En 2010, le ministère de la Justice a décidé de remplacer la mesure d’investigation et d’orientation éducative et l’enquête sociale par une mesure d’investigation unique et modulable, dite « mesure judiciaire d’investigation éducative » (MJIE). Une circulaire – dont le projet avait suscité l’inquiétude des associations (1) –, en précise aujourd’hui les modalités de réalisation, applicables depuis le 2 janvier 2011 dans le cadre des procédures civiles (assistance éducative) et pénales mettant en cause des mineurs. Les MJIE sont mises en œuvre par les services du secteur public et du secteur associatif habilité de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Rappelons que, au pénal, le magistrat peut aussi requérir une enquête plus rapide, dite « recueil de renseignements socio-éducatifs » (RSSE), uniquement auprès du secteur public de la PJJ.
La chancellerie charge l’Ecole nationale de protection judiciaire de la jeunesse de mettre en œuvre une formation dédiée, dans le cadre des formations statutaires, continue et d’adaptation, portant sur les connaissances théoriques et l’utilisation des outils techniques et les supports méthodologiques existants. Une formation à laquelle pourra aussi avoir accès le secteur associatif habilité.
La mesure judiciaire d’investigation éducative est ordonnée durant la phase d’information (procédure d’assistance éducative) ou d’instruction (procédure pénale) par un magistrat ou une juridiction de jugement. Dans le cadre d’une procédure d’assistance éducative, les services de la PJJ doivent s’attacher à examiner notamment la personnalité et les conditions de vie du mineur et de ses parents, l’existence d’un danger pour sa santé et le caractère gravement compromis de ses conditions d’éducation. L’objectif est ici de permettre au juge de « vérifier si les conditions d’une intervention judiciaire sont réunies et de proposer, si nécessaire, des réponses en termes de protection et d’éducation, adaptées à la situation des intéressés », précise la circulaire. Dans le cadre pénal, il s’agit en particulier d’analyser la situation matérielle et morale de la famille, la personnalité et les antécédents du mineur, ses aptitudes et son attitude à l’école, sa santé… Quel que soit le domaine dans lequel intervient la mesure, souligne la chancellerie, « les personnels doivent tendre, d’une part, à l’objectivation de la situation en croisant leurs analyses des éléments recueillis à l’appui du travail interdisciplinaire et, d’autre part, à rendre compte de la complexité des problématiques ». Les services éducatifs rédigeront un rapport faisant état de la situation du mineur et de leurs propositions éducatives pour lesquelles ils précisent leurs avantages, leurs inconvénients et leur faisabilité. Avant d’être adressées au juge, les conclusions de l’investigation doivent être présentées et discutées avec les intéressés soit à l’occasion de points d’étape réalisés à l’issue des entretiens, soit de réunions de synthèse élargies, le cas échéant, à la participation d’intervenants extérieurs. Réalisée dans un cadre contraint, la mesure judiciaire d’investigation éducative n’est pas susceptible d’appel.
Quel que soit son fondement (civil ou pénal), la MJIE se décompose en un module de recueil d’informations incontournables et en un ou plusieurs modules d’approfondissement – tels que définis en annexe de la circulaire – explorant, par une approche spécifique, des problématiques touchant le mineur. Il appartient dès lors au magistrat prescripteur de définir le contour de l’investigation, en décidant, à tout moment de la procédure, de l’opportunité ou non de l’approfondissement d’une problématique spécifique. Sous réserve d’une mention expresse, le service de la PJJ doit réaliser la MJIE dans un délai maximum de cinq mois suivant sa notification (contre six mois avant). Si, en cours de réalisation de la mesure, une audience est prévue ou rendue nécessaire, le service communique au juge un rapport intermédiaire. En matière pénale, le délai d’exécution est fixé par le juge en fonction des impératifs temporels de la procédure utilisée ou du contenu du dossier. Enfin, dans les situations d’urgence, lorsque le procureur de la République entend confier un mineur à un établissement ou à un tiers – à charge pour lui de saisir ensuite le juge des enfants dans les huit jours –, il peut ordonner une MJIE que le service de la PJJ doit effectuer dans un délai de 15 jours avant la date de l’audience.
Le recueil de renseignements socio-éducatifs consiste, dans le cadre pénal, à recueillir des informations permettant au magistrat de prendre une décision dans des situations particulières, caractérisées par l’immédiateté (défèrement) ou dans un temps limité (convocation par un officier de police judiciaire). En outre, indique la chancellerie, lorsque la détention provisoire du mineur est envisagée ou requise, le RRSE a pour objectif de faire des propositions éducatives immédiatement réalisables. Si le mineur est déjà connu des services éducatifs, l’éducateur chargé du RRSE doit prendre en compte les rapports écrits existants et associer les services ayant ou ayant eu en charge le suivi du mineur à l’élaboration des propositions éducatives devant être présentées au juge. Le RRSE doit aussi analyser l’impact de ce défèrement sur les actions d’éducation en cours et sur leur éventuelle adaptation. Dans l’hypothèse où le magistrat envisage la mise en détention, le service de la PJJ doit lui transmettre tous les éléments nécessaires à ce choix (personnalité du mineur, maintien des liens familiaux, projet éducatif…).