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Les logements-foyers, établissements d’avenir ?

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A mi-chemin entre le domicile et l’EHPAD, les logements-foyers accueillent des personnes âgées peu ou pas dépendantes. Après avoir été délaissés, ces établissements suscitent un regain d’intérêt des pouvoirs publics. Ils continuent toutefois à souffrir de leur hétérogénéité qui, si elle leur garantit une certaine souplesse, les rend peu identifiables.

Ringards les logements-foyers ? Le concept, qui date des années 1950, a incontestablement vieilli. Et l’arrêté du 13 mars 1985, en mettant fin à l’utilisation du terme « foyer-logement » pour celui de « logement-foyer », n’a pas été d’une grande avancée comme l’attestent les interrogations récurrentes pour trouver une terminologie plus pertinente. Il n’empêche, les logements-foyers sont d’actualité. Peu ou pas médicalisés, ils répondent aux exigences actuelles des personnes âgées valides : l’indépendance, la sécurité, l’accessibilité financière, l’ancrage local et la possibilité d’avoir une vie sociale, tout en offrant différents services facultatifs qui permettent de prévenir la dépendance (voir encadré, page 35).

C’est pourquoi, conscients de leurs atouts – et bien décidés à les défendre –, les acteurs des logements-foyers attendent avec vigilance le chantier de la réforme de la prise en charge de la dépendance. « Il ne faut surtout pas que la réflexion empêche de penser les frontières de la dépendance. Il n’y a pas que la médicalisation », a ainsi mis en garde Daniel Zielinski, délégué général de l’Unccas (Union nationale des centres communaux d’action sociale), lors d’un colloque organisé le 7 décembre dernier par le Mensuel des maisons de retraite et consacré à ces établissements.

Il faut dire que les logements-foyers émergent à peine d’une période difficile du­rant laquelle ils sont clairement passés au second plan : dans la première moitié des années 2000, la priorité des pouvoirs publics allait au médical avec la moder­nisation des maisons de retraite et leur transformation en EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). Coincés entre, côté médico-social, une ré­forme de la tarification qui ne prenait pas en compte leurs spécificités et, côté logement, l’évolution de la réglementation sécurité-incendie, les logements-foyers ont alors été sommés de choisir entre la transformation en EHPAD avec des investissements conséquents en termes de médicalisation et de rénovation du bâti ou le maintien en EHPA (établissement d’hébergement pour personnes âgées) avec la difficulté, dans ce cas, de devoir se séparer des résidents les plus dépendants. Après plusieurs reports, ils ont finalement bénéficié d’aménagements en 2007, permettant notamment des conventionnements partiels (1).

Depuis le « virage de 2007 », comme l’appelle Daniel Zielinski, la pertinence des logements-foyers ne semble plus remise en cause : « La question n’est plus : “y a-t-il un avenir pour les logements-foyers ?” mais “quel avenir pour les logements-foyers ?” », affirme Luc Broussy, vice-­président de la commission « politiques sociales et familiales » de l’Assemblée des départements de France et directeur du Mensuel des maisons de retraite. Pour les gestionnaires de logements-foyers, il ne s’agit donc plus uniquement de faire valoir leurs spécificités pour assurer leur pérennité. Ils veulent désormais renforcer leur place dans une offre gérontologique plurielle, qui part des SSIAD (services de soins infirmiers à domicile) pour aller jusqu’aux EHPAD.

Pour défendre cette position pivot entre le domicile et l’établissement médicalisé, « il faut communiquer », martèle Marlène Hubert, attachée de direction développement à l’Arefo, une association gestionnaire de logements-foyers.

Premier argument : la médicalisation à outrance, telle qu’elle se profile dans les EHPAD, n’est pas la panacée. « On a été trop loin, trop vite et trop fort. Aujourd’hui, on recherche de nouvelles solutions moins médicalisées », observe Erick Lajarge, di­recteur général adjoint chargé de la solidarité au conseil général de l’Ardèche. « Les logements-foyers sont des structures à part à l’intérieur d’une palette de dispositifs qui ne peuvent se résumer aux EHPAD », défend Daniel Zielinski. « Le parcours d’une personne âgée ne se réduit pas à la vie à domicile suivie d’une vie en établissement médicalisé, renchérit Alain Lecerf, directeur général de l’AREFO. La diversité des parcours amène à envisager des réponses souples. »

Deuxième argument, le maintien à domicile, même s’il est largement plébiscité par les personnes âgées et fortement soutenu par les pouvoirs publics, n’est pas toujours possible. Solitude, isolement, besoin de sécurité physique et psychique… sont autant de freins et peuvent susciter, sinon le désir, du moins la nécessité d’entrer dans une structure intermédiaire comme le logement-foyer.

