La décision constitue un revers pour le gouvernement. Le Conseil constitutionnel a censuré, le 4 novembre, la loi visant à autoriser l’approbation du très controversé accord franco-roumain du 1er février 2007 qui permettait de faciliter le renvoi dans leur pays d’origine de mineurs isolés roumains présents sur le territoire français (sur les réactions associatives, voir ce numéro, page 22). Conséquence de cette censure : l’accord de 2007 est caduc pour la France comme pour la Roumanie.
La loi avait été adoptée en première lecture le 6 mai par le Sénat puis, définitivement, le 7 octobre par l’Assemblée nationale (1). L’accord pour lequel elle donnait son feu vert était censé succéder à un premier texte signé en 2002 et mis en œuvre entre 2003 et 2006. Sa ratification avait été retardée en raison notamment des vives réactions qu’il avait suscitées lors de sa signature. Conclu pour trois ans, il avait principalement pour objet de faciliter les échanges d’informations sur les mineurs isolés roumains se trouvant en France ainsi que sur l’organisation de leur retour en Roumanie, si leur protection pouvait y être assurée « dans de bonnes conditions ». La disposition qui cristallisait toutes les critiques concernait précisément la réorganisation de la procédure pouvant conduire au renvoi d’un mineur isolé dans son pays, et en particulier la question de l’autorité compétente pour autoriser un mineur à quitter le territoire français. Cette prérogative appartient aujourd’hui uniquement au juge des enfants. L’accord de 2007 l’étendait au parquet des mineurs et prévoyait que, s’il était saisi, ce dernier pouvait, sans avoir à saisir le juge des enfants et dès réception de la demande roumaine de raccompagnement, la mettre lui-même à exécution s’il estimait que toutes les garanties étaient réunies pour assurer la protection du mineur.
Pour les députés socialistes qui ont saisi le Conseil constitutionnel, l’accord avait, ce faisant, institué un régime d’exception pour les seuls mineurs roumains en permettant de contourner le juge des enfants pour éviter toute procédure contradictoire. Les sages ont simplement relevé, pour leur part, que, lorsque la mesure de raccompagnement était prise par le parquet, aucune voie de recours ne permettait de la contester. Ce qui méconnaît le droit du mineur et de toute personne intéressée à exercer un recours juridictionnel effectif garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789. Dans ces conditions, la Haute Juridiction a jugé que la loi autorisant l’approbation du texte controversé méconnaissait la Constitution.
Le gouvernement n’aura pas tardé à réagir. Le jour même, François Fillon a, dans un communiqué, indiqué qu’il prenait acte de cette décision et a annoncé que les autorités françaises prendront « sans tarder » l’attache de leurs homologues roumains « afin de compléter la procédure prévue par cet accord, de manière à assurer sa pleine conformité avec la Constitution ». « Le gouvernement est pleinement déterminé à présenter au Parlement, dans les plus brefs délais, un projet d’accord révisé », a insisté le Premier ministre, assurant vouloir avant tout « mettre en place, dans le prolongement de la coopération bilatérale engagée depuis 2002, un dispositif efficace de protection des mineurs isolés de nationalité roumaine présents sur le territoire français, exposés à des risques d’abus ou d’exploitation » et « renforcer la coopération judiciaire avec la Roumanie en matière de lutte contre la délinquance itinérante et les réseaux d’exploitation des mineurs ».