Saisi par les députés de l’opposition, le Conseil constitutionnel s’est prononcé, le 16 décembre, sur la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2011 adoptée le 25 novembre dernier (1). Il a ainsi validé deux des dispositions critiquées et censuré 19 cavaliers sociaux, c’est-à-dire des articles « ne trouvant pas leur place dans une telle loi ».
La Haute Juridiction a déclaré conforme à la Constitution l’article 9 de la LFSS pour 2011 qui organise la reprise par la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), dans la limite de 68 milliards d’euros, des déficits du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) (2) pour 2009 et 2010, des branches maladie et famille pour 2011 ainsi que de la branche vieillesse et du FSV pour les années 2011 à 2018. L’opposition reprochait, entre autres, à ces dispositions de ne pas prévoir les ressources suffisantes pour permettre que soit respecté le terme fixé pour le remboursement de la dette sociale, en 2025. Des griefs que le Conseil constitutionnel n’a pas retenus dans la mesure où l’article 9 prévoit notamment d’affecter à la CADES le produit de 0,28 point supplémentaire de contribution sociale généralisée, initialement affecté à la caisse nationale des allocations familiales, une part des prélèvements sur les placements et le patrimoine à un taux de 1,3 % ainsi que 2,1 milliards d’euros du FSV entre 2011 et 2024.
Actuellement, l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale prévoit une exonération de cotisations patronales pour les rémunérations des aides à domicile employées au service personnel de certaines personnes âgées, à leur domicile ou chez des membres de leur famille, ou bénéficiaires de prestations d’aide ménagère au titre de l’aide sociale légale ou dans le cadre de conventions conclues entre les associations d’aide à domicile et un organisme de sécurité sociale. La LFSS pour 2011 précise que cette exonération sera, à compter du 1er janvier 2011, applicable aux rémunérations versées en contrepartie des tâches effectuées au « domicile à usage privatif » des personnes âgées ou des personnes handicapées. Les élus de l’opposition dénonçaient le caractère restrictif – et par là discriminant – de cette notion du domicile, qui exclut le placement en institution. Une disposition qui, selon eux, est contraire au principe d’égalité de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789. Mais, pour le Conseil constitutionnel, l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale « tend à favoriser le maintien chez elles de personnes dépendantes ». Et, dans ce cadre, « l’attribution du bénéfice de cette exonération en fonction du caractère privatif du domicile de la personne bénéficiaire de l’aide est en lien direct avec l’objet de cet article », qui, dès lors, « ne méconnaît pas le principe d’égalité devant la loi ».
Au-delà, la Haute Juridiction a censuré une série de dispositions considérant qu’elles n’ont « pas d’effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement ». Sont notamment concernés :
l’article 56 qui précisait que le schéma régional d’organisation des soins devait favoriser le développement des modes de prise en charge alternatifs à l’hospitalisation ;
l’article 67 qui prévoyait l’expérimentation des maisons de naissance ;
l’article 106 qui aménageait le partage du congé d’adoption entre la mère et le père ;
l’article 107 qui restreignait, au bénéfice du département, le montant des allocations familiales que peut percevoir une famille lorsque son enfant est confié au service de l’aide sociale à l’enfance.
En outre, le Conseil constitutionnel a invalidé d’autres dispositions au motif qu’elles n’avaient « pas pour objet d’améliorer l’information et le contrôle du Parlement sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale ». Il s’agit en particulier :
de l’article 69 qui prévoyait que le rapport remis au Parlement sur le bilan des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC) des établissements de santé devait préciser les montants d’aide attribués à ces établissements au titre des obligations légales et réglementaires qui leur incombent ;
de l’article 83 qui disposait qu’un rapport devait être remis au Parlement sur les écarts de charges financières entre les différentes catégories d’établissements et services sociaux et médico-sociaux concernés par la mise en œuvre de tarifs plafonds ou de mécanismes de convergence tarifaire. Un article qui prévoyait aussi la remise d’un rapport sur la procédure d’agrément des conventions collectives dans le secteur social et médico-social.
Enfin, les sages de la rue Montpensier ont écarté l’article 86 qui stipulait que la loi de financement de la sécurité sociale – et non plus un arrêté – aurait à fixer chaque année le montant de la dotation nationale de financement des MIGAC. Ils ont rappelé que seule une loi organique pouvait fixer le contenu de la loi de financement de la sécurité sociale ou de ses annexes.
(2) Ce fonds assure le financement des avantages vieillesse non contributifs relevant de la solidarité nationale.