Une réponse à l’évolution démographique

Pour étayer leur démonstration, les partisans des logements-foyers peuvent s’appuyer sur les évolutions démographiques : « Les dernières projections prévoient que les 60 ans et plus pourraient passer d’environ 13 millions en 2010 à 20 millions en 2030 et les 75 ans et plus de 5,2 millions à 8,4 millions », avance le démographe et géographe Gérard-François Dumont. Quelles que soient les hypothèses retenues, ce phénomène s’accompagnera, selon lui, d’une augmentation du nombre de personnes âgées valides. « Le problème essentiel est lié à l’absence de parité entre les hommes et les femmes, ce qui signifie que les situations de solitude et d’isolement des femmes vont continuer à augmenter », explique-t-il. En permettant de concilier l’agrément d’un domicile et des moments de vie sociale, les logements-foyers sont une réponse pertinente.

Preuve que ces arguments portent, la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) adopte dorénavant un discours proche des acteurs des logements-foyers : « Un EHPAD, ce n’est pas forcément ce dont rêvent les personnes âgées, il faut donc s’adapter aux évolutions culturelles en favorisant la liberté de choix : l’Etat souhaite que ce type d’offre [les logements-foyers] prenne toute sa place dans la continuité de la prise en charge des besoins des personnes âgées », explique Aude Muscatelli, adjointe au sous-directeur de l’autonomie des personnes âgées à la DGCS.

Mais, s’il semble désormais acquis que les logements-foyers ont une carte à jouer, encore faut-il que les gestionnaires aient les moyens de rénover le parc d’établissements, qui est globalement vieillissant. Or « le coût de la réhabilitation est très important, constate Françoise Nouhen, vice-­présidente de l’Unccas et maire adjointe de Clermont-Ferrand. A minima 23 000 € par logement – environ 14 000 € pour le logement et 9 000 € pour les parties communes ». Même si des pistes de financement sont à rechercher du côté de la DGCS, de la CNAV (caisse nationale d’assurance vieil­lesse), voire de la CNSA (caisse nationale de solidarité pour l’autonomie), de la MSA (Mutualité sociale agricole), de l’USH (Union sociale pour l’habitat) et de certains groupes de protection sociale (en échange de places réservées pour leurs adhérents), le reste à charge pour les communes – notamment celles de petite taille – est souvent trop lourd. En outre, face à l’explosion des demandes sociales, les centres communaux d’action sociale – qui gèrent les deux tiers des logements-foyers – ont d’autres priorités que la réhabilitation de ces établissements.

« Pour les collectivités, la question se pose en ces termes : n’ont-elles pas un intérêt poli­tique à se désengager des logements-foyers et à investir dans le maintien à domicile, qui touche un public plus large ? », s’interroge Erick Lajarge. Sachant que si elles décident de rénover les logements-foyers, elles doivent s’efforcer de ne pas faire peser ce coût sur la redevance des résidents, au risque d’atténuer la vocation sociale de ces structures. Défi d’autant plus grand que l’évolution du profil des publics accueillis laisse augurer des problèmes de solvabilité croissants. A l’AREPA, association qui gère une quarantaine de logements-foyers, on constate en effet une augmentation du nombre de résidents bénéficiant de l’aide sociale. En outre, symptôme de la fragilisation du public, des partenariats avec des services psychiatriques sont mis en place.

