« Les éducs, ils savent tout sur nous, ils ont lu nos dossiers. » Nassim veut aussi savoir ce que contient son dossier. Pourquoi l’empêche-t-on de le consulter ? Nassim a 16 ans ; à la mort de sa mère, il a été placé par l’aide sociale à l’enfance dans un foyer à Fontenay-aux-Roses. Là-bas, lui qui a grandi à Clichy-la-Garenne – « c’est pas vraiment la banlieue, c’est juste de l’autre côté du périphérique » – a parfois l’impression « d’être au milieu de golios » et de « racailles en barre ». Il se sent différent, ne parle pas comme eux, ne s’habille pas de la même façon et a d’excellents résultats à l’école. Surtout, il ne touche pas aux « bédos » ni à aucune substance « qui me rendrait esclave, comme ma mère ». Pourtant, au fil des mois, il se lie d’amitié avec Malek, Siang, Lyes et Christian, avec lesquels il partage une trajectoire de vie compliquée. Face aux éducateurs et surtout au directeur, M. Breton – « à cheval sur la discipline » et qui « n’a pas de projet pédagogique » –, une solidarité se crée. Entre parties de baby-foot et sorties aux puces de Clignancourt, leur quotidien semble traversé par une gaieté de tous les instants. En apparence, Nassim s’en sort, il a « la niaque ». Pourtant, de temps en temps, des visions de putréfaction encombrent son esprit, symbolisant les souffrances de son inconscient. Malgré cela, tout au long de son année passée au foyer, Nassim refusera de voir une psychologue.
La niaque est inspiré de l’expérience personnelle du comédien Chad Chenouga, également metteur en scène de la pièce. Seul sur une scène uniquement habillée de grandes étagères pleines de classeurs, il raconte les bribes de vie d’une galerie de personnages qu’on semble voir se matérialiser à ses côtés. D’ailleurs, pour les incarner, deux danseurs de « krump » (un mélange de capoeira, de danse africaine et de hip hop) interviennent par épisodes. Leurs gestes brutaux symbolisent aussi les émotions enfouies de Nassim. Leurs apparitions donnent du rythme à cette pièce intime, tenue par un comédien au fort capital de sympathie.
La niaque – Chad Chenouga – 1 h 35 – Jusqu’au 12 février, au théâtre des Amandiers – 7, avenue Pablo-Picasso, à Nanterre – Du mardi au samedi à 21 h ; le dimanche à 16 h – 12 à 25 €