Emmaüs Défi propose à Paris une aide à la maîtrise des dépenses téléphoniques

Un ménage moyen consacre 1,5 % de ses ressources aux dépenses télé­phoniques. Chez les personnes en difficulté, la facture du portable grève parfois jusqu’à 20 % du budget ! « En matière de téléphonie comme ailleurs, les personnes précaires subissent donc une double peine : non seulement elles ont des ressources limitées mais en plus, n’étant pas solvables ni bien informées, elles paient plus cher que les autres l’accès à un même service », déplore Charlie Vincent, responsable du chantier d’insertion Emmaüs Défi. Or le téléphone portable est devenu un objet de première nécessité, sans lequel il est impossible de rechercher un emploi ou un toit. Il représente même la seule « adresse » pour les personnes sans domicile fixe.

L’association a donc développé un projet permettant à chacun de répondre à ses besoins en téléphonie. Mis en place avec le soutien de SFR, le programme « téléphonie solidaire », expérimenté depuis six mois dans deux sites parisiens (1), « n’est pas une offre “low cost” mais un accompagnement pédagogique de personnes ayant des difficultés financières », explique Jean Deydier, président d’Emmaüs Défi. En ce sens, l’offre va plus loin que le « forfait bloqué spécial RSA » lancé en juin 2009 par l’opérateur Orange. La « téléphonie solidaire » comporte ainsi plusieurs volets, en fonction des problèmes rencontrés. D’abord des cartes SIM prépayées, sans engagement, à un tarif de quatre à cinq fois inférieur à celui du marché (5 € pour une heure de communication en France), sont proposées à certains bénéficiaires. Ensuite, une information sur les bons usages du téléphone est fournie afin de consommer de manière responsable et adaptée. « Les offres sont si nombreuses, il n’est vraiment pas facile de s’en sortir, explique la responsable du projet, Margault Phélip, qui tient la permanence d’accueil du Bric-à-brac du boulevard Jourdan, à Paris. Je leur explique qu’il vaut mieux ne pas appeler à l’étranger, ni des numéros surtaxés depuis un téléphone mobile. » Enfin, Emmaüs Défi propose un accompagnement social plus poussé pour parvenir à une réduction durable du budget téléphonique du foyer.

Ce sont les travailleurs sociaux de la capitale, des associations partenaires (SOS Familles, Cresus Ile-de-France) ou encore le Crédit municipal de Paris, qui adressent les personnes vers le dispositif. Ils définissent les besoins et la durée d’accompagnement nécessaire (2). Il peut s’agir de personnes sans domicile fixe, surendettées, bénéficiaires des minima sociaux… Catherine Aupetit, assistante de service social à la mairie du XX^e arrondissement, a ainsi orienté deux personnes vers la « téléphonie solidaire ». « La semaine dernière, il s’agissait d’une mère de famille pour qui les dépenses de portable faisaient un trou dans son petit ­budget. Elle ne pouvait pas se permettre d’acheter des cartes prépayées », explique la professionnelle, satisfaite de la mise en place de cet outil supplémentaire.

« Les économies dégagées peuvent ser­vir au règlement d’un retard de loyer ou à la mise en place d’un projet », renchérit Margault Phélip. Orienté vers Emmaüs Défi par le Crédit municipal qui lui avait accordé un prêt pour l’achat de matériel informatique, Elio Morales est l’un des 100 premiers bénéficiaires du programme. « Je monte un projet d’import-export avec l’Amérique latine. Comme je contactais mes fournisseurs par téléphone, mes factures étaient très élevées », explique-t-il.

« La téléphonie solidaire est un coup de pouce pour sortir d’une situation difficile ponctuelle et surtout une aide pour retrouver dignité et autonomie », précise Jean Deydier. Ainsi, pour éviter l’effet d’aubaine la carte prépayée est octroyée pour une durée limitée. Emmaüs Défi compte pérenniser le concept, l’étendre à l’ensemble de la capitale, dans l’objectif d’atteindre le millier de bénéficiaires en 2011.

Enfin, ce projet a également pour vocation de créer des emplois au sein du chantier d’insertion. Deux personnes sont en cours de recrutement pour tenir les permanences et développer des outils d’accompagnement.