Le périmètre du futur défenseur des droits n’en finit pas de s’élargir. Après le défenseur des enfants, le médiateur de la République, la Commission nationale de la déontologie de la sécurité et la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, c’est aujourd’hui le contrôleur général des lieux de privation de liberté qui pourrait se fondre dans les fonctions du défenseur des droits. Le 1er décembre dernier, la commission des lois de l’Assemblée nationale a en effet modifié le projet de loi organique relatif au défenseur des droits, qu’elle examinait en première lecture (1). Elle a confié à cette future instance la mission de « contrôler les conditions de prise en charge et de transfèrement des personnes privées de liberté », qui est assurée actuellement par le contrôleur général des lieux de privation de liberté. Alors que le texte devrait être débattu en séance publique à partir du 11 janvier, dix organisations (2) demandent aux parlementaires de maintenir l’existence de cette instance.
Elles rappellent que la création de ce poste, en octobre 2007, a permis à la France de se mettre en conformité avec le protocole additionnel à la Convention contre la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains et dégradants du 18 décembre 2002. Sa dilution « est de nature à compromettre l’avancée des droits des personnes privées de liberté par décision judiciaire ou administrative », argumentent-elles. Selon elles, le défenseur des droits, héritier de l’actuel médiateur de la République, aura avant tout une mission de médiation, en intervenant comme tiers dans la résolution des conflits entre un individu et une administration. Il n’assurera pas la mission plus globale de contrôle des conditions de vie des personnes privées de liberté dans un souci de « prévention des atteintes aux droits de l’Homme ». Ainsi, avec la disparition du contrôleur général des prisons, « c’est l’effort plus général de transformation des lieux de privation de liberté qui s’en trouverait affaibli ».
Les organisations craignent aussi que le défenseur des droits ne puisse déployer le niveau d’expertise et les « compétences particulières » nécessaires à la fonction de contrôle des lieux de privation de liberté. Sa pertinence « tient en grande partie à la compétence des contrôleurs et donc à la spécialisation des fonctions de cette instance », précisent-elles. Au final, l’absorption du contrôleur général au sein du défenseur des droits « mettra à mal l’efficacité d’un système de contrôle indépendant des lieux de privation de liberté dont notre pays a besoin ».
(1) Le texte a été adopté en première lecture au Sénat en juin dernier – Voir ASH n° 2663 du 11-06-10, p. 25
(2) ANVP (Association nationale des visiteurs de prison), CGT-PJJ, Cimade, Farapej (Fédération des associations réflexion action prison et justice), Genepi (Groupement étudiant national d’enseignement aux personnes incarcérées), LDH, Syndicat de la magistrature, Snepap-FSU, SNPES-PJJ-FSU, UGSP-CGT.