact d’éducateurs de rue et d’une semaine de cours théoriques au centre de formation des apprentis (CFA) de l’Institut du travail social (IRTS) de Tours, il est à mi-parcours de ses trois années de préparation au diplôme d’Etat d’éducateur spécialisé. De quoi se forger déjà une idée sur sa différence avec les étudiants par voie directe. « Dans la formation d’éducateur spécialisé, les étudiants balaient peut-être un champ d’intervention beaucoup plus large, mais cela reste assez abstrait. Nous, c’est en nous confrontant aux situations que nous appréhendons les différents aspects du métier avant de rebondir sur la théorie. En fait, arrivé au diplôme, un apprenti a pratiquement trois années d’expérience derrière lui », explique-t-il.

Un avis massivement partagé par les centaines de jeunes formés sur le terrain aux métiers du social et du médico-social, qui efface l’image négative attachée depuis des lustres à l’apprentissage. Longtemps privilégié par les entreprises aux côtés du compagnonnage, celui-ci a, en effet, progressivement été détrôné par les sections professionnelles créées par l’Education nationale, telles que les CAP (1911) ou les BEP (1966), avant de finir comme l’orientation par défaut des élèves qui ne s’adaptaient pas au système scolaire traditionnel, rappelle Annie Goglia, directrice du centre de formation des apprentis en travail social du Languedoc-Roussillon. Autant dire une marque d’échec. « Aujourd’hui, même si l’évolution des mentalités doit encore progresser, il est devenu une nouvelle voie d’accès à la qualification jusqu’au niveau I. On peut devenir ingénieur par la voie de l’apprentissage ! »

C’est dans le champ social et médico-social que ce chemin vers la qualification prend une dimension particulière. Sur le recrutement des étudiants, tout d’abord. « Le contrat d’apprentissage est un contrat de travail déclenché par l’employeur, ce qui repositionne les centres de formation qui avaient depuis toujours la main sur les épreuves d’admission », explique Annie Goglia. Outre cette inversion du rang des acteurs, l’apprentissage oblige à placer sur un même niveau l’acquisition de compétences et l’accès à la qualification. « Il bouleverse en cela la règle théorie-pratique-théorie des écoles en travail social pour y substituer celle du terrain-théorie, et ça change tout », renchérit Annie Goglia.

Démarrée en 2000 à titre expérimental pour les formations préparant aux diplômes d’Etat d’éducateur spécialisé et de moniteur-éducateur, la voie de l’apprentissage a d’abord représenté un moyen de compenser le déficit d’éducateurs diplômés en ouvrant un nouvel accès à la certification. Avant d’être élargi en 2003 aux filières éducatives et techniques, de service social et d’aide à la personne (niveaux IV et III) et à la filière animation (niveau III) par un accord de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif (BASS) (1). Entre 2003 et 2010, Unifaf, l’organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) de la branche, indique avoir financé la formation de 3616 apprentis, tous niveaux confondus, avec des taux d’obtention du diplôme de l’ordre de 86 % pour un taux d’échec, si l’on prend en compte les abandons, inférieur à 5 %.

Ces résultats doivent toutefois être nuancés : en 2008 l’apprentissage ne représentait que 3,5 % des dépenses de formation de la branche (11,6 millions sur 334 millions d’euros) alors que le secteur est confronté à des difficultés de remplacement des professionnels et que le chômage des jeunes est massif. Pour Estelle Bacher-Chauvin, directrice « recherche et développement » d’Unifaf, la situation de l’apprentissage reste encore tributaire des différences de politiques régionales. « Certains conseils régionaux se sont fait fort de développer l’apprentissage en s’appuyant sur les réseaux d’employeurs et les écoles. En revanche, d’autres ne possèdent toujours pas de centre de formation des apprentis [CFA]. » Autre faiblesse, cette fois interne à la branche : « Après l’élargissement du champ de l’apprentissage, les partenaires sociaux s’étaient fixé le cap de 2007 pour dresser un bilan des diplômes accessibles et des conditions d’accès [2]. Or cette rencontre n’a pas eu lieu », ajoute Estelle Bacher-Chauvin.

Conséquence : un dispositif parfois mal identifié par les professionnels et développé de façon hétérogène. On trouve ainsi des CFA intégrés à des écoles de travail social comme un département à part entière, quand d’autres sont des entités « hors les murs » au service de différents instituts de formation. De même, en fonction des agréments et des priorités de la région, certains CFA peuvent intervenir sur une large palette de métiers, y compris de l’animation ou du secteur sanitaire, quand d’autres restent centrés sur les diplômes de l’éducation.

