Si la prise en charge des personnes âgées dépendantes est inscrite à l’agenda politique de la plupart des pays de l’Union européenne, en France, le débat a longtemps occulté la question des aidants familiaux. Or l’objectif du maintien à domicile repose « implicitement sur l’hypothèse d’une aide informelle toujours disponible », souligne le Centre d’analyse stratégique (CAS), qui émet plusieurs propositions pour favoriser cette dernière en s’inspirant de dispositifs étrangers (1).
Aujourd’hui près de 3 millions, les aidants familiaux, dont les deux tiers sont des femmes et qui appartiennent le plus souvent à la « génération pivot » des 45-64 ans, se caractérisent par leur « invisibilité sociale ». Le CAS rappelle que seuls les aidants de personnes handicapées bénéficient d’un statut juridique depuis la loi « handicap » du 11 février 2005 et qu’un projet de décret qui proposait en 2006 une définition de l’aidant familial de la personne âgée est resté dans les limbes. Le sujet est délicat, souligne l’instance, les aidants de personnes âgées ne « voulant pas se laisser enfermer dans leur rôle », souvent temporaire, ou un cadre rigide inadapté à la diversité des situations. Pour autant, la question de leurs droits sociaux reste entière. Alors que le congé de soutien familial n’est pas rémunéré, le congé de solidarité familiale donne droit à une rémunération de compensation depuis que la loi du 2 mars 2010 a créé une allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie, pendant 21 jours au maximum (2). Mais celui-ci ne correspond pas aux besoins réels des aidants familiaux qui soutiennent leurs parents âgées sur le long terme, note le CAS. Il propose donc d’en assouplir les règles d’accès afin de pouvoir l’utiliser de manière fractionnée. Il suggère également d’examiner les modalités, non pas d’une rémunération, mais d’une compensation financière minimale en cas de diminution d’activité salariale, qui permettrait aux aidants de bénéficier de droits sociaux.
Afin de mieux concilier la vie professionnelle et l’activité d’aidant, les entreprises pourraient être incitées à proposer des assouplissements d’horaires, des formules de télétravail ou des programmes de soutien, suggère également le CAS. Autre enjeu : délester les aidants de leurs lourdes tâches administratives. L’intervention d’une tierce personne pouvant jouer le rôle de référent soulève plusieurs questions – notamment sur le profil requis – que devrait permettre d’éclaircir la mise en place de 1 000 coordonnateurs d’ici à 2012 dans le cadre du plan « Alzheimer » (3). Outre l’existence de lieux de coordination comme les maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer (4), la mobilisation d’acteurs comme les associations d’aidants, les entreprises et les assureurs pourrait également permettre d’améliorer la diffusion de l’information et contribuer ainsi à alléger les démarches administratives.
Les « gérontechnologies » (déambulateurs intelligents, télésurveillance, visiophonie…), qui peuvent faciliter les tâches domestiques, devraient être davantage connues, suggère le CAS, et la possibilité de leur financement, notamment dans le cadre de l’allocation personnalisée d’autonomie, être étudiée.
Afin de répondre au « besoin de répit des aidants », l’instance préconise encore de développer l’offre de centres d’accueil temporaire pour personnes âgées (un peu plus de 12 000 places sont actuellement recensées), en la rendant plus lisible par un système d’information indiquant en temps réel les places disponibles, et plus accessible, notamment par la mise en place de moyens de transport. Elle suggère aussi de soutenir les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes qui souhaiteraient décloisonner les dispositifs en mettant à disposition des équipes de personnel mobile intervenant à domicile.
A l’heure de la réforme de la prise en charge de la dépendance, l’un des écueils serait de « s’orienter vers une professionnalisation de l’aidant », souligne le CAS, même si, pour certains, il s’agit d’une « voie inéluctable au regard du défaut de main-d’œuvre professionnelle ». Aussi, « aider les aidants familiaux suppose d’abord de structurer l’offre et d’améliorer les conditions de travail des intervenants professionnels à domicile ».
(1) Note de veille n° 187 – Juillet 2010 – Disponible sur