« Nous voulons être dans le tempo ! », a expliqué Claudy Lebreton, président de l’Assemblée des départements de France (ADF), quelques minutes après avoir donné le coup d’envoi, le 11 janvier, du premier atelier de ses « assises de l’autonomie », dont une synthèse est disponible sur un blog dédié (1). Alors que les groupes de travail sur la dépendance viennent d’être lancés par le gouvernement (2), l’association souhaite, par cette initiative, « bâtir [sa] contribution au débat national ». Elle prévoit, à l’issue des trois ateliers, la publication au printemps prochain d’une « plateforme partagée et programmatique ». Une centaine de personnes, en majorité des élus membres de l’ADF mais également des acteurs du monde associatif, se sont donc rassemblées le 11 janvier pour poser le cadre du débat à partir de deux thèmes : les enjeux démographiques et la dépendance au regard de la solidarité familiale.
Il ressort des projections de l’INSEE sur le vieillissement que, si 30 % des Français auront plus de 60 ans en 2035 (contre 23 % aujourd’hui), il n’y aura « pas de tsunami de personnes dépendantes » dans les décennies à venir. En effet, selon les estimations, la dépendance concernera 16,7 % des plus de 75 ans. « La population des personnes âgées sera majoritairement valide, urbaine, isolée socialement et familialement, et vivra dans des logements peu adaptés, résume Yves Daudigny, sénateur, président du conseil général de l’Aisne et président de la commission « Politiques sociales et familiales » de l’ADF. Ce qui nous oblige à réfléchir à l’offre de services en établissement comme à domicile. »
Quant aux solidarités familiales, contrairement à une idée reçue, elles n’apparaissent pas défaillantes. En outre, la mise à contribution du patrimoine, telle que le propose le rapport Rosso-Debord (3), s’inscrit, selon Isabelle Sayn, professeur au centre de recherche critique sur le droit à l’université de Saint-Etienne, dans l’évolution des mentalités : « On admet plus qu’avant que le patrimoine constitué au cours d’une vie puisse être mis à contribution pour prendre en charge la dépendance. » Reste que cette proposition est fortement contestée par les associations. Tout dépendra, de plus, du niveau retenu, estime Luc Broussy, vice-président de la commission sociale de l’ADF.
Autre sujet non moins controversé, celui de la question de la convergence entre les dispositifs d’aide destinés aux personnes âgées et aux personnes handicapées. Le 6 janvier, Roselyne Bachelot, ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, a fermé la porte à cette idée en affirmant clairement que la réforme de la dépendance concernera uniquement les personnes âgées. Sa déclaration laisse donc peu d’espoir de voir se créer un droit universel à compensation de la perte d’autonomie comme le réclament les associations depuis plusieurs années. Ainsi l’Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis) voit dans les propos de la ministre « une profonde méconnaissance de la situation des personnes handicapées mentales vieillissantes ». L’association demande, pour ces publics, des mesures spécifiques « qui ont légitimement vocation à s’inscrire dans le chantier de la dépendance », comme le développement de structures et services spécialisés et la médicalisation d’établissements. Elle réclame aussi que les personnes handicapées puissent percevoir l’allocation aux adultes handicapés toute leur vie (à 60 ans, l’AAH est remplacée par l’allocation de solidarité aux personnes âgées).
De son côté, Luc Broussy, lors des assises de l’ADF, a défendu une « convergence sans confusion ». Il estime que, sans aller jusqu’au versement d’une allocation identique pour les deux publics, il faut faire « converger ce qui est possible » dans les secteurs des transports ou de l’adaptation des logements, où les problèmes se posent de manière identique pour les personnes âgées et handicapées. Il estime, par ailleurs, que la barrière des 60 ans, qui détermine l’octroi de la prestation de compensation du handicap (PCH) et de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), n’est plus pertinente à l’heure où la dépendance ne survient qu’après 80 ans.
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