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La loi pénitentiaire

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Nous achevons la présentation de la loi du 24 novembre 2009 avec les aménagements apportés aux régimes de détention, dont l’objectif est de donner un sens au parcours carcéral et d’assurer de meilleures conditions d’incarcération.
III. LES AMÉNAGEMENTS APPORTÉS AUX RÉGIMES DE DÉTENTION

Si la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 a réaffirmé le principe de l’encellulement individuel, elle l’a malgré tout assorti d’un certain nombre de dérogations, notamment pour les personnes placées en détention provisoire et en maisons d’arrêt. Par ailleurs, le texte a assoupli les conditions de maintien des condamnés dans les maisons d’arrêt, étendu le parcours d’exécution de la peine à tous les condamnés et renforcé l’individualisation du régime de détention. Enfin, du côté des règles de bonne conduite, la loi a élevé au rang législatif le régime disciplinaire des détenus et le placement à l’isolement administratif.

A. LA MODIFICATION DES RÈGLES SUR L’ENCELLULEMENT INDIVIDUEL

1. POUR LES PERSONNES PLACÉES EN DÉTENTION PROVISOIRE

a. La réaffirmation du principe (art. 87, II de la loi)

Jusqu’à la loi pénitentiaire, il était prévu que, sauf exceptions limitativement énumérées, les person­nes mises en examen, les prévenus et les accusés (1) placés en détention provisoire étaient soumis au régime de l’emprisonnement individuel de jour et de nuit. Or, selon le gouvernement, « il n’est en rien démontré que ce mode d’hébergement soit conforme à la demande réelle même des détenus et à leur intérêt. A l’inverse, il est constaté que beaucoup de détenus ne souhaitent pas être seuls en cellule, notamment dans les maisons d’arrêt où les périodes d’incarcération sont relativement courtes. » En outre, poursuit-il, « l’analyse des expériences [européennes] sur ce point conduit au constat que seule la France dispose d’une obligation légale imposant l’encellulement individuel des prévenus ». Pour conclure que « l’encellulement individuel pour tous ne doit plus être considéré comme l’objectif à atteindre absolument » (exposé des motifs).

Aussi la loi pénitentiaire réaffirme-t-elle que « les personnes mises en examen, prévenus et accusés soumis à la détention provisoire sont placés en cellule individuelle ». Toutefois, ajoute-t-elle, il peut être dérogé à ce principe dans un certain nombre de cas (code de procédure pénale [CPP], art. 716 al. 1 à 4 modifiés).

b. Les dérogations au principe

1) Le cas général (art. 87, II)

Comme auparavant, il peut être dérogé au principe de l’encellulement individuel pour les intéressés :

 s’ils en font la demande ;

 si leur personnalité justifie, dans leur intérêt, qu’ils ne soient pas laissés seuls ;

 s’ils ont été autorisés à travailler ou à suivre une formation professionnelle ou scolaire et que les nécessités d’organisation l’imposent.

La loi pénitentiaire précise que, lorsque les intéressés sont placés en cellules collectives, les cellules doivent être adaptées au nombre des personnes détenues qui y sont hébergées et que ces dernières doivent être aptes à cohabiter – « ce qu’il convient d’apprécier a priori », recommande le ministère de la Justice (note du 25 novembre 2009). En outre, leur sécurité et leur dignité doivent être assurées (CPP, art. 716, al. 5 modifié). D’où, selon Jean-Paul Garraud, rapporteur (UMP) de la loi à l’Assemblée nationale, l’« importance de l’évaluation initiale effectuée à l’entrée de la détention : il est nécessaire pour l’administration pénitentiaire de connaître la vulnérabilité de certains détenus, leur éventuel risque suicidaire, tout comme il est nécessaire de connaître leur éventuelle dangerosité avant que ne soit prise la décision d’affectation en cellule » (Rap. A.N. n° 1899, Garraud, septembre 2009, page 359).

