Une circulaire détaille et précise la nouvelle organisation des services déconcentrés de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), désormais articulés autour de directions interrégionales et de directions territoriales(1).
Le niveau interrégional concentre les actions d’administration, de gestion et d’évaluation, explique le ministère de la Justice. Il est chargé de la déclinaison en objectifs stratégiques des orientations nationales, orientations qui ont été formalisées dans un projet stratégique national triennal articulé à la programmation budgétaire pluriannuelle. Le niveau territorial est, quant à lui, dédié au pilotage de l’action éducative des structures de prise en charge et au déploiement des politiques institutionnelles au sein des politiques publiques, du dispositif de protection de l’enfance et de la justice des mineurs. « En charge d’une mission d’éducation exercée au profit de jeunes confiés par l’autorité judiciaire et à ce titre chargée de la coordination des acteurs de la justice des mineurs », la direction de la PJJ (DPJJ) s’est ainsi dotée « d’une organisation qui permet tout à la fois de programmer la conduite des orientations nationales dans un cadre administratif concentré et rénové et d’assurer leur mise en œuvre opérationnelle dans un cadre très fortement territorialisé », assure la chancellerie. Cette organisation doit permettre, selon elle :
la distinction précise des missions et des activités fonctionnelles de manière à définir les rôles et responsabilités des membres des équipes de direction ;
une clarification de la répartition des rôles et compétences des différents niveaux d’encadrement qui favorise la responsabilisation de la ligne hiérarchique et de l’ensemble des agents ;
la réorganisation des actions de soutien pour libérer l’encadrement de proximité de l’essentiel des tâches de gestion courante afin de lui permettre de se consacrer aux missions « cœur de métier ».
Cette réforme territoriale induit une évolution managériale : les deux niveaux de déconcentration contribuant chacun à la réalisation des attributions de l’autre, le choix de cette organisation suppose la fondation d’une nouvelle gouvernance qui doit permettre à chaque niveau d’encadrement de disposer d’un degré d’autonomie important dans un cadre de référence défini collégialement.
Pour décliner les orientations nationales en objectifs stratégiques, les directions interrégionales doivent élaborer un programme stratégique interrégional, qui « doit permettre d’assurer la qualité des parcours de prise en charge des mineurs sur chaque territoire et la préparation et l’exécution du budget opérationnel de programme notifié ».
Au-delà de ses attributions en matière d’évaluation, de programmation, d’affaires financières, d’immobilier et de ressources humaines, détaillées par la circulaire, la direction interrégionale doit élaborer une programmation pluriannuelle des activités éducatives à mener, à laquelle sont associés des objectifs, des indicateurs, des niveaux de résultat et le budget prévisionnel. Cette programmation porte sur :
l’organisation de la complémentarité des actions des différents opérateurs concourant aux missions de protection judiciaire de la jeunesse ;
l’inscription de la PJJ dans les politiques publiques conduites au niveau de la région ;
l’organisation des relations avec les autorités judiciaires et administratives ainsi qu’avec les collectivités territoriales ;
la concertation entre les institutions intervenant au titre de la justice des mineurs.
Dans ce cadre, le directeur interrégional est l’interlocuteur stratégique des chefs de cour, des directeurs
interrégionaux des services pénitentiaires, des préfets de régions(2) et des présidents de conseils régionaux. En tout état de cause, il garantit la participation de la PJJ à l’élaboration des politiques publiques de niveau régional dont pourraient bénéficier les jeunes confiés par l’autorité judiciaire, notamment en matière de santé et d’insertion professionnelle.
Le directeur interrégional doit également établir un plan pluriannuel d’audit des établissements et des services des secteurs public et associatif habilité, des lieux de vie et d’accueil concourant à la mission de PJJ. Il s’assure que les orientations nationales et leur déclinaison dans les cahiers des charges des unités éducatives sont connues, appliquées par les structures et intégrées dans le cadre d’intervention des auditeurs.
« Passer du département au territoire pertinent. » Tel est l’objectif poursuivi par la DPJJ avec la mise en place des directions territoriales. Ce « territoire pertinent » se définit à partir :
de la force d’équipement (établissements et services) pensée en termes de complémentarité (public/associatif habilité ; Etat/conseil général);
du potentiel de mise en œuvre des politiques publiques pilotées par la région ;
de la compétence politique en matière de protection de l’enfance et de coordination des acteurs de la justice des mineurs ;
de la capacité d’animation des dispositifs territorialisés de prise en charge.
« Ainsi défini, le territoire pertinent peut être départemental, interdépartemental ou régional, mais en tout état de cause, il permet de présenter toutes les garanties du déploiement d’un parcours de prise en charge des jeunes, cohérent et sans rupture, assure le ministère. Il est pensé comme le territoire adapté à la mise en œuvre opérationnelle des orientations nationales. »
Les directions territoriales doivent élaborer un projet territorial qui « identifie les spécificités du territoire et mobilise tous les acteurs contribuant à sa mise en œuvre. Ce projet doit favoriser l’inscription de chaque établissement et service dans le territoire et vise à dépasser le fonctionnement “ service par service ” qui crée isolement, cloisonnement et limites ». Il s’agit d’un « projet territorial unique construit sui generis et non par agrégat de projets départementaux ». Malgré tout, il « prend en compte la ou les dimensions départementales qui composent le territoire ». En effet, relève le ministère, « le département reste le lieu d’ancrage de la PJJ au sein de la protection de l’enfance, un échelon incontournable d’articulation avec les juridictions, les conseils généraux, les préfets et certains services de l’Etat ». « Outre l’exigence d’amélioration de l’aide à la décision judiciaire et de la prise en charge des jeunes en difficultés, ces articulations poursuivent des objectifs spécifiques, mais complémentaires, avec chaque acteur ». Il s’agit :
avec les conseils généraux, d’inscrire l’action judiciaire et éducative au pénal comme un segment à part entière de la protection de l’enfance ;
avec les acteurs judiciaires, de rapprocher, de mettre en cohérence la parole et le positionnement de l’institution judiciaire ;
avec les préfets, de participer aux politiques publiques qu’ils pilotent, notamment la prévention de la délinquance, et d’instruire pour leur compte les procédures relatives aux établissements et services ;
avec les services de l’Etat, d’inscrire le public pris en charge par la PJJ dans les programmes et les actions qu’ils conduisent (éducation, insertion, santé…).
Globalement, pour la chancellerie, la construction d’un parcours des mineurs cohérent et sans rupture, « y compris lorsqu’il comprend des temps d’incarcération ou que le cadre judiciaire n’a plus de raison d’être, impose de construire des articulations et des relais entre les différents établissements et services des secteurs public et associatif habilité, et avec les structures de l’aide sociale à l’enfance compte tenu de l’interdépendance des dispositifs de protection sociale et de protection judiciaire, ainsi qu’avec les dispositifs de droit commun afin de faire bénéficier les jeunes des politiques locales d’éducation, d’insertion, de santé, et de prévention de la délinquance ».
(2) La circulaire rappelle que les services déconcentrés de la PJJ ne relèvent pas de l’autorité du préfet. « Toutefois, note-t-elle, cette absence de lien hiérarchique ne doit entraver ni la concertation, ni la participation active aux missions conduites par les préfets. »