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La loi de finances pour 2011 validée en grande partie par le Conseil constitutionnel

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Saisi par 60 députés et 60 sénateurs de l’opposition, le Conseil constitutionnel a, le 28 décembre, validé en grande partie la loi de finances pour 2011 que le Parlement avait adoptée définitivement près de deux semaines auparavant.

Rejetant l’ensemble des griefs soulevés par les requérants, les sages ont toutefois censuré d’office six articles – sur 211 – qui, à leurs yeux, n’avaient pas leur place dans une loi de finances. Et parmi eux l’article 196, qui modifiait la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs pour proroger le délai dans lequel les mandataires judiciaires à la protection des majeurs doivent se conformer aux nouvelles dispositions relatives à leur habilitation (1). Egalement censuré en tant que cavalier législatif, l’article 197 prévoyait un rapport au Parlement sur l’état des lieux de l’offre et des besoins d’accompagnement et d’hébergement assurés dans les établissements et services médico-sociaux accueillant les personnes handicapées de plus de 40 ans.

Le Conseil constitutionnel n’a en revanche rien trouvé à redire à l’article 115, qui supprime la possibilité pour les fonctionnaires et agents non titulaires d’acquérir des jours RTT (réduction du temps de travail) lorsqu’ils sont en arrêt maladie. Pour les requérants, cette mesure – qui prend le contre-pied d’une jurisprudence administrative – n’avait pas sa place dans une loi de finances, mais pour les sages, elle a bien une incidence directe sur les dépenses du budget de l’Etat et n’est donc pas un cavalier législatif.

Un droit d’entrée dans l’AME

Aussi et surtout, le Conseil constitutionnel a validé les très controversés articles 186 et 188, qui durcissent les conditions d’accès à l’aide médicale de l’Etat (AME) (2). Pour les demandes déposées à compter du 1er mars 2011, le droit à l’aide sera ainsi conditionné par le paiement d’un droit annuel d’un montant de 30 € par bénéficiaire majeur. En outre, sauf pour les soins délivrés aux mineurs et pour les soins inopinés, la prise en charge d’un bénéficiaire de l’AME sera bientôt subordonnée, pour les soins hospitaliers dont le coût dépasse un seuil qui sera fixé par décret, à un agrément préalable de la caisse dont dépend l’intéressé. Cet agrément sera accordé dès lors que les conditions de ressources et de stabilité de la résidence en France exigées par la loi seront remplies.

Selon les parlementaires de l’opposition, ces dispositions retardent la prise en charge des malades et font obstacle à l’accès aux soins des plus démunis. Ce faisant, à leurs yeux, elles méconnaissent la protection constitutionnelle du droit à la santé. Mais le Conseil constitutionnel a été d’un tout autre avis, estimant notamment que, avec les règles qu’il a fixées pour imposer la vérification des conditions d’octroi de l’AME avant la prise en charge de soins hospitaliers dont le coût est élevé, le législateur a adopté « des mesures propres à assurer une conciliation qui n’est pas disproportionnée entre les exigences constitutionnelles, d’une part, de bon emploi des deniers publics et de lutte contre la fraude et, d’autre part, du droit à la protection de la santé ».

Signalons que l’article 185 de la loi de finances porte également sur l’AME… mais les sages de la rue Montpensier n’en ont pas été saisis. Il n’en est pas moins controversé et sa suppression avait même été demandée par la commission des affaires sociales du Sénat. Cet article exclut des frais liés aux soins et transports sanitaires pris en charge par l’aide médicale de l’Etat les actes, produits et prestations pour lesquels le service médical rendu n’a pas été qualifié de moyen ou d’important ou qui ne sont pas destinés directement au traitement ou à la prévention d’une maladie.

Le « rabotage » des niches fiscales

Sur un tout autre sujet, les parlementaires socialistes avaient également attaqué l’article 105 de la loi de finances, qui diminue de 10 % l’avantage en impôt résultant de diverses réductions et crédits d’impôts. Une mesure dont sont exclus certains dispositifs comme la réduction d’impôt accordée au titre des sommes versées pour l’emploi d’un salarié à domicile ou le crédit d’impôt pour frais de garde des jeunes enfants. Les requérants estimaient notamment qu’en excluant des réductions ou crédits d’impôt du dispositif de réduction globale des avantages en impôts, le législateur avait porté atteinte au principe d’égalité devant les charges publiques. Mais la Haute Assemblée a considéré que le législateur pouvait, sans méconnaître ce principe d’égalité devant les charges publiques, réduire le coût de certaines « niches fiscales ». En l’occurrence, aux yeux des sages, il n’a pas appliqué cette réduction à certains dispositifs « pour ne pas affaiblir leur caractère incitatif ». « Une telle différence de traitement est en rapport direct avec les objectifs qu’il s’est assignés », estiment-ils.

Signalons également au menu de la loi de finances pour 2011 la suppression d’un certain nombre de niches fiscales et sociales, telles les exonérations spécifiques de cotisations sociales à la charge de l’employeur dans le domaine des services à la personne, l’exonération de cotisations sociales patronales applicable aux contrats initiative-emploi ou bien encore les exonérations applicables aux indemnités de rupture versées dans le cadre d’un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

Tout un ensemble de mesures dont le Conseil constitutionnel n’a pas été saisi intéresse par ailleurs l’action sociale, comme l’expérimentation d’un contrat d’accompagnement renforcé pour les personnes en situation précaire dans six bassins d’emploi, l’alignement du dispositif d’intéressement de l’allocation de solidarité spécifique sur celui du revenu de solidarité active, la prorogation pour l’année 2011 de la majoration du taux de prise en charge au titre des embauches en contrat unique d’insertion par les ateliers et chantiers d’insertion ou bien encore le transfert au Fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) de la gestion de certains dispositifs à destination des travailleurs handicapés, jusqu’alors pris en charge par l’Etat.

Les ASH reviendront en détail sur la loi de finances pour 2011 dans un prochain numéro. Notons que ce texte s’inscrit dans le cadre, plus large, d’une loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 (3).

[Décision du Conseil constitutionnel n° 2010-622 DC du 28 décembre et loi à paraître]
Notes

(1) La direction générale de la cohésion sociale a diffusé une circulaire sur le sujet à l’automne dernier (voir ASH n° 2679 du 22-10-10, p. 17). La disposition pourrait trouver une place dans la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, adoptée en première lecture par les deux chambres et qui doit à présent être réexaminée par les députés.

(2) Sur les réactions associatives, voir ASH n° 2687 du 17-12-10, p. 25.

(3) Loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010, J.O. du 29-12-10.

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