Le choix « pragmatique » de Nantes

Dans ce contexte, la ville de Nantes a fait le choix « pragmatique » de « privilégier l’accompagnement d’un public précaire nécessitant un suivi social et, parfois, une prise en charge psychologique », explique Sébastien Leray, directeur des établissements médico-sociaux de la ville. N’ayant pas les moyens de rénover ses huit logements-foyers, dont près de 20 % des places étaient vacantes, cette décision lui a permis de ne pas jeter l’éponge. Au final et après un diagnostic des besoins du territoire, la municipalité n’a fermé que 40 appartements et deux établissements ont été convertis en EHPAD. Mais la pérennité des six logements-foyers est encore fragile ; elle dépendra largement des partenaires financiers. Parmi eux, le conseil général s’est engagé, depuis peu, à soutenir la réhabilitation des logements-foyers.

« Il faut tout faire pour que tout le monde continue à avoir accès aux logements-foyers », revendique Françoise Nouhen. Au ministère du Logement, on souligne qu’il existe des outils de programmation – les plans départementaux de l’habitat (PDH) et les plans locaux de l’habitat (PLH) – qui doivent permettre d’anticiper les besoins en matière d’établissements. Et, preuve que le problème est bien connu, la CNAV propose, depuis décembre 2010, en partenariat avec le ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale, un outil d’aide au diagnostic à destination des logements-foyers, qui devrait faciliter le mon­tage financier des opérations de réhabilitation. Dénommé Adel (aide à la décision pour l’évolution des logements-foyers) (2), ce programme a pour vocation de repérer les établissements exemplaires (de proximité, avec un bâti adapté, fruit d’un diagnostic partagé, avec un projet cohérent et des pres­tations de qualité) et de construire une offre adaptée à la prise en charge gérontologique locale.

Reste que, si la question de la réhabilitation des logements-foyers est une priorité, elle n’est pas la seule. Il s’agit aussi d’inventer de nouveaux modèles d’établissements. « Moderniser, c’est répondre non seulement à des évolutions réglementaires mais aussi à des évolutions sociologiques et de cadre de vie, explique Daniel Zielinski. Il faut imaginer des logements-foyers en centre-ville pour faciliter la vie sociale, faire évoluer les appartements qui ne correspondent plus à l’image qu’on en avait dans les années 1970, réfléchir à des conventionnements partiels en EHPAD… »

Dans cette perspective, l’Unccas a voté en octobre 2010 un soutien aux logements-foyers dans son plan de développement stratégique. Des expériences intéressantes existent déjà, comme à Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis) où un logement-foyer, géré par le CCAS et destiné à être démoli dans le cadre d’une opération de rénovation urbaine, a été reconstruit à proximité du centre-ville dans un bâtiment qu’il partage avec un EHPAD. Dotés d’un cadre attrayant, les deux établissements, articulés autour d’un restaurant commun, bénéficient d’espaces et d’équipements mutualisés – chaufferie, salon de coiffure, chambre d’hôtes… « Notre volonté a été de maintenir une redevance identique alors que le loyer a été multiplié par cinq, ce qui impacte fortement le budget du CCAS », explique Nadine Bouhsane-Quere, directrice générale adjointe chargée de l’aide sociale au sein de la municipalité.

Après le déménagement des résidents, début 2009, qui a nécessité un accompagnement spécifique, il faut désormais faire vivre la synergie entre les deux établissements. Les équipes doivent trouver leurs marques pour arriver à mettre en place des animations conjointes, anticiper les réservations des salles communes, etc. « A terme, nous voudrions développer des actions de solidarité intergénérationnelle entre les aînés du logement-foyer et les personnes âgées de l’EHPAD », explique Nadine Bouhsane-Quere. Autre possibilité liée au partage d’un même bâtiment : permettre à un couple dont l’un est en foyer-logement et l’autre en EHPAD de continuer à prendre leur repas ensemble. « Pour les résidents du logement-foyer, cette proximité permet de dédramatiser l’EHPAD et d’apprivoiser la perte d’autonomie », explique Marlène Hubert, de l’Arefo, qui a accompagné le projet. Reproductible ailleurs, cette démarche, qui a permis la conception d’un logement-foyer d’un genre nouveau, prouve que les contraintes budgétaires et réglementaires peuvent, à force de persévérance et surtout grâce au soutien politique local, être dépassées.