Un cahier des charges commun

Pour autant, le chantier ouvert en 2000 a déjà marqué en profondeur le paysage social. Dans la mesure où une région ne peut comporter qu’un CFA du sanitaire et du social, des rapprochements entre écoles ont dû être entrepris. Dans la région Ile-de-France, le CFA des métiers du social de l’Adapss (Association pour le développement de l’apprentissage dans les professions sanitaires et sociales), le plus grand de France dans ce secteur, fédère neuf instituts de formation. Cette énorme entité hors les murs intervientsur une dizaine de métiers du sanitaire et du social auprès d’une file active de 625 apprentis, auxquels s’ajoutent 225 jeunes préparant une « intégration à l’apprentissage » conduite avec les missions locales d’Ile-de-France.

Preuve de la complexité de ces regroupements, si l’Adapss a été fondée en 1996, ce n’est que le 7 mars dernier qu’a été signée une convention unifiant les objectifs et les pratiques de ses différents membres. « Nous avons travaillé pendant un an avec les instituts partenaires et un cabinet de consultants externe pour créer un cahier des charges commun », explique Daniel Thiebault, directeur de l’Adapss. Ce document précise que les centres de formation doivent procéder tous les ans à une évaluation interne de leurs unités de formation des apprentis et, tous les cinq ans, au rythme du renouvellement de leur convention avec l’Adapss, à une évaluation externe. Un projet pédagogique et un règlement intérieur spécifique à l’apprentissage doivent également être élaborés au sein de chaque institut afin de mieux intégrer la dimension professionnelle et salariale du statut de l’apprenti. Enfin, le cahier des charges fixe les conditions de réussite du parcours individualisé de l’apprenti, définit l’alternance et formalise les procédures de communication avec les employeurs. « Autant de points qui n’étaient pas acquis d’avance. Notre vocation est d’accompagner un apprenti et, pour cela, de nous mettre à la disposition de l’employeur, ce qui suppose de lui accorder une place primordiale qu’il n’avait peut-être pas toujours auparavant », explique Daniel Thiebault.

L’ingénierie de formation est en elle-même un défi. « Dès son apparition dans le secteur, cette voie d’accès à la qualification a révolutionné le système. Pour un apprenti, son port d’attache est l’entreprise et non pas l’école. Tout à coup, l’employeur devenait un lieu de transmission de connaissances alors que les écoles en travail social étaient jusque-là hégémoniques en la matière », explique Jean-Marc Constancias, responsable de la cellule « apprentissage » à l’IRTS de Tours.

La bascule est de taille. Dans la mesure où l’entreprise devient le lieu d’acquisition des savoir-faire de référence propres à chacun des diplômes préparés, l’école devient celui de la mise en perspective de cette expérience par les enseignements théoriques qu’elle délivre, analyse Jean-Marc Constancias. Une démarche tributaire de la capacité de l’employeur à théoriser sa pratique et à co-construire l’apprentissage avec le centre de formation, qui a conduit les CFA à développer un outil de communication spécifique, le livret d’apprentissage. Porté par l’apprenti, il assure la cohérence et le suivi de sa progression professionnelle en consignant, par exemple, les situations rencontrées sur le terrain, les travaux réalisés durant la formation ou les préconisations faites dans les entretiens d’accompagnement. « C’est une pièce maîtresse qui va faire l’objet d’allers et retours entre tous les acteurs et contribuer à ce que cette forme d’alternance qu’est l’apprentissage ne soit pas une simple juxtaposition de moments, mais qu’au contraire terrain et théorie soient imbriqués. »

En outre, chaque employeur désigne un maître d’apprentissage pour encadrer l’apprenti. Responsable de la qualité de la formation sur le terrain, ce professionnel assure le lien avec le centre de formation et participe à la cohérence de l’enseignement tout au long de la préparation du diplôme. Dans le service de prévention spécialisé de l’ADSEA 28, Yamina Jubien, éducatrice de rue, accompagne depuis quatre ans de jeunes collègues apprentis après avoir reçu une formation spécifique de 120 heures. « Je partage mon quotidien avec l’apprenti en étant garante de sa place dans l’équipe et auprès des usagers, explique-t-elle. Il s’agit de l’accompagner au fur et à mesure qu’il avance dans sa formation en le confrontant à certaines situations. »

