Parce qu’il s’agit de productions culturelles, les représentations du handicap et les attitudes qu’elles génèrent ne sont pas les mêmes d’un bout à l’autre de la planète. Cet ouvrage le montre à merveille, non pas au travers de longs exposés théoriques mais d’une multitude d’excursions aux quatre coins des cinq continents. Grâce à la curiosité encyclopédique de Charles Gardou, spécialiste des questions de handicap, et à la pléiade de chercheurs qu’il a réunie autour de lui, nous avons l’occasion de découvrir quantité de façons de penser la vulnérabilité et d’en expliquer les causes. Cependant, par-delà la diversité des approches présentées, cette vaste fresque anthropologique met le doigt sur une constante : là-bas comme ici, les personnes handicapées font les frais de croyances, qui, elles-mêmes, fabriquent « du handicap ». « Dans la plupart des cultures, souligne Charles Gardou, les personnes en situation de handicap sont condamnées à suivre un chemin séparé […]. Un corset de mythes et de fantasmes […] les enserre, entravant leur participation sociale. » Bien sûr, à l’intérieur d’une même société, les représentations du handicap varient selon l’époque. Mais le passé a la vie dure – constat qui, lui aussi, a un caractère universel. C’est pourquoi, comme le fait observer l’historienne Zina Weygand, à propos de l’appréhension de la cécité dans la culture française, il est indispensable de convoquer l’Histoire afin de « saisir l’origine de certains comportements individuels et collectifs, sources d’exclusion et de souffrance pour les personnes qui en font l’objet ».
Le handicap au risque des cultures. Variations anthropologiques – Sous la direction de Charles Gardou – Ed.érès – 30 €