Luc Broussy a encore d’autres idées pour le logement-foyer de demain : « Complètement ouvert sur le quartier, pourquoi ne pourrait-il pas devenir un centre de ressources des personnes âgées qui vivent à proximité ? » Proche des commerces, des transports et des administrations, il doit ainsi répondre aux évolutions démographiques qui prévoient que le vieillissement sera avant tout urbain et péri-urbain. En outre, « il faut l’adapter aux baby-boomers qui n’ont pas les mêmes besoins que leurs aînés », explique Alain Lecerf. Ce dernier favorise déjà, au sein de l’Arefo, des résidences à la carte avec une diversification des services : accueil des familles pour de courts séjours, aide à l’aménagement du logement, service de maintenance et petites réparations, prévention santé, do­motique, service de transports de proximité, jardins – et, pourquoi pas, bientôt, « salles de sport et hammam ? Les personnes qui vont arriver auront connu ça ! », argumente-t-il. « Y a-t-il des logements-foyers qui acceptent les chats ? », s’interroge, de son côté, Sylvain Denis, vice-­président du Comité national des retraités et personnes âgées, qui insiste aussi sur la nécessité d’installer un réseau wifi.

Quels que soient les services proposés, « ce sera néanmoins toujours une rupture, précise Alain Lecerf. L’accompagnement sera donc nécessaire pour aider la personne à prendre sa place dans cette nouvelle communauté. Dans ce cadre, l’animation doit évoluer : elle doit pouvoir mobiliser les résidents comme des citoyens à part entière tournés vers le monde, favoriser la vie en dehors des murs et la transmission. Les logements-foyers doivent être des lieux bouillonnant d’envies. »

Des structures à géométrie variable

Reste qu’aujourd’hui, les logements-foyers se distinguent surtout par leur hétérogénéité avec une diversité des services proposés, des publics accueillis et des redevances payées. Quoi de commun entre un logement-foyer qui offre des services de confort et un autre qui propose un suivi social et psychologique ? Entre un logement-foyer avec très peu de prise en charge médicale et un autre un peu plus médicalisé, sans être pour autant un EHPAD ? Entre un logement-foyer dont la redevance mensuelle est fixée à 400 € et un autre où les résidents doivent débourser 1 300 € ? Pour ces établissements à géométrie variable, le défi consiste encore et toujours à avoir une identité reconnue. De fait, malgré l’attention nouvelle de la direction générale de la cohésion sociale, il arrive encore que, même dans les ministères concernés, le terme soit relativement méconnu. Une telle ignorance explique que les médecins et les travailleurs sociaux soient encore peu nombreux à orienter les usagers vers ce mode d’hébergement. Or, si l’Unccas s’en fait volontiers le porte-parole, elle ne saurait remplacer une fédération nationale des logements-foyers, qui n’existe pas à ce jour.

La complexité réglementaire qui perdure par ailleurs, malgré les avancées de 2007, ne fait rien pour arranger les choses : « Le flou entre ce qui relève de la législation sur l’urbanisme et ce qui dépend de la législation médico-sociale pose des problèmes au niveau des contrats de séjour, des prestations de services… », constate un directeur de logement-foyer. Et certains cloisonnements administratifs renforcent les difficultés : « Nora Berra [actuellement secrétaire d’Etat à la santé], lorsqu’elle était secrétaire d’Etat aux aînés, nous disait que les logements-foyers n’étaient pas de sa compétence, s’agace Alain Lecerf. Tant que nous serons confrontés à ce type de réaction, on n’avancera pas ! On sera des hybrides, des “machins” et on se fera toujours avoir. » « Il faut se mettre tous autour de la table car ni l’élu ni le promoteur de base n’y comprennent plus rien ! », s’exclame Françoise Nouhen, qui souhaite que soient enfin fixées des règles de fonctionnement et de financement précises. L’Unccas prévoit d’ailleurs une table-ronde sur les logements-foyers au premier semestre 2011.