Lors des débats à l’Assemblée nationale, la garde des Sceaux a rappelé que « les centres de détention et les maisons centrales respectent déjà, pour les détenus condamnés, le principe de l’encellulement individuel. Il n’y a aucun problème dans ces établissements, qui sont souvent des établissements de longue durée. Le véritable problème est dans les maisons d’arrêt, où coexistent des prévenus et des personnes déjà condamnées. » L’encellulement individuel est certes indispensable, estime Michèle Alliot-Marie, mais sa mise en place immédiate semble irréaliste. En effet, rappelle-t-elle, « sur les 63 000 détenus environ hébergés, 45 500 sont en maison d’arrêt : 39 500 condamnés et 6 000 prévenus. Si, comme c’est prévu, l’on met en priorité les prévenus en cellule individuelle, la pression sera insupportable pour les condamnés qui sont là. » Aussi sa priorité est-elle de construire de nouveaux établissements pénitentiaires (2). Ajoutant que, « à partir de 2012, nous n’aurons peut-être pas que des cellules individuelles, mais nous pourrons très largement répondre aux besoins, d’autant que, dans les nouveaux programmes de construction, il y a essentiellement des cellules individuelles ou des cellules pour 2 personnes, jamais plus » (3) (J.O.A.N. n° 101 [C.R.] du 18-09-09, page 7290).

2) La dérogation spécifique aux maisons d’arrêt (art. 100)

Prenant en compte la situation de surpopulation carcérale dans les maisons d’arrêt (4), la loi pénitentiaire prévoit qu’il est possible de déroger au principe de l’encellulement individuel pendant 5 ans si la distribution intérieure des locaux ou le nombre de personnes détenues présentes ne le permet pas. Un délai qui court depuis le 25 novembre 2009 (5). Toutefois, la personne condamnée ou, sous réserve de l’accord du magistrat chargé de l’information judiciaire, la personne prévenue peut demander son transfert dans la maison d’arrêt la plus proche permettant un placement en cellule individuelle.

Un tel moratoire avait déjà été décidé en 2003 et a expiré le 12 juin 2008. Pour justifier ce nouveau report de 5 ans, le gouvernement affirme, dans l’exposé des motifs de la loi, que, malgré les « efforts considérables […] développés depuis 2002 grâce au programme de construction de 13 200 places qui permettra d’atteindre en 2012 une capacité de 63 000 places », l’administration pénitentiaire « n’a pas la capacité opérationnelle suffisante pour permettre de respecter » le droit à l’encellulement individuel.

Rappelons que, le jour où le premier moratoire expirait, paraissait au Journal officiel un décret fixant les modalités de mise en œuvre du droit à l’encellulement individuel des personnes en détention provisoire dans le cas où la configuration de la maison d’arrêt où elles se trouvent ne le permet pas (6). Selon les indications fournies au rapporteur (UMP) de la loi au Sénat, l’administration pénitentiaire a été saisie, depuis la parution de ce décret, de 370 requêtes, dont 180 seulement ont été satisfaites. D’après les témoignages qu’il a recueillis, « le faible nombre de requêtes s’explique non pas par le manque d’attrait des détenus pour l’encellulement individuel, mais bien davantage par les conditions dissuasives posées par le décret à l’obtention d’une cellule individuelle et le risque d’éloignement de l’environnement familial. » Malgré tout, Jean-René Lecerf estime « néssaire de maintenir pendant la durée du moratoire les mécanismes prévus par le décret du 10 juin 2008, si restreints qu’ils puissent paraître » (Rap. Sén. n° 143, 2008-2009, Lecerf, page 226).

2. POUR LES CONDAMNÉS (ART. 90)

Sans changement, les condamnés sont soumis, dans les maisons d’arrêt, à l’emprisonnement individuel de jour et de nuit et, dans les établissements pour peines, à l’isolement de nuit seulement, après avoir subi éventuellement une période d’observation en cellule. Avant la loi pénitentiaire, il ne pouvait être dérogé au principe de l’encellulement individuel des condamnés qu’en raison de la distribution intérieure des locaux de détention, de leur encombrement temporaire ou des nécessités d’organisation du travail. La loi du 24 novembre 2009 supprime ces dérogations et, par cohésion avec l’article 716 du code de procédure pénale visant l’encellulement individuel des prévenus (voir ci-dessus), permet désormais de déroger à l’encellulement individuel des condamnés uniquement lorsque les intéressés en font la demande ou si leur personnalité justifie que, dans leur intérêt, ils ne soient pas laissés seuls (CPP, art. 717-2, al. 2 modifié). « Le motif de l’organisation intérieure des établissements n’étant plus un motif légal de dérogation, les établissements pour peines comportant des cellules doubles ou collectives devront être attentifs à être en capacité de motiver la dérogation éventuelle au principe d’encellulement individuel sur le fondement des exceptions légalement admissibles », souligne la chancellerie (note du 25 novembre 2009).