Ce qu’elle apporte à ces futurs professionnels ? Une forme d’analyse permanente des pratiques professionnelles, répond-elle. « Un simple exemple : on parle beaucoup dans les écoles de distance avec l’usager. Or l’apprenti me voit faire la bise aux femmes du quartier. Du coup, cela revient à décortiquer des notions prédéfinies qu’on nous inculque, en posant la question de la posture professionnelle et en faisant appel à des appuis théoriques. » Dans ce service de prévention spécialisé qui compte sept éducateurs, trois apprentis sont présents en temps ordinaire et une cellule d’accompagnement a été montée pour valider collégialement leurs écrits et établir des bilans d’activité. Le livret de formation sert de repères à l’acquisition des compétences, mais une concertation est entreprise avec le CFA pour s’accorder sur la répartition des tâches. Pour Yamina Jubien, « ce va-et-vient incessant entre pratique et théorie oblige à relire et à s’informer pour être à la page. Cela motive. »

De fait, bien que non reconnue dans les conventions collectives, la fonction (et la professionnalisation) de maître d’apprentissage représente un atout pour le secteur, estime Jean-Marc Constancias. « Dans nos relations avec les employeurs, nous expliquons que la volonté de recruter ne doit pas être la seule raison pour recourir à l’apprentissage. Un maître d’apprentissage en veille professionnelle constante avec le centre de formation, notamment au sujet de l’évolution des référentiels métiers, peut aussi devenir une personne ressources pour l’institution. »

Reste que les nombreux jeunes à vouloir intégrer un métier du social par l’alternance se heurtent à la faiblesse des demandes des employeurs. En cherchant à recruter cinq apprentis éducateurs, l’association Realise (Réalisation pour les enfants et adolescents d’une libre insertion sociale par l’éducation), un important employeur nancéien (plus de 400 salariés) du champ de la protection de l’enfance et de l’adolescence, indique avoir reçu 80 candidatures en provenance de la France entière. « La rareté des emplois en apprentissage vient du fait que les tutelles n’intègrent pas dans nos budgets le financement de ces postes. Nous devons donc faire preuve de la plus grande rigueur dans la gestion de notre masse salariale. Seule cette politique ainsi que quelques aides financières accordées par la région nous permettent de réaliser quelques embauches d’apprentis dans l’année », explique Vincent François, responsable des ressources humaines de Realise.

Pour autant, la contrainte financière ne peut faire oublier que le recrutement d’apprentis s’inscrit dans le cadre d’une politique de gestion prévisionnelle des emplois, précise-t-il. « Nous préparons l’avenir. Pour une association comme la nôtre, l’apprentissage apparaît comme un processus de formation pertinent, car il permet à un jeune de se confronter progressivement à l’intervention éducative et d’acquérir des compétences spécifiques à nos besoins. En outre, il s’agit d’un rapport gagnant-gagnant puisque les apprentis viennent progressivement enrichir l’action des équipes dans lesquelles ils sont insérés. » Autre avantage attendu par l’association : bénéficier de salariés rapidement opérationnels pour remplacer les différents départs en retraite.

Encore des hésitations

Ces arguments n’empêchent pas que nombre d’employeurs hésitent à s’engager auprès d’un jeune pendant des années sans être sûrs de pouvoir se l’attacher après sa formation (3). « Certes, nous sommes conscients que l’apprenti que nous formons peut prétendre valoriser ailleurs l’expérience qu’il aura acquise chez nous. Mais ce n’est pas perdu, répond, quant à lui, Francis Jacquel, directeur des ressources humaines du CMSEA (Comité mosellan de sauvegarde de l’enfance à l’adulte), à Metz, une association comptant 1 100 salariés. Nous savons que, dans les dix ans qui viennent, nous risquons de manquer de professionnels diplômés, donc nous formons aussi pour le secteur social à l’échelle nationale. »

C’est dans cette logique que le CMSEA a signé, en 2009, une convention de partenariat avec la SNCF pour la formation d’apprentis éducateurs spécialisés à la prévention. Le système mis en place concilie le savoir-faire acquis par l’association dans les rues ou les centres commerciaux auprès de jeunes en difficulté et la volonté de cette société de développer la médiation sur certaines de ses lignes. Techniquement, six apprentis éducateurs recrutés et supervisés par le CMSEA interviennent dans les trains et les gares en compagnie de deux maîtres d’apprentissage de la SNCF et la partie théorique est assurée par le CFA de Lorraine. Afin d’élargir le périmètre d’action des futurs professionnels, des stages complémentaires effectués dans différentes structures de l’association viendront compléter leur cursus formatif. « C’est aussi une façon de montrer que l’apprentissage n’est pas seulement réservé au renouvellement despersonnels, mais qu’il peut ouvrir sur de nouveaux métiers dans le champ social », résume Francis Jacquel.