Pour clarifier les choses, certains acteurs sont d’ores et déjà favorables à la création d’un statut spécifique du logement-foyer. D’autres souhaitent recourir à une classification – sur le modèle des CLIC (centres locaux d’information et de coordination) – en fonction des services proposés et du public accueilli. Quant à la DGCS, elle a coordonné l’élaboration d’un cahier des charges des logements-foyers, sorte de guide des bonnes pratiques à destination des promoteurs et des gestionnaires. « Il est prêt, indique Aude Muscatelli. Il ne reste plus qu’à le faire valider par l’ensemble des acteurs ». Mais ces pistes intéressantes ne vont-elles pas enserrer les logements-foyers dans un carcan ? Quid alors de leur souplesse, qui leur permet de répondre à une multitude de demandes et de stimuler l’innovation ?

D’autant qu’au-delà des défis de la rénovation du bâti et de l’invention de nouveaux modèles d’établissements, il reste d’autres obstacles à surmonter. Le premier tient à l’aménagement du territoire : « Il y a des territoires avec un maillage d’EHPAD très fort et pas de logements-foyers du tout », explique Erick Lajarge. Or une des principales motivations des résidents pour entrer en logement-foyer est le rapprochement familial. « Ces établissements sont donc indispensables dans tous les bassins de vie », note Thierry Bazin, directeur général de l’AREPA.

Autre difficulté : la disparition des structures intermédiaires entre les logements-foyers et les EHPAD. « La réforme de la tarification des établissements pour personnes âgées a fait que les EHPAD, ultra-médicalisés, tendent vers des GMP [groupe iso-ressources moyen pondéré] de 700 ou 800 et les logements-foyers doivent avoir un GMP inférieur à 300 ; entre les deux, c’est le no man’s land », s’inquiète Luc Broussy. Faut-il alors, comme il le suggère, relever le seuil de GMP des logements-foyers pour qu’ils s’articulent avec les EHPAD ?

Vient ensuite le problème de la concurrence des « résidences services », gérées par des entreprises privées, beaucoup plus chères. Les logements-foyers sauront-ils s’en distinguer en se recentrant sur leur dimension sociale, d’autant que la paupérisation d’une certaine frange de retraités est prévisible ?

Le déploiement des agences régionales de santé (ARS) suscite également des inquiétudes : leur pilotage sera-t-il homogène sur l’ensemble du territoire ? « La régionalisation est éventuellement un danger : en Rhône-Alpes par exemple, la situation duvieillissement dans les départements de l’Ardèche et du Rhône n’a rien à voir », explique Gérard-François Dumont. Il faut, selon lui, « apporter des réponses adaptées à chaque territoire et souples dans le temps, en tenant compte du fait que l’évolution démographique n’est pas forcément linéaire ». Autre sujet d’incertitude : la nouvelle procédure d’appels à projets des ARS n’aura-t-elle pas tendance à privilégier les établissements pour personnes âgées très médicalisés, marginalisant, une fois de plus, les logements-foyers ? Par précaution, Daniel Zielinski suggère de lancer une « grande campagne de communication auprès de ces nouveaux établissements publics de l’Etat pour mieux leur faire connaître les spécificités des logements-foyers ».

UN « CHEZ SOI » AMÉLIORÉ

Le logement-foyer est un établissement médico-social relevant de la loi 2002-2, mais ce n’est pas un lieu de soin : c’est avant tout un lieu de vie qui a tous les attributs du domicile. Rattaché à pas moins de quatre ministères (Logement, Santé, Affaires sociales et Intérieur), il dépend également des conseils généraux, qui coordonnent la politique gérontologique au niveau des départements. A la différence d’un EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), il accueille des personnes âgées non dépendantes : son GMP (groupe iso-ressources moyen pondéré) doit être inférieur à 300, même si des aménagements sont possibles depuis 2007 (3). Autorisé par le département et financé par l’assurance maladie lorsqu’il est médicalisé, le logement-foyer a l’intérêt de proposer un « chez soi » – un appartement privatif (de type F1 en grande majorité) souvent doté d’une chambre et d’une kitchenette avec un coin salon que la personne aménage selon ses goûts – avec une présence 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 et la possibilité de profiter d’un ensemble de services facultatifs : espaces de vie collective, temps d’animation, restauration, pédicure… Complètement indépendants, les résidents peuvent continuer à faire la cuisine chez eux, recevoir leurs amis, leur famille, leur médecin personnel ou leur aide-ménagère dans le cadre de l’aide à domicile. A charge pour eux de verser chaque mois une redevance, variable selon les services reçus. Conformément à la vocation sociale des logements-foyers, cette redevance peut être minimisée dans le cas où l’établissement est habilité à l’aide sociale (c’est le cas de 40 % des logements-foyers, même si seulement 5 % des résidents reçoivent effectivement cette aide) et conventionné APL (aide personnalisée au logement) (70 % des logements-foyers le sont, avec 36 % de bénéficiaires).

