Quel est le sort des étrangers refoulés du territoire ? C’est ce qu’a voulu savoir l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE), rappelant que la Convention internationale contre la torture, ratifiée par la France, interdit de renvoyer des personnes dans un pays où elles pourraient être soumises à des traitement inhumains et dégradants.
L’association, qui regrette, dans son étude(1), « les obstacles majeurs pour accéder aux données relatives aux procédures et aux conditions de refoulement », a pu assurer un suivi de personnes rencontrées entre 2007 et 2009 (premier semestre), notamment lors de sa permanence dans la zone d’attente de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle. Elle s’est intéressée aux demandeurs d’asile, renvoyés dans le pays qu’ils ont fui (40 % des refoulés suivis en 2009) et exposés à une situation encore plus grave du fait de leur retour forcé, ou bien dans un pays de provenance (53 %) qui ne respecte pas les garanties de protection conformes au droit international. Plusieurs récits attestent de mauvais traitements, de confiscation de documents de voyage et de périodes de détention infligées par les pays de renvoi.
Quant aux mineurs isolés, déplore l’ANAFE, la France n’a pas encore donné suite à la recommandation du Comité des droits de l’enfant de l’ONU l’enjoignant de veiller « à ce que les enfants qui ont besoin d’une protection internationale et risquent d’être à nouveau victimes de la traite ne soient pas renvoyés dans un pays où ils courent un tel danger ». En 2007, 20 % des mineurs isolés rencontrés ont été refoulés vers un pays qui n’est pas le leur, où ils avaient donc peu de chance de retrouver de la famille ou des proches. En 2008, ce pourcentage s’élevait à 36 % et au premier semestre 2009 à 7 % (sur 54 mineurs rencontrés, sept ont été refoulés, dont quatre dans le pays de provenance). « Plusieurs témoignages ont confirmé qu’aucune famille sur place ou qu’aucun service de l’enfance n’attendait ces mineurs isolés dans le pays de refoulement, quand bien même il s’agissait du leur. » Ainsi, il arrive à l’Association malienne des expulsés de recueillir au Mali des mineurs et de les aider à rejoindre leur famille. Pour la police aux frontières (PAF) d’Orly, indique l’ANAFE, la confirmation « qu’une personne viendra chercher le mineur constitue une garantie suffisante ». La vérification par la France de la remise effective du mineur à sa famille, dans les conditions de sécurité nécessaires, que les autorités ont affirmé mettre en œuvre devant le Comité des droits de l’enfant de l’ONU en juin 2009, demeure donc « bien théorique ».
Les choses sont néanmoins censées avoir changé en octobre 2009 puisque, selon la PAF, tous les renvois de mineurs isolés doivent depuis se faire sous escorte et uniquement dans leur pays d’origine, où ces mineurs doivent être directement remis aux autorités locales. Reste que pour l’ANAFE, il n’est à ce jour pas possible « de vérifier ces informations » et « il reste très improbable que l’administration soit en mesure d’obtenir de véritables garanties quant à la prise en charge du mineur, compte tenu de la courte durée moyenne de maintien en zone d’attente (48 heures) ». L’association demande que le refoulement des mineurs isolés étrangers ne soit envisagé que dans le cas où « la décision a été prise par un juge dans l’intérêt supérieur de l’enfant, après enquête sociale et avec suivi de la situation du mineur dans son pays ». Plus largement, elle réclame que cessent les renvois dans des pays où les personnes risquent de subir des actes de torture, des traitements indignes, inhumains et dégradants. Elle recommande aussi que l’information sur le dépôt d’une demande d’asile ne soit pas transmise aux autorités du pays de renvoi.
(1) « De l’autre côté de la frontière – Suivi des personnes refoulées » – Avril 2010 – ANAFE : 21 ter, rue Voltaire – 75011 Paris – Tél. 01 43 67 27 52.