Pour le gouvernement, il était nécessaire de « laisser à un détenu la possibilité de demander à partager sa cellule avec un autre ou, pour l’administration pénitentiaire, d’en décider dans son intérêt, notamment quand il faut prévenir les risques suicidaires. Cette souplesse qui [existait] déjà pour les prévenus, [devait] être étendue à l’ensemble des condamnés incarcérés en maison d’arrêt ou en établissement pour peines, estime-t-il. Une telle modification [permet] en outre de satisfaire aux règles pénitentiaires européennes » (exposé des motifs).

B. L’ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS DE MAINTIEN DES CONDAMNÉS EN MAISON D’ARRÊT (ART. 88)

Par principe, les condamnés purgent leur peine dans un établissement pour peines (CPP, art. 717, al. 1). Toutefois, ceux dont la peine n’excède pas 2 ans – et non plus 1 an – peuvent désormais, à titre exceptionnel, être maintenus en maison d’arrêt et incarcérés, dans ce cas, dans un quartier distinct lorsque les conditions tenant à la préparation de leur libération, leur situation familiale ou leur personnalité le justifient. Peuvent également, dans les mêmes conditions, être affectés, à titre exceptionnel, en maison d’arrêt les condamnés auxquels il reste à subir une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à 1 an.

En outre, la loi permet désormais à tout condamné détenu en maison d’arrêt à qui il reste à subir une peine d’une durée supérieure à 2 ans de demander son transfèrement dans un établissement pour peines dans un délai de 9 mois à compter du jour où sa condamnation est devenue définitive (7). Cependant, il peut être maintenu en maison d’arrêt s’il bénéficie d’un aménagement de peine ou est susceptible d’en bénéficier rapidement (CPP, art. 717, al. 2 modifié).

Selon l’exposé des motifs, deux raisons majeures ont commandé cette mesure. Tout d’abord, elle devrait permettre « une meilleure prise en compte des souhaits des détenus : certains condamnés souhaitent être maintenus à proximité de leur résidence afin de favoriser le maintien des liens familiaux, lequel est parfois compromis par l’éloignement vers un établissement pour peines, alors même que la durée d’incarcération restant à subir reste réduite ». En­suite, le gouvernement met en avant « le développement des aménagements de peine pour les courtes peines d’emprisonnement […] : la rupture occasionnée par un changement d’établissement est souvent la cause d’un retard dans l’élaboration et la concrétisation des projets de sortie. Par conséquent, mieux vaut favoriser le maintien en maison d’arrêt d’un condamné engagé dans un projet d’aménagement de peine que de compromettre un tel projet favorable à sa réinsertion en l’affectant dans un autre établissement pénitentiaire », explique-t-il. Près de 2 600 condamnés qui exécutent une peine ou un reliquat de peine compris entre 1 et 2 ans sont concernés, estime le ministère de la Justice.

C. L’EXTENSION DU PARCOURS D’EXÉCUTION DE LA PEINE À TOUS LES CONDAMNÉS (ART. 89, I, 1°)

La loi pénitentiaire prévoit que, dès leur accueil dans l’établissement pénitentiaire et à l’issue d’une période d’observation pluridisciplinaire (8), les personnes détenues doivent désormais faire l’objet d’un bilan de personnalité. Sur cette base, le chef de l’établissement pénitentiaire et le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation élaborent un parcours d’exécution de la peine pour et avec les condamnés dès que leur condamnation est devenue définitive. Le projet initial de ce parcours et ses modifications ultérieures sont portés à la connaissance du juge de l’application des peines (CPP, art. 717-1, al. 1 nouveau). Le texte étend ainsi à tous les condamnés le bénéfice de ce parcours que la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental avait instauré uniquement au profit des condamnés à une peine de réclusion criminelle d’au moins 15 ans pour les crimes d’assassinat ou de meurtre, de torture ou actes de barbarie, de viol, d’enlèvement ou de séquestration commis sur une victime mineure.

Selon l’exposé des motifs, « ce dispositif permet de suivre, avec le détenu, l’évolution de son parcours carcéral et les efforts réalisés pour donner un sens à la peine et, par voie de conséquence, préparer une sortie sans récidive ». Et, à chaque détenu, « de se donner des objectifs au cours de l’exécution de sa peine (suivre une formation, augmenter les efforts d’indemnisation de la victime, se soigner, etc.) et de faire un bilan, à échéance régulière (annuelle) sur le respect, ou non, de ces objectifs ».