PEU DE CHIFFRES, MAIS DE NOMBREUX TEXTES

Les derniers chiffres remontent à l’enquête auprès des établissements d’hébergement pour personnes âgées (EHPA) menée en 2007 par la direction des études et de la recherche (4). Celle-ci fait état de près de 3 000 logements-foyers hébergeant un peu plus de 140 000 résidents. « Environ 3 % de la population des 75 ans et plus se retrouvent en logement-foyer, ce qui n’est pas un chiffre démesuré », note le géographe et démographe Gérard-François Dumont (5). Deux tiers des établissements sont gérés par le secteur public via les centres communaux d’action sociale, le reste (à l’exception de quelques dizaines d’établissements à caractère commercial ou rattachés à un hôpital) l’étant par le secteur associatif.

A l’échelle nationale, les logements-foyers représentent environ un cinquième des places de l’ensemble des établissements pour personnes âgées. Il existe néanmoins de grandes disparités locales : ces établissements offrent ainsi 35 % des places en Haute-Normandie contre 8 % en Auvergne. La répartition par âge y est sensiblement différente de celle des EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes): les moins de 75 ans sont 18 % en logement-foyer et seulement 8 % en EHPAD alors que les plus de 85 ans sont 40 % dans les premiers et plus de 60 % dans les seconds. Pas de surprise non plus, la durée moyenne de séjour est plus longue en logement-foyer (un peu plus de cinq ans) qu’en EHPAD (près de quatre ans). De même, le GIR (groupe iso-ressources) des résidents diffère : plus de neuf résidents sur dix ont un GIR compris entre 4 et 6 en logement-foyer alors qu’ils ne sont qu’un tiers en EHPAD.

Si les chiffres sur ces établissements sont relativement rares, les textes sont, en revanche, nombreux. « Une avalanche », note Erick Lajarge, directeur général adjoint chargé de la solidarité au conseil général de l’Ardèche. L’acte fondateur des logements-foyers est la loi-cadre sur l’urbanisme du 7 août 1957, qui stipule que le gouvernement facilite « la création et le fonctionnement d’organismes spécialisés qui seront chargés de la construction et de la gestion des logements-foyers ». En 1971, les pouvoirs publics précisent une fois de plus ce qu’est un logement-foyer, idem en 1985. Il faut toutefois attendre la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains en 2000 pour que le logement-foyer soit reconnu comme une résidence principale. Enfin, le décret du 9 mai 2007 et la circulaire du 15 mai 2007 assouplissent le régime des logements-foyers pour les rendre compatibles avec la réforme de la tarification des établissements pour personnes âgées et avec l’évolution de la réglementation sécurité-incendie.

Notes

(1) Le régime applicable aux logements-foyers a été assoupli par la circulaire du 15 mai 2007 (pour la réglementation sécurité-incendie) et le décret du 9 mai 2007 (pour les modalités de tarification et de médicalisation) – Voir ASH n° 2555 du 25-04-08, p. 9.

(2) Cet outil est disponible sous forme de CD-Rom auprès des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail et sur Internet : www.lassuranceretraite.fr, rubrique « Partenaires de l’action sociale/Actualités nationales ».

(3) Les logements-foyers dont le GMP est supérieur à 300 mais qui n’accueillent pas plus de 10 % de résidents classés en GIR 1 et 2 peuvent déroger au conventionnement EHPAD ou être conventionnés partiellement – Voir ASH n° 2555 du 25-04-08, p. 9.

(4) En ligne sur www.sante-sports.gouv.fr/IMG/pdf/seriestat142.pdf.

(5) Il a dirigé l’ouvrage Les territoires face au vieillissement en France et en Europe – Ed. Ellipses, 2006.

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