« Saluons tous ceux qui ont contribué à ce bel ouvrage, si chargé de talents, de rêve et de tendresse. Grâce à eux, les murs de la prison s’ouvrent à la beauté des couleurs et des mots », écrit Robert Badinter en dédicace de ce nouveau recueil de textes rédigés par des détenus de la maison d’arrêt de Colmar lors d’ateliers d’écriture – la suite de Derrière les murs, des êtres humains, paru en septembre 2009 (1). « Permettre à une personne incarcérée et peu familiarisée avec l’écriture, parfois illettrée, de rédiger une lettre, un texte, une poésie, c’est lui permettre de demeurer vivante », assure Marguerite Rodenstein, animatrice bénévole de l’association Espoir. Parmi les textes, quelques-uns sont anonymes, d’autres sont signés à plusieurs mains. Certains détenus parlent d’amour, beaucoup de leurs enfants ou de leur vie d’avant, aucun n’évite de parler du quotidien en prison ni des délits qu’ils ont commis. Avec souvent des notes d’espoir – « Dans les prisons, je vais peut-être passer cinq ans – Mais je tenais néanmoins à dire – Que je ne vais pas en mourir – Car après la prison, une fois la peine purgée – C’est la vraie vie qui va commencer – Et je compte bien en profiter », écrit B.Areski. Le recueil est parsemé de touches de couleurs : les textes sont accompagnés de dessins d’enfants de détenus et de personnels pénitentiaires, mais aussi de réflexions d’élèves de maternelle sur la prison. C’est parfois poignant : « J’ai jamais vu dans la prison, mais il y a des loups et des serpents », souvent drôle : « La prison, on y mange que du pain avec pas de chocolat ! »
Derrière et devant les murs, des mots et des couleurs – Association Espoir – 78a, avenue de la République – 68025 Colmar –
J’ai hâte de sortir d’ici
Mais j’ai peur de demain
Et puise dans toute mon énergie
La force pour un nouveau chemin.
Je regarde, cherche autour de moi,
Broyant sans cesse du noir.
Rien, pas même la perspective de toi
Me fait garder un brin d’espoir.
Voudras-tu encore de moi ?
C’est la grande question que je me pose.
Je voudrais recommencer notre vie à zéro,
Te serrer, t’écraser dans mes bras.
Quel crime ai-je commis,
Qu’est-ce qui m’a pris ce jour-là ?
Une banalité, une folie
Que je paie bien cher hélas !
Où est ma famille, où sont mes amis ?
Pour si peu de choses, face à la vie.
Veux-tu bien me tendre la main
Mettre du soleil dans mon quotidien ?
J’ai perdu toute joie de vivre et tout espoir,
La peur m’envahit et prend le dessus
Je regrette vraiment ce fameux soir
Où je n’ai rien gagné, mais tout perdu.
ANONYME