Dans sa lettre de février (1), l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (ONPES) analyse les conclusions du rapport du gouvernement de suivi de l’objectif de baisse d’un tiers de la pauvreté en cinq ans (2).
Certes, reconnaît l’observatoire, le taux de pauvreté ancré dans le temps (3) a diminué de 11 % entre 2006 et 2008 et ce, « grâce aux effets conjugués de la croissance et du système de protection sociale ». Toutefois, souligne-t-il, « la lecture des indicateurs secondaires […], qui ne marquent pas d’amélioration, vient corriger le sens de ces propos ». En effet, « la stabilitéobservée depuis plusieurs années de l’indicateur d’intensité de la pauvreté (18,5 % en 2008) appelle une vigilance accrue de l’intensification de la pauvreté des plus pauvres. Obtenue dans une période de relative croissance économique, cette stabilité fait craindre une détérioration de cet indicateur en période de crise (2009-2010) ». Malgré tout, estime l’ONPES, le gouvernement a des « chances raisonnables » d’atteindre son objectif de réduction de la pauvreté d’ici à 2012, une opinion que ne partagent pas les associations de lutte contre la pauvreté (4).
Pour lutter contre la pauvreté, le gouvernement s’est principalement appuyé sur la mise en œuvre du revenu de solidarité active (RSA), censé améliorer les conditions d’accès à l’emploi. « Les évaluations à venir ou en cours du RSA revêtent donc un caractère crucial », indique l’ONPES, précisant que certains points méritent d’être approfondis. Ainsi, « concernant le RSA “socle”, le niveau du revenu garanti est-il suffisant compte tenu des caractéristiques des bénéficiaires ? », s’interroge-t-il, et, « concernant le RSA “activité”, comment accroître le nombre de bénéficiaires ? Comment relever les niveaux des prestations sans encourager la précarité de l’emploi ? » Pour répondre à ces questions, l’instance propose que des « enquêtes [soient] menées directement auprès des personnes en situation de précarité afin de mieux connaître leurs représentations et leur “adhésion/rejet” aux formes de solidarité offertes ». A cet égard, ajoute-t-elle, « l’importance du non-recours au RSA “activité”, même si elle découle en partie de la nouveauté de la prestation, doit être examinée attentivement ».
Par ailleurs, comme le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) (5), l’ONPES regrette que certains indicateurs ne figurent pas dans le tableau de bord et plaide pour que soit notamment instauré un suivi de la pauvreté des familles monoparentales, des migrants ou encore des personnes âgées.
L’observatoire se penche enfin sur l’évolution des indicateurs liés aux engagements de la France pris dans le cadre de la stratégie décennale de l’Union européenne, dite « Europe 2020 » (6), qui prévoit de réduire d’au moins 20 millions le nombre de personnes pauvres et socialement exclues entre 2008 et 2018. La contribution de la France à l’objectif européen a été estimée à environ 1,6 million de personnes, indique l’ONPES, qui souhaite que les indicateurs nationaux et européens soient mieux articulés.
Signalons que la contribution de l’observatoire devrait bientôt être complétée par celle du CNLE.
(1) ONPES – La lettre n° 2 – Février 2011 – Disponible sur
(3) Celui-ci correspond à la proportion de personnes vivant dans des ménages dont le niveau de vie est inférieur à 60 % du niveau de vie médian de la population, fixé pour une année de référence et réévalué chaque année pour prendre en compte l’inflation.