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Recouvrement des indus : un décret suscite l’inquiétude pour les plus pauvres

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Dans les cartons depuis un an, le projet de décret relatif au recouvrement des indus de prestations à caractère social ou familial et d’aides personnelles au logement a fini par être signé par tous les mi­nistères concernés au mois de décembre. Après avoir, semble-t-il, quelque peu embarrassé le gouvernement, sa parution était annoncée comme imminente au tout début de l’année, au grand dam des organisations qui s’étaient élevées contre ses dispositions.

Ces dernières découlent de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, qui a prévu d’améliorer le recouvrement des indus en permettant aux organismes débiteurs de prestations familiales de récupérer le montant versé à tort pour une allocation sur un autre type d’aide. Cette « fongibilité » permet de regrouper les indus de différentes prestations afin de les récupérer en un règlement global, avec l’objectif de simplifier et d’harmoniser la procédure, tout en tenant compte de la capacité contributive des allocataires. Un premier décret, daté du 21 juillet 2009, a rendu le système applicable aux seuls indus de prestations familiales, de l’alloca­tion aux adultes handicapés, de l’allocation de logement sociale et de l’aide person­nalisée au logement (APL) (1). Le second texte, qui était resté en suspens, prévoit l’extension du dispositif au revenu de solidarité active (RSA) et un aménagement du barème personnalisé de recouvrement. Il porte notamment la retenue mensuelle minimale de 39 à 45 €.

Si, argumente la direction de la sécurité sociale, le nouveau barème personnalisé est, pour les bénéficiaires du RSA, « plus favorable que le système de recouvrement qui existait pour cette allocation » (le prélèvement s’élevait jusqu’à 20 % de la prestation versée), le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) avait émis un avis défavorable sur le texte, le 18 janvier 2010. Rappelant que le montant des revenus des allocataires du revenu de solidarité active se situe en dessous du seuil de pauvreté, il avait réclamé une évolution de « l’approche du droit public » et réitéré son opposition à « la mise en place d’une procédure de recouvrement d’indus si l’allocataire n’en est pas responsable ». Il avait regretté que la notion de « reste à vivre » n’apparaisse pas dans le projet de décret et demandé la mise en place de mécanismes de protection d’un seuil minimal de ressources. Au-delà, la « fongibilité » des recouvrements fait craindre une aggravation des difficultés de ressources : « Sachant par ailleurs que les aides au logement génèrent les deux tiers des situations d’indus (l’APL en génère à elle seule un tiers), il est à craindre que, si le RSA-socle n’est pas protégé, la récupération d’indus d’aide au logement ne l’émarge encore plus », s’était-il alarmé. Le conseil d’administration de la CNAF (caisse nationale des allocations familiales) avait également émis un avis défavorable le 5 janvier 2010, plusieurs de ses membres ayant considéré que le barème de recouvrement « n’était pas adapté aux plus modestes » et que « l’objectif d’harmonisation des seuils de non-recouvrement était partiel ».

Dans un courrier adressé le 20 décembre dernier au ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale et au secrétaire d’Etat au logement, l’Uniopss (Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux) a encore demandé une modification du texte qui tienne compte de l’avis du CNLE. Avant même que le décret ne paraisse, « nos adhérents nous indiquent que certaines CAF commenceraient à l’appliquer, et de façon différenciée sur le territoire », déplore l’union.

En réalité, une lettre-circulaire de la CNAF du 4 février 2010 sur l’« extension du dispositif de compensation inter-fonds » a anticipé sa mise en œuvre. Evoquant un décret « en cours d’application », elle précise que, à compter du 1er janvier 2010, « les indus de prestations, quel que soit le fonds de financement, y compris celles financées sur le fonds d’action sociale, peuvent être recouvrés sur le RSA généralisé (socle, activité y compris bonus), le RSA expérimental au titre du RMI, le RMI, la prime forfaitaire au titre du RMI et la prime de retour à l’emploi », et réciproquement.

Notes

(1) Voir ASH n° 2620 du 21-08-09, p. 19.

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