A droits connexes locaux constants, le revenu de solidarité active (RSA) a des effets « très nets » sur les gains du retour à l’emploi, conclut une étude de Denis Anne et Yannick L’Horty, chercheurs au Centre d’études de l’emploi, publiée dans la dernière livraison d’Economie et statistique de l’INSEE (1). Partant de l’hypothèse que les aides auparavant accordées aux allocataires du revenu minimum d’insertion (RMI) l’étaient désormais aux bénéficiaires du RSA, l’étude, qui se fonde sur des simulations faites à partir d’un échantillon de 13 villes et de sept configurations familiales, montre que le RSA fait disparaître dans quasiment tous les cas « les zones pour lesquelles le revenu disponible du ménage type pouvait être inférieur à celui obtenu sans revenu d’activité ». Ce que ne permettait pas le RMI, même en prenant en compte l’intéressement. Pour ses allocataires, l’équivalent annuel d’un emploi à mi-temps au SMIC n’était pas suffisant pour compenser la perte des revenus d’assistance, quelle que soit la configuration familiale. Un emploi à temps complet au SMIC ne l’était pas non plus pour les ménages avec deux enfants ou plus.
Toutefois, les effets positifs du RSA sont susceptibles d’être contrecarrés par les ajustements éventuels de l’offre locale d’aides sociales. L’hypothèse d’une stabilisation des barèmes semble en effet peu probable. Le point de sortie du RSA (1,04 SMIC pour une personne isolée) étant largement supérieur à celui du RMI, les aides octroyées sous condition de statut doivent être versées à un bien plus grand nombre de ménages touchant le RSA. Il est donc à prévoir que les collectivités « seront amenées à réformer leurs aides sociales, dès lors qu’elles subiront les conséquences budgétaires du passage au RSA ».
Or, en raisonnant à coût constant, plusieurs possibilités d’ajustement sont envisageables. Un recentrage des aides sur les ménages les plus démunis augmenterait leur revenu disponible mais produirait des effets dommageables sur les gains du retour à l’emploi. « Ce scénario est dès lors le plus défavorable du point de vue des objectifs poursuivis par le RSA. » Le scénario inverse d’étalement des aides locales moins généreuses sur un plus grand nombre de bénéficiaires permettrait « d’éviter de recreuser localement les pièges à pauvreté » mais ferait aussi des perdants. Finalement, « il ne paraît pas possible de raisonner à la fois à budget constant, sans faire de perdant et en ayant des effets favorables sur les gains de retour à l’emploi », constate l’étude. Issue possible : ne pas se contenter de modifier les paramètres des aides (montant du transfert, niveau du plafond) et modifier aussi leurs conditions d’attribution. « Une possibilité consiste à supprimer les aides sous condition de statut puisque, dans tous les scénarios, ces aides sont celles qui causent le plus de difficultés, et de les transformer en aides sous condition de ressources avec des barèmes qui satisfont aux différentes contraintes. » Au prix d’une plus grande complexité dans la gestion de ces derniers, ce scénario, en supprimant pratiquement tous les effets de seuil et en ne présentant pas d’effet négatif sur le retour à l’emploi, « illustre a priori une réforme cohérente avec la réforme nationale du RSA ». S’il y a précisément dans ce cas de figure des baisses de revenus de transferts pour les travailleurs les plus pauvres, elles « sont plus que compensées par le supplément de revenu lié au RSA de telle sorte qu’au total, il n’y a pas de perdant ». Partant de ces travaux, les auteurs ont lancé une enquête nationale afin de suivre les ajustements des politiques sociales locales, dont les résultats devraient être connus d’ici à fin septembre.
(1) N° 429-430 – Août 2010 – Disp. sur