D. LE RENFORCEMENT DE L’INDIVIDUALISATION DU RÉGIME DE DÉTENTION (ART. 89, I, 2°)

La loi pénitentiaire consacre la mise en place de régimes de détention différenciés pour les condamnés, jusqu’à présent expérimentés dans une quarantaine de centres de détention. « Les détenus sont loin de constituer une population homogène. De ce fait, il est nécessaire et logique que certains établissements développent des programmes comprenant des dispositifs adaptés aux problématiques spécifiques de certains détenus, notamment les délinquants sexuels », a expliqué Rachida Dati, alors ministre de la Justice (J.O. Sén. [C.R.] n° 29 du 6 mars 2009, page 2573).

Sans changement, la répartition des condamnés dans les établissements pour peines s’effectue compte tenu de leur catégorie pénale, de leur âge, de leur état de santé et de leur personnalité. Quant à leur régime de détention, précise la loi pénitentiaire, il doit être déterminé en fonction de leur personnalité, de leur santé, de leur dangerosité et de leurs efforts en matière de réinsertion sociale (CPP, art. 717-1, al. 2 modifié).

L’individualisation des régimes de détention des condamnés est apparu comme une nécessité, ont expliqué les députés, car, d’une part, « il n’ [était] pas équitable d’appliquer à l’ensemble des détenus des règles de sûreté qui ne sont justifiées que pour une minorité d’entre eux et, d’autre part, des régimes différenciés peuvent constituer une incitation pour le détenu à s’engager dans un parcours de réinsertion ». Toutefois, d’autres personnes auditionnées par le rapporteur à l’Assemblée nationale – comme les représentants du Conseil national des barreaux ou du Syndicat de la magistrature – se sont déclarées opposées à la consécration législative des régimes différenciés, qu’elles considèrent comme des « “sanctions disciplinaires déguisées” qui marquent le détenu tout au long de la détention, le privent de certains droits et de l’accès à certaines activités ». Sur ce dernier point, Rachida Dati a assuré, lors des débats au Sénat, que l’accès aux activités n’était absolument pas remis en cause. « Seules les conditions de cet accès sont modulables selon que le détenu nécessite ou non d’être accompagné à ­l’intérieur du lieu de détention par un agent de l’administration pénitentiaire », a-t-elle indiqué (J.O. Sén. [C.R.] n° 29 du 6 mars 2009, page 2573).

D’ailleurs, la loi énonce que le placement d’une personne détenue sous un régime plus sévère ne saurait porter atteinte au respect de sa dignité et de ses droits, précise la loi pénitentiaire. Ralliant la position de l’ancienne garde des Sceaux, les députés ont précisé que « la différenciation n’autorise [en effet] qu’un aménagement des modalités concrètes de prise en charge en fonction du degré d’autonomie qu’il est possible d’accorder au détenu, qu’une modulation de l’accès aux droits prévus par [la loi], mais n’autorise nullement que les détenus soumis au régime le plus rigoureux en soient privés » (Rap. A.N. n° 1899, Garraud, septembre 2009, page 368).

Au final, explique le gouvernement dans l’exposé des motifs, le principe de l’individualisation du régime de détention « se traduira dans le choix de l’établissement pour peines d’affectation entre 2 catégories : les centres de détention, orientés à titre principal vers la réinsertion, et les maisons centrales, essentiellement orientées vers la sécurité. Le choix de l’établissement pénitentiaire d’affectation ne dépendra pas uniquement d’un quantum de peine à exécuter car ce critère n’apparaît pas pertinent. Un même quantum de peine peut, en effet, avoir été prononcé contre des condamnés aux personnalités et niveaux de dangerosité très différents. L’individualisation du régime de détention pourra également se décliner au sein des établissements pénitentiaires par la mise en place de régimes différenciés. [Jusqu’à la loi pénitentiaire], la majorité des établissements pénitentiaires [connaissait] un régime de détention unique. » Cette individualisation du régime de détention met en outre la législation française en conformité avec la règle pénitentiaire européenne n° 51-4, aux termes de laquelle chaque détenu doit être soumis au niveau de sécurité correspondant à son profil.

