Le Conseil d’Etat a rejeté, le 21 octobre, le recours en annulation formé par le Groupe d’information et de soutien des immigrés, l’association Imaginons un réseau Internet solidaire et la Ligue des droits de l’Homme contre le décret du 26 octobre 2009 portant création du fichier « OSCAR » (1), base de données qui permet le fichage de tous les étrangers bénéficiaires d’une aide au retour (voir les réactions associatives dans ce numéro, page25).
Dans le détail, OSCAR contient non seulement tout un ensemble de données à caractère personnel sur les bénéficiaires de l’aide – nom, prénom, date et lieu de naissance, numéro national d’identification dans le système informatisé de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France, coordonnées en France et dans le pays de retour, etc. – mais aussi, depuis le 1er octobre, les images numérisées des empreintes de leurs dix doigts ainsi que celles des empreintes digitales de leurs enfants mineurs âgés d’au moins 12 ans. L’idée, avec ce fichier, est de « permettre de détecter ceux qui effectuent des allers et retours successifs en France en cherchant à bénéficier de l’aide au retour à plusieurs reprises », avait expliqué Eric Besson en août devant la presse (2). Autres finalités affichées : permettre le suivi administratif, budgétaire et comptable des procédures d’aide au retour et établir des statistiques relatives à ces procédures et à leur exécution.
Les associations contestaient notamment la collecte, dans ce fichier, de données biométriques tant pour le bénéficiaire de l’aide au retour que pour ses enfants dès l’âge de 12 ans. Des informations à leurs yeux ni pertinentes ni adéquates au regard des finalités poursuivies par le traitement. Elles critiquaient également la durée excessive de conservation des données collectées.
Mais les sages auront donc rejeté l’ensemble des griefs des requérants et en premier lieu ceux portant sur les données collectées. Ainsi, pour commencer, la collecte des données biométriques des ressortissants de l’Union européenne (UE) ayant bénéficié d’une aide au retour ne porte à leurs yeux, par elle-même, aucune atteinte à leur droit de circuler librement au sein de l’UE. La Haute Juridiction a par ailleurs estimé que « la photographie et les empreintes digitales des enfants âgés de plus de 12 ans au titre desquels le bénéficiaire a reçu une aide, qui permettent aux agents de l’Office français de l’immigration et de l’intégration [OFII] de s’assurer que d’autres personnes ne sollicitent pas une aide avec des enfants pour lesquels elle a déjà été accordée, constituent des données pertinentes et adéquates ». Elle n’a, au passage, rien trouvé à redire à la limite d’âge retenue pour collecter ces données, qui « ne permet en tout état de cause par elle-même aucun rapprochement ou interconnexion avec d’autres traitements ayant retenu la même limite ».
Autres données pertinentes au regard de la finalité du traitement, selon les sages : les coordonnées du bénéficiaire dans le pays de retour. En effet, « l’aide au retour peut comporter, selon les cas, un versement échelonné pour partie dans [ce pays], ainsi qu’un accompagnement de l’étranger », également dans ce pays.
Le Conseil d’Etat a considéré, de la même façon, la pertinence et l’adéquation aux finalités du traitement de l’enregistrement au sein d’OSCAR du numéro national d’identification utilisé dans le système informatisé de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France. En effet, a-t-il notamment justifié, ce numéro « est nécessaire pour permettre aux agents de l’OFII de connaître la situation juridique du demandeur de l’aide au regard des règles d’entrée et de séjour », élément souvent pris en considération pour l’octroi de l’aide. En outre, ce numéro permet de « limiter le risque d’erreurs liées aux homonymies ».
Enfin, les critiques des associations visant la durée de conservation des données – cinq ans à compter de la date de la décision de l’OFII lorsque l’aide est accordée – n’ont pas davantage trouvé grâce aux yeux des sages, qui ont relevé qu’elle n’excède pas celle nécessaire pour permettre de déceler une nouvelle demande présentée par une personne ayant déjà bénéficié de cette aide.
(1) Acronyme d’« outil de statistique et de contrôle de l’aide au retour ».