Le revenu de solidarité active (RSA) serait-il victime d’une mauvaise gouvernance ? Une récente étude du Centre d’études de l’emploi (CEE) (1) revient sur l’évolution du pilotage du revenu minimum d’insertion (RMI) depuis sa création en 1988 jusqu’à l’instauration du RSA en 2008. L’occasion pour ses auteurs de s’interroger sur la place de ce minimum social dans le paysage socio-institutionnel français.
Afin de renforcer le volet « insertion » de la prestation, le pilotage du RMI, partagé entre l’Etat et les départements, a été complètement décentralisé au profit de ces derniers par la loi du 18 décembre 2003. Cette évolution traduit la volonté de l’Etat de passer d’un dispositif assistantiel à un dispositif assurantiel favorisant le retour à l’emploi des allocataires. Mais ce double objectif pourrait bien être au cœur des difficultés soulevées par le dispositif. Si les auteures du rapport – les chercheuses Carole Tuchszirer et Anne Eydoux – rappellent les compétences des conseils généraux en matière d’action sociale, elles se demandent en effet « si le département constitue le “territoire pertinent” pour organiser l’insertion professionnelle des allocataires du RSA », dans la mesure où il n’a pas de réelles compétences en matière d’emploi.
La décentralisation entamée dans les années 1980 par l’Etat a eu pour but de donner de nouvelles compétences aux collectivités territoriales afin d’encourager les initiatives locales en matière d’emploi et de formation professionnelle. Dès sa création, le volet « insertion » du RMI a donc été confié aux conseils généraux plutôt qu’à l’Agence nationale pour l’emploi, devenue aujourd’hui Pôle emploi. Ce choix a abouti à des différences de traitement entre l’ensemble des demandeurs d’emploi et les allocataires du RMI, éloignant un peu plus ces derniers du marché du travail, relève le rapport. Le RSA replace l’emploi au cœur du dispositif d’insertion à travers l’instauration d’un contrat unique d’insertion, la mise en place d’un pacte territorial d’insertion et la désignation d’un référent unique pour accompagner les allocataires et organiser l’intervention de l’ensemble des acteurs économiques et sociaux. Mais, constate l’étude, à défaut de compétences propres des départements en matière d’emploi, l’insertion professionnelle des allocataires du RSA dépend largement des stratégies adoptées par les conseils généraux en la matière et donc de leur capacité à tisser des partenariats locaux avec les services de Pôle emploi, mais aussi avec d’autres intermédiaires comme les missions locales, les associations, les entreprises de travail temporaire ou encore les opérateurs privés de placement.
Au final, le Centre d’études de l’emploi souligne que, en période de récession économique, la politique d’incitation à la reprise d’activité sous-jacente dans le RSA n’est peut-être pas suffisante, et les auteures renvoient le gouvernement à sa mission de création et de stimulation de l’emploi, notamment au moyen des emplois aidés.
(1) Du RMI au RSA : les inflexions de la solidarité et de la gouvernance des politiques d’insertion – Novembre 2010 – Disponible sur