Côté CFA, on tente de se structurer après des années de développement en ordre dispersé. En octobre dernier, l’Unaforis (Union nationale des associations de formation et de recherche en intervention sociale) a ouvert une commission de travail entre différents responsables de centres pour dresser un premier inventaire de la situation. « Compte tenu des différences de politiques régionales, il devenait nécessaire de se retrouver autour d’une table pour comparer nos expériences, voir si nous avions les mêmes approches et s’il était possible d’harmoniser nos pratiques et nos réflexions », explique Hélène Maçon, présidente de la commission « apprentissage » de l’Unaforis. Les missions assignées à ce groupe de travail sont de consolider la qualité des formations par la mutualisation des bonnes pratiques pédagogiques et d’accompagner le développement de l’apprentissage dans les régions sur la base de partenariats structurés avec les réseaux d’employeurs. « Ce travail rejoint finalement celui que conduisent toutes les écoles de travail social car, avec la réforme des diplômes, il faut développer davantage les projets avec les terrains d’accueil », estime Hélène Maçon.

Pour l’heure, financés par Unifaf uniquement sur le coût pédagogique des formations, les CFA peinent à engager des actions de communication à destination des employeurs. « Et s’associer à des campagnes d’information lancées par le conseil régional se révèle aussi improbable, car ce sont, pour des raisons d’image, essentiellement les jeunes qui sont visés, et non les entreprises », déplore Claude Monteillet, directeur du CFA d’Alsace. A cela s’ajoute le fait que les associations ne sont pas assujetties à la taxe d’apprentissage (4), ce qui rend les centres de formation encore plus dépendants des conseils régionaux et creuse les inégalités en fonction des situations locales. Au Giapats (Groupement d’intérêt associatif pour la promotion de l’apprentissage en travail social), qui fédère six instituts de formation en Provence-Alpes-Côtes d’Azur et Corse et intervient auprès de plus de 200 apprentis, on indique ainsi « ne toucher aucun centime de la région en raison de notre statut d’institution hors les murs ». De nombreux conseils régionaux considèrent en effet que de telles structures n’ont pas besoin de soutien particulier dans la mesure où elles sont issues d’un montage entre différents instituts de formation déjà bénéficiaires de fonds publics. Pascale Jacquelin, directrice du Giapats, a donc choisi de contourner le problème : « Dès cette année, nous avons décidé de faire campagne auprès des fournisseurs et prestataires de services de nos associations [5] qui souhaiteraient aider leurs clients en soutenant l’apprentissage », indique-t-elle.

Une position qui rejoint le souhait de l’Unaforis de voir les directions des centres de formation se former à la collecte de la taxe d’apprentissage pour recueillir des fonds d’employeurs situés hors de la branche. Déjà, certains CFA interviennent auprès du secteur public territorial, principalement par l’intermédiaire des métiers de la petite enfance dans les crèches publiques et parapubliques.

A l’Adapss Ile-de-France, on veut aller encore plus loin. Réalisant 25 % de son activité auprès du secteur public, ce CFA souhaite désormais aller à la rencontre des employeurs du secteur lucratif. « A l’évidence, le secteur commercial des personnes âgées est un monde qu’il faut que nous rencontrions. A l’intérieur des maisons de retraite, il y a des personnels pour lesquels nous avons les moyens de proposer des formules d’apprentissage », explique Daniel Thiebault, conscient qu’il faudra dépasser « la frilosité du secteur associatif et l’idée que nous n’aurions pas les mêmes valeurs. »

« De plus en plus, la logique de marché vient impacter les écoles de travail social, et le CFA entre de plain-pied dans cette dynamique de lobbying et de recherche de financements, analyse Hélène Maçon. En ce sens, il préfigure ce qui va se passer dans les formations sociales en général, qui sont déjà engagées dans une dynamique de rapprochement avec les employeurs, et de plus grande corrélation emploi-formation. »

GILBERT LE PICHON
« Redonner de la lisibilité au dispositif »

Président de la commission paritaire nationale de l’emploi de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif.

Unifaf a consacré 3,5 % du financement global des formations de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif à l’apprentissage. Est-ce satisfaisant ?

