La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires – dite loi « HPST » – a prévu l’élaboration d’un programme régional de gestion du risque (PRGDR) pluri-annuel, révisable chaque année (1). Mais la méthode définie pour la préparation de ce programme et des contrats ayant vocation à lier les agences régionales de santé (ARS) et les services de l’assurance maladie de leur ressort est-elle opérationnelle ? C’est la question posée à l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) par Roselyne Bachelot lorsqu’elle était ministre de la Santé. Dans son rapport récemment rendu public (2), l’IGAS définit la notion de gestion du risque comme « l’ensemble des actions mises en œuvre pour améliorer l’efficience du système de santé, c’est-à-dire le rapport entre sa qualité et son coût ».
La loi « HPST » fait de la gestion du risque un domaine partagé entre l’Etat et l’assurance maladie, et entre le niveau national et le niveau régional, relève l’IGAS. Mais elle n’explicite pas les règles qui gouvernent ce partage. C’est cette situation qui explique en partie les interrogations recueillies par la mission auprès des acteurs sur les conditions de mise en œuvre du PRGDR. Sur le plan juridique, l’assurance maladie est principalement responsable des actions de gestion du risque dans le secteur ambulatoire, tandis que l’Etat est principalement responsable du développement de la gestion du risque dans les secteurs hospitalier et médico-social, énonce l’IGAS. Et pour elle, « il n’y a pas de raison de remettre en cause cette répartition ».
Néanmoins, et c’est un point « essentiel », la mission recommande à l’Etat et à l’assurance maladie de travailler de concert sur les « sujets-frontières » qui nécessitent d’articuler des interventions auprès des professionnels de santé en ville et à l’hôpital. Elle souligne à ce titre que « la plupart des dix priorités nationales fixées aux ARS pour 2010-2011 portent opportunément sur ce type de sujets » (3).
« La conception et la mise en œuvre d’actions de gestion du risque supposent un investissement important du niveau national, qui a vocation à mobiliser conjointement les moyens de l’administration centrale et de l’assurance maladie », estime l’IGAS. « Ce qui n’est pas encore véritablement le cas. » Aussi l’inspection recommande-t-elle d’intégrer cet enjeu dans le pilotage national des ARS.
Autre préconisation : faire du contrat entre l’Etat et l’Union nationale des caisses d’assurance maladie le cadre général de la politique de gestion du risque mise en œuvre par l’Etat et l’assurance maladie.
L’IGAS suggère encore de consacrer le conseil national de pilotage des ARS comme instance d’arbitrage en la matière. L’organisation concrète de ce partenariat au niveau national nécessite la définition de programmes nationaux de gestion du risque communs entre l’Etat et l’assurance maladie ainsi que la constitution d’une cellule conjointe pour les préparer et les mettre en œuvre.
L’appropriation par les personnels des ARS des enjeux de la gestion du risque « n’est absolument pas naturelle », souligne l’IGAS. Elle doit donc devenir « une priorité managériale majeure pour les directeurs d’agence dans les années à venir ». La mission recommande ainsi notamment de valoriser l’existant en s’appuyant sur les agents issus des unions régionales des caisses d’assurance maladie et en capitalisant leur savoir-faire auprès de l’ensemble de leurs équipes.
Deux des dix programmes prioritaires de gestion du risque concernent les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), à savoir : « favoriser une organisation et une utilisation efficiente des ressources » et « maîtriser la dynamique des prescriptions ». Dans le secteur médico-social, analyse l’IGAS, l’élaboration d’actions de gestion du risque se heurte aux « déficiences de son dispositif de régulation » (faiblesse des systèmes d’information, manque d’études…). Aussi estime-t-elle que l’action « efficience dans les EHPAD » ne peut pas être considérée comme un véritable programme de gestion du risque « mais plutôt comme, au mieux, un programme en devenir ». C’est pourquoi le développement de la gestion du risque dans le secteur médico-social va nécessiter un « réel investissement » de la direction générale de la cohésion sociale et de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, conclut l’IGAS.
(2) Mission sur la gestion du risque – Décembre 2010 – Disp. sur
(3) Ces dix priorités ont été validées par le Conseil national de pilotage des ARS dans une instruction du 9 juillet 2010 et détaillées par l’assurance maladie dans une lettre-réseau du 26 novembre 2010, non publiées.