Les réactions indignées se multiplient après l’adoption par les députés, le 5 octobre, d’une disposition du projet de loi sur l’immigration, l’intégration et la nationalité, qui doit encore être examiné par les sénateurs, visant à restreindre l’octroi des titres de séjour pour raison médicale. Depuis la loi du 11 mai 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile, « une carte de séjour temporaire est délivrée à tout étranger résidant en France, dont la gravité de l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve qu’il ne puisse bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine ». En avril 2007, le Conseil d’Etat avait rappelé qu’il appartient à l’administration de vérifier l’effectivité de l’accès au traitement.
Dans le texte issu de la commission des lois de l’Assemblée nationale, un amendement du rapporteur Thierry Mariani (UMP) avait remplacé ce critère d’accès non effectif par une condition d’« inexistence » du traitement. La version adoptée par les députés a finalement opté pour la formule d’« indisponibilité ». Une nuance imperceptible. Ce terme « ne prend pas en compte la quantité de traitements accessibles dans le pays d’origine, ni leur coût, ni même la qualité du système sanitaire », oppose l’association Aides. Elle dénonce cette vision restrictive, induisant que « les personnes peuvent être soignées dans leur pays dès lors qu’un laboratoire distribue quelques médicaments dans la capitale, même s’ils sont hors de prix, et qu’il n’y en aura pas assez pour tout le monde », et qui pourrait à l’avenir justifier des refus d’octroi ou de renouvellement de titres de séjour. « La droite condamne à mort les malades, la gauche laisse faire : affligeant », dénonce Act Up. De son côté, le Syndicat de la médecine générale déclare s’associer aux protestations des associations de défense des droits des étrangers, de patients ou de professionnels.
Après avoir alerté, dans un courrier du 22 septembre, la ministre de la Santé sur les conséquences de l’amendement voté en commission des lois, le Conseil national du sida a réitéré son interpellation, publiquement cette fois. Dans un communiqué du 5 octobre, l’instance « invite le législateur à revenir sur cette évolution » qu’elle juge « extrêmement préjudiciable ». Au regard de ce nouvel article, argumente-t-elle, « les étrangers malades se verront condamnés soit à des mesures d’éloignement peu soutenables sur le plan éthique et aux conséquences fatales si elles sont mises en œuvre, soit, en demeurant sur le territoire, à des formes de précarité, de clandestinité et de difficultés d’accès au système de soins ». Avec, en outre, « un risque supplémentaire de dissémination de maladies infectieuses dans la population générale », et, au final, « un surcoût pour la collectivité ».
Les députés de la majorité qui souhaitaient également faire passer des amendements pour limiter l’accès à l’aide médicale de l’Etat ont finalement renoncé à le faire dans le cadre du projet de loi relatif à l’immigration. Le sujet a été renvoyé à l’examen du projet de loi de finances pour 2010 (voir ce numéro, page 47).