La secrétaire d’Etat aux aînés, Nora Berra, a réitéré le refus du gouvernement de débloquer des financements d’urgence pour l’aide à domicile, lors des premières assises du secteur, qui se sont déroulées les 22 et 23 septembre, à Paris (1). La création d’un fonds de 50 à 100 millions d’euros, que réclament les fédérations d’aide à domicile « pour soutenir les structures les plus fragiles économiquement », avait déjà été écartée en février. « Ni le contexte des finances publiques ni les règles de la concurrence ne permettent un engagement sous cette forme », a déclaré Nora Berra.
Une fin de non-recevoir que n’acceptent pas les fédérations : « la profession ne demande pas à l’Etat de financer ce fonds, mais à la CNSA [caisse nationale de solidarité pour l’autonomie], et les crédits existent ! », fait remarquer l’AD-PA (Association des directeurs au service des personnes âgées). En effet, le conseil de la CNSA a voté en mars le principe du financement de cette aide d’urgence sur son propre budget, il n’attend plus que le feu vert de l’Etat pour le débloquer. Toujours est-il que si, lors des assises, la secrétaire d’Etat a de nouveau promis une réforme de fond du secteur, elle a, dans l’immédiat, seulement invité les associations en difficulté à envoyer leurs requêtes à la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), pour un examen au cas par cas.
Pourtant, cela fait déjà un an que les associations d’aide et de soins à domicile alertent sur la situation financière très dégradée du secteur : les licenciements des salariés sont de plus en plus nombreux et les redressements judiciaires se multiplient. En février, le gouvernement avait annoncé des « axes de travail », qui devaient déboucher sur des décisions en juin. Or rien n’a été présenté. Le collectif de l’aide et des soins à domicile composé de 16 fédérations et associations du secteur a donc adressé, le 21 septembre, un courrier aux ministres concernés pour dénoncer « l’absence totale de mesures ou même d’annonces gouvernementales sur le sujet » (2). Il a rappelé que « 60 000 personnes fragiles risquent toujours de perdre toute aide et 10 000 salariés leur emploi ».
Dès février, le collectif s’était associé à l’ADF (Assemblée des départements de France) afin de former un groupe de travail capable de proposer des solutions pour relever un système financier unanimement jugé « à bout de souffle » (3). Claudy Lebreton, président de l’ADF, a rappelé lors de ces assises que l’aide à domicile est financée à 80 % par les conseils généraux. Le groupe de travail est en passe de finaliser ses propositions, dont la trame a été adoptée par les instances de l’ADF le 15 septembre.
Il préconise, tout d’abord, de faire de l’autorisation (délivrée par le président du conseil général) le principe, et de l’agrément (octroyé par l’Etat) l’exception. En effet, l’Uniopss (Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux), membre du groupe de travail, relève « l’incohérence » de ce double système, qui favorise les structures agréées, par rapport à celles autorisées. Pour l’ADF et les 16 fédérations, il faut aussi généraliser les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM), qui permettent de travailler à moyen terme et « de mesurer les objectifs et leurs écarts avec les résultats », selon Jean-Pierre Hardy, responsable de l’action sociale à l’ADF. Deuxième axe, supprimer la tarification horaire et la remplacer par une dotation globale. La forfaitisation prendrait en compte le nombre global d’heures, le niveau de qualification des professionnels, le degré de dépendance des personnes aidées et les conditions géographiques (transport, etc.). Troisièmement, le groupe de travail souhaite privilégier la professionnalisation du secteur pour améliorer la qualité du service.
Des axes que Fabrice Heyriès, directeur général de la cohésion sociale, a commenté lors de ces assises : il a jugé « intéressante » l’idée d’une dotation globale et a promis de « conforter la place des conseils généraux dans la politique de maintien à domicile des personnes vulnérables, en favorisant la contractualisation des départements avec les services d’aide à domicile, qu’ils soient agréés ou autorisés ». Il s’est également dit favorable au développement des CPOM dans le secteur de l’aide à domicile pour les services autorisés. En ce qui concerne les services agréés, il faut, selon lui, « réfléchir collectivement à un système de conventionnement qui permette de lier financement public, qualité de service, efficience et maîtrise des coûts ». Et Emmanuel Verny, directeur général de l’UNA (Union nationale de l’aide, des soins et des services à domicile) de conclure, au nom des 16 fédérations : « Ce que l’on veut maintenant, ce ne sont ni des promesses, ni des rapports, mais des décisions ».
(1) Organisées par Le Journal du domicile et des services à la personne et La Gazette santé-social.
(2) Disponible sur