« Non aux tentes du Conseil d’Etat ! » C’était le mot d’ordre de la centaine de personnes rassemblées le 20 décembre devant les bâtiments de la juridiction, à l’appel du GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigrés) et d’une quarantaine d’organisations de défense des étrangers, des droits de l’Homme et du droit au logement. Celles-ci protestaient contre sa décision « humainement dégradante » d’autoriser, en dernier recours, les autorités administratives à héberger sous des tentes les demandeurs d’asile (voir ce numéro, page 19).
Cet arrêt est conforme à la jurisprudence du Conseil d’Etat, qui, depuis 2009, considère, « au mépris de la directive européenne du 27 janvier 2003 » sur les normes minimales d’accueil des demandeurs d’asile, que ceux d’entre eux qui bénéficient de l’allocation temporaire d’attente (ATA) « n’ont pas besoin, en plus, d’être hébergés, dénonce le GISTI. Comme s’il était possible, avec un pécule aussi minime, de se loger, de s’alimenter, de se vêtir, de se soigner, sans même parler de s’éduquer, de se cultiver ou de se distraire. »
Les organisations jugent, en tout cas, inacceptable que cette décision permette à l’Etat de recourir à des tentes au lieu de créer davantage de places dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA). « Alors qu’en France, ce manque de moyens est chronique, au cours des dernières années, rien n’a été entrepris pour adapter l’offre à la demande », s’irrite le GISTI. En 2009, 47 700 personnes ont sollicité l’asile en France, et selon la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA), elles sont cette année 12 % de plus. Or l’Etat met seulement à leur disposition 20 410 lits en CADA, quand il en faudrait plus du double. « Et ce ne sont pas les 1 000 lits supplémentaires annoncés pour 2011 qui éviteront à des centaines de demandeurs d’asile d’être encore et toujours contraints de survivre à la rue dans une très grande précarité », s’indigne la Ligue des droits de l’Homme. Une situation qui « a pour effet d’empêcher la majorité d’entre eux de mener à bien une procédure qui requiert quiétude et sentiment de sécurité. Cette pénurie […] vise à dissuader les demandeurs d’asile de solliciter la protection de l’Etat », analyse l’organisation.