CÉTACÉ DE HAINE. Elle a 18 ans. Lui, quatre de plus. Elle tombe sous le charme, se marie, va habiter à ses côtés dans une maison isolée. Peu à peu, il rentre aviné. Et la frappe. Au début, elle ne dépose ni main courante ni plainte. Il est chasseur, possède un fusil chargé toute l’année. Durant six ans, elle se rend aux urgences deux fois par semaine. Jusqu’au jour où il s’en prend à leur fils de 3 ans. Le lendemain, un dimanche, il part à la chasse. Après les avoir enfermés dans la maison. Elle a un double des clés. Pas pour la voiture, en revanche. Alors elle part à pied chez son frère, à qui, jusqu’ici, elle n’a rien dit. Elle y est accueillie pendant un mois, mais les menaces du mari pleuvent. Une assistante de service social place alors la mère et l’enfant dans un centre pour personnes en danger, à 40 kilomètres de là. Ils y bénéficient d’un suivi psychologique. Le fils va à l’école du centre, accompagné par les éducateurs. « Une structure entourée de grilles avec digicode. Rassurant, en quelque sorte », raconte Laura Granny, vingt-trois ans plus tard. Jusque-là, elle n’est pas parvenue à écrire sur cet épisode de sa vie. Mais elle sait qu’elle n’a pas terminé de jeter sa « baleine à la mer », de se débarrasser de sa balle de haine… Alors, quand la troupe théâtrale bretonne Les Poules qui lèvent la tête entreprend de recueillir la parole de femmes victimes de violences conjugales pour sa prochaine pièce, Laura décide de participer. C’est finalement autour de son témoignage, immortalisé dans ce livre, que la troupe écrira son scénario. Un témoignage pour dire la peur viscérale, la violence sadique, mais également les contretemps de la justice, et la rareté des solutions de repli qui s’offrent dans de telles situations. Poignant.
Culture
TÉMOIGNAGE
Article réservé aux abonnés
Je jette ma baleine à la mer. Violences conjugales, des mots sur les maux – Laura Granny – Ed. Récits – 12 € – www.vosrecits.com – La pièce se jouera courant novembre à Cléguérec, La Motte, Dinan et Paimpol