E. L’ÉLÉVATION AU RANG LÉGISLATIF DU RÉGIME DISCIPLINAIRE DES DÉTENUS (ART. 91)

En raison de son caractère coercitif, le régime disciplinaire des détenus, jusqu’à présent régi par des dispositions réglementaires, s’est vu doter d’une base législative. La loi pénitentiaire énumère ses principes fondamentaux, applicables aux personnes placées en détention provisoire ou exécutant une peine privative de liberté, tout en renvoyant à un décret le soin d’en fixer les modalités de mise en œuvre (CPP, art. 726, al. 1 modifié). Ce décret devra notamment préciser (CPP, art. 726, al. 3 à 8 nouveaux) :

 le contenu des fautes disciplinaires, classées selon leur nature et leur gravité. Sur ce point, le Conseil constitutionnel a mis en garde le gouvernement en ce que le décret ne devra « pas définir des sanctions portant atteinte aux droits et libertés dont les [condamnés] bénéficient dans les limites inhérentes aux contraintes de la détention » ;

 les différentes sanctions disciplinaires encourues selon le degré de gravité des fautes commises. Etant précisé que le placement en cellule disciplinaire et le confinement en cellule individuelle ordinaire ne pourront excéder 20 jours (au lieu de 45), cette durée pouvant toutefois être portée à 30 jours pour tout acte de violence physique contre les personnes. Selon le gouvernement, « cette modification trouve sa justification dans le souci de garantir le respect et la dignité des personnes détenues et d’harmoniser nos pratiques avec les législations européennes et les règles énoncées par le Conseil de l’Europe » ;

 la composition de la commission disciplinaire, qui doit comprendre au moins un membre extérieur à l’administration pénitentiaire ;

 la procédure disciplinaire applicable, au cours de laquelle la personne pourra être assistée par un avocat choisi ou commis d’office, en bénéficiant le cas échéant de l’aide de l’Etat pour l’intervention de cet auxiliaire de justice ;

 les conditions dans lesquelles la personne placée en cellule disciplinaire ou en confinement dans une cellule individuelle exercera son droit à un parloir hebdomadaire ;

 les conditions dans lesquelles le maintien d’une mesure de placement en cellule disciplinaire ou en confinement dans une cellule individuelle est incompatible avec l’état de santé de la personne détenue.

S’agissant du placement en cellule disciplinaire des détenus mineurs de plus de 16 ans, il devra être exceptionnel et limité à 7 jours au maximum (contre 15 jours avant), indique par ailleurs la loi.

En cas d’urgence, les détenus majeurs et les détenus mineurs de plus de 16 ans pourront faire l’objet, à titre préventif, d’un placement en cellule disciplinaire ou d’un confinement en cellule individuelle qui ne pourra excéder 2 jours ouvrables (CPP, art. 726, al. 9 et 10 nouveaux).

Si la personne placée en quartier disciplinaire ou en confinement relève une atteinte grave et manifestement illégale à ses droits fondamentaux, elle pourra saisir en urgence le juge des référés, qui se prononcera alors dans un délai de 48 heures (CPP, art. 726, al. 11 nouveau). Une disposition introduite sur la proposition du sénateur (PS) de la Gironde, Alain Anziani. Rachida Dati, défavorable à l’adoption de cette mesure, a précisé lors des débats au Sénat que, pour savoir si la condition d’urgence était remplie, « le juge [devra procéder] à une mise en balance entre l’urgence alléguée par le détenu et l’urgence attachée à l’exécution de la décision de placement en quartier disciplinaire » (J.O. Sén. [C.R.] n° 29 du 6 mars 2009, page 2585).

F. LE PLACEMENT À L’ISOLEMENT ADMINISTRATIF

1. POUR DES RAISONS DE PROTÉCTION OU DE SÉCURITÉ (ART. 92)

Avant la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, le régime de l’isolement administratif (9) – qui n’est pas une mesure disciplinaire – était entièrement déterminé par voie réglementaire. Mais, compte tenu des contraintes qu’il comporte et d’une récente jurisprudence du Conseil d’Etat en la matière (10), les parlementaires ont jugé bon qu’il soit défini par voie législative.

Sans changement, tout détenu majeur pourra être placé par l’autorité administrative à l’isolement par mesure de protection ou de sécurité soit à sa demande, soit d’office. La durée maximale de cet isolement reste fixée à 3 mois, renouvelable, après un débat contradictoire au cours duquel la personne concernée, qui peut être assistée de son avocat, présente ses observations orales ou écrites. L’isolement ne pourra être prolongé au-delà de 1 an qu’après avis de l’autorité judiciaire. En tout état de cause, ce placement à l’isolement ne doit pas porter atteinte au respect de la dignité et des droits de l’intéressé, sous réserve des aménagements qu’impose la sécurité. Lorsqu’une personne détenue est placée à l’isolement, elle peut saisir le juge des référés en urgence si elle estime que cette mesure porte un préjudice grave à ses droits fondamentaux.

Un décret doit encore déterminer les conditions d’application de cette disposition (CPP, art. 726-1 nouveau).

2. POUR DES MOTIFS TENANT À L’INSTRUCTION (ART. 93, V)

La loi prévoit également que le juge d’instruction ou le juge des libertés et de la détention pourra prescrire, par ordonnance motivée, que la personne ­placée en détention soit soumise à l’isolement afin de la séparer des autres condamnés si cette mesure est indispensable aux nécessités de l’information judiciaire. La durée de la mise à l’isolement ne pourra excéder celle du mandat de dépôt et pourra être renouvelée à chaque prolongation de la détention. A noter : la décision du juge d’instruction pourra faire l’objet d’un recours devant le président de la chambre de l’instruction.

Le placement à l’isolement ne doit pas affecter le ­respect de la dignité de la personne détenue ou ses droits fondamentaux, sous réserve des aménagements qu’impose la sécurité.

Un décret doit préciser les modalités d’application de cette mesure (CPP, art. 145-4-1 nouveau).

PLAN DU DOSSIER

DANS NOTRE NUMERO 2679 DU 22 OCTOBRE 2010, PAGE 47

I. Les mesures relatives aux aménagements de peine

DANS NOTRE NUMERO 2681 DU 5 NOVEMBRE 2010, PAGE 37

II. Les dispositions concernant les alternatives à la détention

Dans ce numéro

III. Les aménagements apportés aux régimes de détention

A. La modification des règles sur l’encellulement individuel

B. L’assouplissement des conditions de maintien des condamnés en maison d’arrêt

C. L’extension du parcours d’exécution de la peine à tous les condamnés

D. Le renforcement de l’individualisation du régime de détention

E. L’élévation au rang législatif du régime disciplinaire des détenus

F. Le placement à l’isolement administratif

EXÉCUTION D’UNE PEINE : DE NOUVELLES PRÉROGATIVES POUR LES FORCES DE L’ORDRE (ART. 95, II DE LA LOI)

Si l’article 134 du code de procédure pénale autorise expressément les agents des forces de l’ordre à entrer chez les particuliers, entre 6 heures et 21 heures, dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’amener, d’arrêt ou de recherche, il n’existait pas, jusqu’à la loi pénitentiaire, de disposition similaire s’agissant de l’exécution des jugements ou des arrêts prononçant une peine d’emprisonnement ou de réclusion, explique Jean-René Lecerf, rapporteur de la loi au Sénat (Rap. Sén. n° 143, 2008-2009, Lecerf, page 221). Ce vide juridique est désormais comblé. En effet, la loi pénitentiaire permet au procureur de la République et au procureur général d’autoriser les agents de la force publique à pénétrer au domicile de la personne condamnée afin de se saisir de celle-ci. Comme dans les autres cas, les agents ne peuvent toutefois s’introduire au domicile de la personne avant 6 heures et après 21 heures (code de procédure pénale, art. 716-5, al. 1 nouveau).

L’EXÉCUTION DE CERTAINS AMÉNAGEMENTS DE PEINES

EFFECTUER UNE PÉRIODE DE SÛRETÉ SOUS SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE (ART. 80 DE LA LOI)

En cas de condamnation assortie d’une période de sûreté d’une durée supérieure à 15 ans, aucune libération conditionnelle ne peut être accordée avant que le condamné ait été placé pendant une période de 1 à 3 ans sous le régime de la semi-liberté ou – ce qui est nouveau – du placement sous surveillance électronique. La semi-liberté ou le placement sous surveillance électronique est alors ordonné par le tribunal de l’application des peines, sauf si la peine restant à subir par le condamné est inférieure à 3 ans (code de procédure pénale [CPP], art. 720-5 modifié).