C’est, en tout cas, le résultat que nous voulions atteindre au regard des possibilités financières d’Unifaf. Il faut rappeler quelques chiffres. En 2010, sur un engagement global de 350 millions d’euros de l’organisme paritaire collecteur agréé (OPCA), 80 millions ont été consacrés à la formation initiale par la professionnalisation sous ses différents aspects, tels que les contrats de professionnalisation, l’apprentissage et les actions de tutorat. Sur les 15 millions d’euros prévus pour l’apprentissage, plus de 13 millions ont été consommés en 2010, alors même que toutes les régions ne possèdent pas encore de centre de formation des apprentis (CFA).

Nous sommes conscients que nos dispositifs d’accès à la qualification n’arriveront pas seuls à relever le défi lancé par la démographie de nos métiers. Nous savons aussi qu’il faut attirer de nouveaux professionnels par le voie de l’alternance, qui reste très attractive auprès des jeunes, en particulier ceux en situation précaire qui n’ont pas la possibilité de suivre des études en cycle continu. En même temps, notre engagement doit être responsable : dynamique pour couvrir nos besoins, mais comptable de notre capacité financière.

On voit certains CFA du sanitaire et du social se tourner vers les secteurs public territorial ou commercial. Qu’en pensez-vous ?

La branche y est bien sûr attentive. Il reste que l’existence du CFA est négociée avec la région. Pour prendre l’exemple de Poitou-Charentes, où je préside une association de promotion pour l’installation d’un CFA, le mandat actuellement en discussion avec la région est celui d’un organisme unique pour le sanitaire, le social et le médico-social, sans distinction entre les secteurs associatif, commercial ou public. Il n’est donc pas anormal que les CFA cherchent à s’adapter. D’autant que leur ouverture s’inscrit dans une tendance de fond à la mutualisation et à la coopération à tous les niveaux de l’action sociale. L’important est que nos organismes de formation continuent d’être acteurs et moteurs.

Faut-il revoir le dispositif de l’apprentissage ?

Il faut lui redonner de la lisibilité. Nous avons commencé par actualiser nos conventions avec Unifaf, gestionnaire du dispositif, afin de lancer un programme de labellisation des centres de formation correspondant à la fois aux moyens de l’OPCA et aux orientations de la commission paritaire nationale de l’emploi (CPNE) de la branche. Ainsi, les engagements financiers entre l’OPCA et les CFA deviennent pluriannuels, en cohérence avec les agréments régionaux de ces derniers. Les formations sont mieux définies, les objectifs de recrutement partagés entre l’OPCA et la CPNE. Nous pouvons désormais évaluer ensemble les évolutions et apporter les améliorations utiles à tous, salariés, employeurs et centres de formation.

Nous sommes au début de cette refonte. Après avoir mieux défini nos responsabilités avec Unifaf, nous allons nous tourner vers les centres de formation, individuellement d’abord pour formaliser les relations, puis lors d’une prochaine réunion pour aborder les modalités de concertation et d’évaluation.

Pour la CPNE, l’objectif est de se rapprocher au plus près des besoins d’emploi afin d’optimiser les financements. Une des pistes serait de fixer dans la labellisation un certain nombre de places. Il ne s’agit pas de casser l’existant mais, avec une enveloppe limitée, la question devient : comment ventiler ces fonds et sur quels métiers ? Cela suppose que les partenaires de la branche s’accordent sur le sens à donner à l’ensemble du dispositif et qu’ils puissent tenir le même langage. L’aspect financier n’est que la conséquence de ce travail. Nous nous sommes donné l’année pour y parvenir.

Et les régions ?

Nous leur disons que nos métiers sont en crise et qu’il faut développer la qualification. Mais à travers nos délégations régionales, nous voulons aussi faire passer le message que si l’OPCA peut être un co-financeur des formations, cela ne peut se faire que sur un travail en commun et un partage politique.

PROPOS RECUEILLIS PAR M.P.

Notes

(1) Voir ASH n° 2310 du 9-05-03, p. 8.

(2) Un accord du 12 juillet 2006, qui regroupait tous les accords sur l’apprentissage pris par la branche depuis 2003, prévoyait de faire le point sur les formations prioritaires « au plus tard » le 31 décembre 2007 – Voir ASH n° 2502, du 6-04-07, p. 13.

(3) Le code du travail interdit en effet de lier un contrat d’apprentissage à une clause de fidélité à l’employeur, une fois le diplôme obtenu.

(4) Pour compenser, Unifaf a créé un fonds spécifique pour l’apprentissage qui correspond à 1/5e des fonds de professionnalisation versés par les employeurs.

(5) Les entreprises peuvent indiquer le nom du ou des CFA auxquels elles souhaitent affecter la taxe d’apprentissage.

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