Plus de deux ans après la mobilisation des personnels d’insertion et de probation pour la reconnaissance de leurs missions, les décrets relatifs à la réforme statutaire de la filière sont parus le 28 décembre (voir ce numéro, page 6). Ils « concrétisent enfin la reconnaissance d’une profession spécifique au sein de l’administration pénitentiaire et du ministère de la Justice – conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation [dénomination qui remplace celle de conseiller d’insertion et de probation] – dotée d’une expertise et d’une technicité propres. Cette reconnaissance se traduit par une revalorisation indiciaire qui se mettra en œuvre dès les premiers mois de 2011 », se félicite le Syndicat national de l’ensemble des personnels de l’administration pénitentiaire (Snepap)-FSU. L’organisation est la seule à avoir négocié et signé le protocole d’accord du 9 juillet 2009 qui avait jeté les bases de cette réforme, avant que la CGT-pénitentiaire et la CFDT-Interco, qui avaient exprimé leur désaccord sur la redéfinition des missions des agents, ne rejoignent la table des négociations en comité technique paritaire. « Les discussions ont été longues et compliquées, mais nous avons pu obtenir gain de cause dans un contexte budgétaire difficile », souligne Sylvain Roussilloux, secrétaire national du Snepap. Pour l’organisation, le principal bémol porte sur l’encadrement. Le corps des chefs de service d’insertion et de probation (CSIP) doit disparaître, l’administration ayant estimé que ces derniers assurent dans les faits quasiment les mêmes missions que les directeurs. Mais « en n’assurant pas l’intégration complète et immédiate de tous les CSIP dans le corps des directeurs pénitentiaires d’insertion et de probation (DPIP), cette réforme reste au milieu du gué pour l’encadrement intermédiaire des SPIP », estime le Snepap. Le syndicat juge également que de nouvelles négociations sont nécessaires afin d’obtenir une revalorisation indiciaire pour les DPIP.
De son côté, la CGT-pénitentiaire se satisfait d’une « revalorisation indiciaire importante pour les CPIP à l’échelle de la carrière », commente Samuel Aze, référent national des travailleurs sociaux. Au terme de la réforme, un agent pourra ainsi bénéficier de 31 points supplémentaires (143 euros bruts en plus d’après la valeur du point au 1er juillet) après trois ans d’ancienneté, et de 74 points (342 euros bruts) au bout de 26 ans, les gains étant moins élevés en milieu de carrière. L’organisation émet toutefois des réserves sur la mise en œuvre pratique de la réforme, puisqu’elle s’échelonnera sur une période de quatre années pleines. Les CPIP voient, en outre, leur durée de carrière allongée de trois ans.
Sur la redéfinition des missions des CPIP, également au cœur de la réforme, la CGT-pénitentiaire se satisfait d’avoir été entendue. Avec la CFDT-Interco, elle s’était élevée contre la scission entre le champ pénal et criminologique – sur lequel les CPIP doivent se recentrer – et celui du travail social. « Au fur et à mesure des comités techniques paritaires, nous avons proposé et obtenu des amendements visant à garder un ancrage des missions des CPIP ? dans le travail social, à nos yeux important en termes de valeurs et de positionnement par rapport aux publics et à l’institution », explique Samuel Aze. Ainsi, à côté de l’exécution de la peine et de la prévention de la récidive, le décret reconnaît aux CPIP, notamment, une expertise en matière d’« accompagnement socio-éducatif ».
Pour les syndicats, reste néanmoins en suspens la question du devenir des assistants de service social (près de 10 % des quelque 3 000 personnels d’insertion et de probation). Deux options leur sont ouvertes : leur intégration dans le nouveau corps des CPIP ou leur maintien dans leur statut, sachant que le protocole d’accord de 2009 prévoyait la création d’équipes pluridisciplinaires dans les SPIP, comprenant notamment des travailleurs sociaux. Mais ce projet reste encore flou, jugent les syndicats, qui doivent prochainement s’en entretenir avec l’administration pénitentiaire.