Dans un arrêt du 1er juillet, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) décide que les travailleuses dispensées de travail ou affectées à un autre poste en raison de leur grossesse « ne peuvent prétendre aux indemnités et aux primes visant à compenser les inconvénients liés à l’exercice de tâches spécifiques dans des conditions particulières lorsqu’elles n’exercent pas effectivement ces tâches ».
La Cour était amenée à se prononcer sur deux affaires où des salariées, ne pouvant plus exercer les fonctions qui leur avaient été confiées avant leur grossesse, s’étaient vu retirer le bénéfice de primes destinées à dédommager des inconvénients qu’elles ne subissaient plus. Dans la première espèce, une femme, médecin interne dans une clinique universitaire d’anesthésie, percevait avant sa grossesse, en plus de son salaire de base, une indemnité pour astreinte. Elle a été arrêtée par son médecin car la poursuite de son activité professionnelle menaçait sa santé et celle de son enfant, puis elle a pris son congé de maternité. Pendant toute sa période d’inactivité, son employeur a refusé de lui verser l’indemnité d’astreinte. Dans la deuxième affaire, la salariée travaillait avant sa grossesse en tant que chef de cabine pour une compagnie aérienne. Une grande partie de sa rémunération était composée de primes se rattachant à son statut de supérieur hiérarchique. Pendant sa grossesse, elle a été affectée à un poste au sol, correspondant à un travail de bureau. Sa rémunération mensuelle a été diminuée, son employeur ne lui versant plus les primes destinées à compenser les inconvénients spécifiques liés à l’organisation du temps de travail dans son secteur d’activité.
Dans sa décision, la CJUE ne donne pas droit aux deux femmes. Certes, « une travailleuse enceinte dispensée de travail ou affectée provisoirement à un autre poste en raison de sa grossesse doit avoir droit à un revenu se composant de son salaire mensuel de base ainsi que des éléments de la rémunération et des primes liés à son statut professionnel telles que celles se rattachant à sa qualité de supérieur hiérarchique, à son ancienneté et à ses qualifications professionnelles ». En revanche, elle ne peut prétendre aux indemnités et aux primes visant à compenser les inconvénients liés à l’exercice de tâches spécifiques dès lors qu’elle n’exerce plus ces tâches.
La Haute Juridiction européenne rappelle par ailleurs que « la rémunération qu’il convient de maintenir pour une travailleuse enceinte affectée provisoirement à un autre poste ne saurait en tout état de cause être inférieure à celle versée aux travailleurs occupant un tel poste ». En effet, argumente-t-elle, « pour la durée de cette affectation temporaire, la travailleuse enceinte a également droit aux éléments de la rémunération et aux primes se rattachant à ce poste ».
De manière générale, la Cour note que l’obligation des Etats membres consiste à protéger la sécurité et la santé des travailleuses enceintes et non à maintenir l’ensemble des avantages liés au travail qu’elles effectuaient avant leur grossesse. Par conséquent, elle considère que « les Etats membres sont libres de maintenir aux travailleuses dispensées de travailler ou provisoirement affectées à un autre poste l’intégralité de leur rémunération et donc un niveau de revenu plus élevé que celui garanti par la directive » du 19 octobre 1992 sur l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail.