Au revoir, Pays raconte l’une de ces innombrables histoires de réfugiés, comme il en existe des millions de par le monde. Originaire du Laos, Thiane Khamvongsa s’est inspirée du vécu de sa propre famille, forcée à l’exil lors de l’arrivée au pouvoir du régime communiste, en 1975. La pièce illustre d’abord les pressions vécues au quotidien par Somphone, ancien officier de l’armée royale déchue, ses enfants et son épouse, le passage par le camp de rééducation idéologique, puis la nécessité de la fuite, les mains presque vides. Elle livre aussi un peu de la dureté de la migration clandestine : le déchirement du départ, la soumission aux passeurs, l’insécurité, les rapines permanentes… la peur, aussi, devant l’inconnu. Elle montre enfin le déclassement brutal subi par une famille bourgeoise qui débarque dans un pays dont elle ne parle pas la langue, ne comprend pas les codes et où chacun doit trouver un emploi, une formation, une place à l’école. Ici, ils ne sont plus rien, tout doit être recommencé à zéro… Pour les plus jeunes enfants, ce sera plus facile. Encore qu’ils se sentent tiraillés entre la vie qu’ils mènent avec leurs nouveaux amis et l’ambiance du pays que Khantamaly, leur mère (jouée par l’auteure de la pièce), tente de préserver dans leur nouveau foyer-HLM. La rencontre entre cette femme qui ne possède pas la moindre notion de français et la pétulante assistante sociale chargée d’accompagner les réfugiés dans leur insertion témoigne du fossé culturel et humain qu’il leur reste à franchir. Une œuvre servie par de bons comédiens et utile, à l’heure où les migrants anonymes semblent, avant tout, être considérés comme une nuisance. Une pièce lauréate du prix 2010 Paris jeunes talents.
Culture
En exil vers l’inconnu
Article réservé aux abonnés
Au revoir, Pays – Thiane Khamvongsa – Jusqu’au 31 octobre, à la Manufacture des Abbesses – 7, rue Véron, 75018 Paris – Du jeudi au samedi à 21 h, le dimanche à 17 h – 24 € et 13 €