Proposer des modalités de transition du revenu supplémentaire temporaire d’activité (RSTA) (1) vers le revenu de solidarité active (RSA) dans les départements d’outre-mer (DOM) et dans les collectivités de Saint-Martin, de Saint-Barthélemy et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Telle était la mission confiée au député (apparenté UMP) de la Réunion René-Paul Victoria, qui a rendu ses conclusions le 31 mai (2) aux ministres chargés de l’outre-mer et des solidarités actives, Marie-Luce Penchard et Marc-Philippe Daubresse. Dans un prédécent rapport (3), remis au Premier ministre en avril 2009, l’élu ultramarin avait déjà lancé des pistes pour la mise en œuvre de la nouvelle prestation dans ces territoires, qui doit intervenir au plus tard le 1er janvier 2011 en application de la loi « RSA » du 1er décembre 2008 (4). René-Paul Victoria estime « impératif » de respecter cette échéance « en raison des effets positifs du RSA dans la lutte contre la pauvreté monétaire et en matière d’accompagnement de l’insertion socioprofessionnelle ».
Le député de la Réunion propose d’accompagner temporairement le passage du RSTA – créé à la suite des mouvements sociaux qui ont traversé les DOM au début de l’année 2009 – au RSA par un mécanisme faisant bénéficier les intéressés de la prestation la plus favorable, cette solution présentant l’avantage de « laisser le temps au RSA de monter en charge » et d’« éviter des ruptures brutales de droits lors du passage d’un dispositif à l’autre ». Il exclut donc toute substitution pure et simple du RSA au RSTA. « En raison de leurs caractéristiques très différentes », cette piste « devrait provoquer un nombre plus important de perdants (118 000) que de gagnants (92 000) », explique-t-il, précisant que « les personnes à faibles revenus (dans certains cas, à partir de 0,6 SMIC) pourraient voir leurs ressources baisser ».
La solution préconisée par René-Paul Victoria est, selon lui, « possible sans laisser l’allocataire devant un choix dont il n’a pas tous les paramètres ». Et l’élu d’expliquer : « il suffit de poursuivre le versement du RSTA, puis de le prendre en compte comme ressource dans le calcul du RSA », ce scénario présentant « l’avantage de ne changer en rien les caractéristiques propres de chacune de ces prestations ». Pour le député, afin de « marquer le caractère transitoire du maintien du RSTA », il pourrait être envisagé de « poursuivre le versement de cette prestation aux seuls bénéficiaires qui y sont éligibles au 31 décembre 2010 ». Une piste retenue par la ministre de l’Outre-mer, qui a indiqué qu’« il n’y aura pas de nouveaux entrants au RSTA à partir du 1er janvier 2011, et [qu’] aucun cumul des deux allocations ne sera possible ». Pour l’élu ultramarin, la période transitoire de versement des deux allocations « pourrait courir jusqu’au terme prévu par le protocole d’accord du 4 mars 2009 [signé en Guadeloupe après les mouvements sociaux de début 2009], et serait donc d’une durée de 14 mois après la mise en œuvre du RSA », soit jusqu’au 1er mars 2012. Se déclarant d’accord avec le principe, Marc-Philippe Daubresse a même évoqué une « période transitoire d’environ deux ans, en tout cas jusqu’au courant de l’année 2012 ».
D’un point de vue organisationnel, et s’agissant d’un dispositif transitoire, le rapport plaide pour « une approche qui ne modifie pas les règles de gestion existantes et limite au maximum tout ce qui nécessiterait des évolutions techniques ». Aussi le RSA devrait-il continuer à être géré par les caisses d’allocations familiales et le RSTA par les caisses générales de sécurité sociale et la caisse régionale d’assurance maladie (5) du Sud-Est, selon René-Paul Victoria, qui évalue à 78 millions d’euros le coût supplémentaire du versement de la prestation la plus favorable par rapport à la seule mise en place du RSA. « Pour son financement, 219 millions d’euros seraient mobilisables », précise-t-il : « 103 millions dégagés grâce à la sous-consommation des crédits votés en 2009 pour le RSTA et 116 millions d’euros de reliquat estimé sur les crédits votés pour 2010 ».
Le député de la Réunion formule par ailleurs quelques propositions pour accompagner au mieux la mise en place du RSA en outre-mer, la réussite du dispositif dans ces territoires dépendant notamment, selon lui, « de la capacité des acteurs à redynamiser les politiques d’insertion ». Comment ? En particulier, en donnant « la possibilité aux départements soit de conserver les agences départementales d’insertionsoit de les intégrer à la collectivité et de confier à leurs services la responsabilité d’organiser et de conduire les politiques d’insertion ». Une piste qu’il justifie par le bilan « contrasté » de ces agences.
Au-delà de la mise en œuvre d’un plan de communication dédié, il préconise d’élargir les conditions d’accès au RSA pour les jeunes de moins de 25 ans ultramarins (6). Et, concrètement, de l’« ouvrir pour sa partie “activité” à tous les jeunes de 18 à 25 ans en emploi et totalisant un an d’activité ». Une proposition rejetée par Marc-Philippe Daubresse, celui-ci indiquant qu’il n’était pas dans l’intention du gouvernement de « rajouter un dispositif en outre-mer, qui lui même ne pourrait s’appliquer en métropole ». En clair, « le RSA jeunes se déploiera dans les mêmes conditions partout ».
Au-delà, René-Paul Victoria souhaite la mise en œuvre, dès le 1er janvier 2011, du contrat unique d’insertion (CUI) dans les DOM. « Il [lui] apparaît souhaitable d’examiner les possibilités de cumul entre les aides au titre du CUI et les dispositifs généraux d’exonération de charges, pour compenser le manque à gagner lié à la disparition du contrat d’accès à l’emploi […] et éviter le risque d’un désengagement financier de l’Etat dans un contexte de besoins croissants. » De même, l’élu estime nécessaire d’« ajuster les conditions de financement du CUI afin que la mise en œuvre de ce nouveau contrat ne se traduise pas par un désengagement financier de l’Etat ni par un transfert de charges aux conseils généraux – le cas échéant en prévoyant des clés de financement des contrats différentes de celles retenues en métropole »
(2) Propositions pour une transition entre le revenu supplémentaire temporaire d’activité et le revenu de solidarité active en outre-mer – Disp. sur
(5) Les caisses régionales d’assurance maladie doivent devenir les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail à compter du 1er juillet 2010.
(6) Le projet de décret sur le RSA « jeunes » présenté au Conseil national de l’emploi le 25 mai dernier prévoit une condition de « deux ans d’activité à temps plein sur une période de référence de trois ans précédant la date de la demande ».