En France, l’article 9 du code civil issu de la loi du 17 juillet 1970 affirme le droit au respect de la vie privée. Il n’en existe toutefois aucune définition légale. La jurisprudence considère néanmoins que la vie familiale, sentimentale et sexuelle en fait partie, y compris lorsque la personne est hébergée dans un établissement social ou médico-social. Il a cependant fallu attendre la loi 2002-2 pour que soit affirmé le droit au respect de l’intimité des usagers en institution (art. L. 311-3 du code de l’action sociale et des familles). La charte des droits et des libertés, qui figure désormais dans le livret d’accueil remis aux résidents, précise que le droit à l’intimité doit être préservé « hors la nécessité exclusive et objective de la réalisation et de la prise en charge de l’accompagnement » (art. 12). Le règlement de fonctionnement doit également indiquer les règles permettant le respect de la vie privée et de l’intimité de la personne.
Mais c’est la reconnaissance de la notion de projet de vie dans la loi 2002-2, puis dans la loi « handicap » du 11 février 2005, qui constitue un pas tout à fait décisif dans la prise en considération de la sexualité. En plaçant au cœur de l’accompagnement des professionnels les aspirations des personnes en situation de handicap à tous les âges de la vie, le projet de vie offre la possibilité d’évoquer la sexualité au même titre que d’autres aspirations. « Selon la façon dont on s’en saisit, la loi a néanmoins un impact très différent,explique Jean-Baptiste Thierry, maître de conférences de droit privé à l’université de Nancy-2 et collaborateur au projet SEXHI (1). Certains établissements font une interprétation très large du projet de vie, qui englobe la dimension affective et sexuelle. D’autres ont une vision beaucoup plus étriquée et font l’impasse sur la question. » Le foyer occupationnel thérapeutique La Planésié à Castres (Tarn) fait partie du premier groupe : lors de l’élaboration du projet de vie du résident, sont systématiquement balayés 26 items en rapport avec sa vie affective et sexuelle. « La sexualité est un axe prioritaire ; nous ne l’abordons pas uniquement en cas de problème comme c’est le cas dans de nombreux établissements », relate Madeleine Barbry-Arevalo, infirmière sexologue dans cette structure.
Globalement, ces avancées restent toutefois très limitées. « La loi « handicap » de 2005 n’est toujours pas appliquée pleinement », s’insurge Charles Alenza, vice-président de l’association Choisir sa vie. Il n’est pas le seul à regretter le peu d’empressement des professionnels à prendre la mesure du caractère potentiellement novateur de cette loi, spécifiquement en ce qui concerne la sexualité des personnes handicapées. La déception vaut aussi pour l’application de la loi du 5 mars 2007 réformant les régimes de protection juridique des majeurs : elle améliore certes la prise en considération de la volonté de la personne, notamment pour des actes strictement personnels, mais cette considération s’exerce rarement au sujet de la sexualité.
Parallèlement, certaines dispositions relatives à la contraception et au mariage encadrent indirectement les relations sexuelles des personnes majeures protégées. A l’instar de la loi du 4 juillet 2001 qui réglemente la stérilisation à des fins contraceptives. L’article L. 2123-2 du code de la santé publique précise que, pour ces personnes, elle ne peut être pratiquée qu’après une décision du juge des tutelles lorsqu’il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en œuvre de façon efficace. Malgré l’absence de données fiables sur ce sujet, il est toutefois probable que le recours aux stérilisations forcées perdure.
(1) Le projet interdisciplinaire SEXHI (Sexualité et handicap en institution) vise à étudier ce qui se joue, tant au plan physiologique que mental, autour de la sexualité lorsque l’autonomie est altérée par une déficience et/ou par l’âge –