TRAVAILLER EN DEHORS DE LA PRISON EN CAS DE PLACEMENT À L’EXTÉRIEUR (ART. 81, I)

Jusqu’à présent, le condamné bénéficiant d’un placement à l’extérieur pouvait, sous le contrôle de l’administration, exercer des activités en dehors de l’établissement pénitentiaire. La loi pénitentiaire parle, elle, d’une obligation : le condamné est aujourd’hui « astreint » à exercer des activités en dehors de la prison.

Un décret déterminera les conditions dans lesquelles cette mesure est accordée et appliquée (CPP, art. 723 modifié).

TEXTES APPLICABLES

 Loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 et décision du Conseil constitutionnel n° 2009-593 DC du 19 décembre 2009, J.O. du 25-11-09.

 Articles D. 32-4 à D. 32-31 nouveaux du code de procédure pénale (issus du décret n° 2010-355 du 1er avril 2010, J.O. du 3-04-10).

 Articles R. 131-13, R. 131-16, R. 131-17 et R. 131-19 modifiés du code pénal (issus du décret n° 2010-671 du 18 juin 2010, J.O. du 20-06-10).

 Note du 25 novembre 2009, non publiée.

 Circulaire Crim-09-15/E8 du 1er décembre 2009, B.O.M.J.L. n° 2009-06 du 31-12-09.

 Circulaire Crim-10-9/E8 du 18 mai 2010, B.O.M.J.L. n° 2010-03 du 31-05-10.

 Circulaire NOR : JUSD1019268C du 19 juillet 2010, B.O.M.J.L. n° 2010-05 du 30-07-10.

Notes

(1) Le mis en examen est la personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants qui rendent vraisemblable qu’elle ait pu participer à un crime ou à un délit. Le prévenu est la personne poursuivie pour contravention ou délit, qui n’a pas encore été jugée ou dont la condamnation n’est pas définitive. L’accusé est la personne mise en examen pour un crime et renvoyée devant une cour d’assises pour y être jugée.

(2) Sur le nouveau plan de modernisation des prisons, voir ASH n° 2670 du 20-08-10, p. 14.

(3) Lors des débats au Sénat, Rachida Dati, alors garde des Sceaux, avait assuré que, en 2012, « 64 000 places seront réparties entre 45 500 cellules individuelles et 8 500 cellules collectives » (J.O. Sén. [C.R.] n° 29 du 6-03-09, page 2563).

(4) En principe, ces établissements accueillent des prévenus, des condamnés dont la durée de la peine restant à subir est inférieure à 1 an et ceux en attente d’affectation dans un établissement pour peine. En pratique, ces derniers effectuent bien souvent la totalité de leur peine dans les maisons d’arrêt, faute de place ailleurs.

(5) Date de publication de la loi pénitentiaire au Journal officiel.

(6) Décret n° 2008-546 du 10 juin 2008, J.O. du 12-06-08 – Voir ASH n° 2563 du 20-06-08, p. 15.

(7) Un délai qui n’a pas été fixé au hasard puisque, selon le rapporteur de la loi à l’Assemblée nationale, les délais moyens de transfert, comprenant à la fois le délai de traitement des dossiers et celui du transfert lui-même, sont de 8,4 mois sur le plan régional et de 9,7 mois sur le plan national, ces moyennes cachant toutefois de fortes disparités (de 2 à 29 mois) (Rap. A.N. n° 1899, Garraud, septembre 2009, page 363).

(8) C’est-à-dire « associant personnels de surveillance, conseillers d’insertion et de probation, enseignants, médecins et psychologues », ont suggéré les sénateurs (Rap. Sén. n° 143, 2008-2009, Lecerf, pages 206-207).

(9) D’après les informations transmises par la chancellerie, le nombre de placements à l’isolement est passé de 602 au 1er janvier 2005 à 482 au 1er juin 2009, la grande majorité des détenus y étant placés à leur demande.

(10) En effet, dans un arrêt du 31 octobre 2008, le Conseil d’Etat a partiellement annulé le décret du 21 mars 2006 relatif à l’isolement des détenus. Il a, entre autres, considéré que le pouvoir réglementaire ne pouvait lui-même prévoir l’application du régime de l’isolement tant que le législateur n’était pas intervenu préalablement pour organiser, dans son champ de compétence, « une voie de recours effectif, conformément à l’article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme » (Rap. A.N. n° 1899, Garraud, septembre 2009, pages 382 et 383).

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