Il s’agit, en quelque sorte, d’un prologue au projet de loi visant à interdire le port du voile intégral, attendu le 19 mai prochain en conseil des ministres (1). L’Assemblée nationale a adopté, le 11 mai, la proposition de résolution du groupe UMP sur « l’attachement au respect des valeurs républicaines face au développement de pratiques radicales qui y portent atteinte ».
Rappelons que la portée d’une résolution est limitée. Elle n’est pas contraignante comme une loi ou un décret (2). Pour le chef de file des députés de la majorité, Jean-François Copé, « c’est une déclaration politique au sens noble du terme ». « Elle est aussi un message… Un message adressé à celles et ceux qui, en France et dans le monde, se battent pour les valeurs de dignité, de liberté, d’égalité et de fraternité », a-t-il déclaré.
S’appuyant sur un certain nombre de grands textes tels que la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ou la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, les députés considèrent, par cette résolution, que « les pratiques radicales attentatoires à la dignité et à l’égalité entre les hommes et les femmes, parmi lesquelles le port d’un voile intégral, sont contraires aux valeurs de la République ». Ils affirment également que « l’exercice de la liberté d’expression, d’opinion ou de croyance ne saurait être revendiquée par quiconque afin de s’affranchir des règles communes au mépris des valeurs, des droits et des devoirs qui fondent la société » et réaffirment « solennellement [leur] attachement au respect des principes de dignité, de liberté, d’égalité et de fraternité entre les êtres humains ».
Les parlementaires souhaitent par ailleurs, à travers ce texte, « que la lutte contre les discriminations et la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes soient une priorité des politiques publiques menées en matière d’égalité des chances, en particulier au sein de l’Education nationale ». Enfin, ils estiment « nécessaire que tous les moyens utiles soient mis en œuvre pour assurer la protection effective des femmes qui subissent des violences ou des pressions, et notamment sont contraintes de porter un voile intégral ».
La résolution a été adoptée à l’unanimité des votants. Comme il s’y était engagé, le Parti socialiste (PS) a voté le texte. Toutefois, Martine Aubry a réaffirmé publiquement son opposition à l’interdiction du voile sur l’ensemble de l’espace public, qui « risque d’être inefficace car totalement inappliquée ». En outre, les députés PS ont déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à limiter le champ d’interdiction du port du voile intégral aux services publics et à autoriser les préfets, « à raison de circonstances déterminées », à étendre cette interdiction aux transports publics et aux lieux publics « particulièrement exposés à des risques d’atteinte ou de trouble à l’ordre public ».
De son côté, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) a indiqué, le 11 mai également, considérer « d’un œil favorable la discussion et l’adoption d’un texte conçu pour rappeler un certain nombre de principes républicains, et ce de manière forte et solennelle ». Toutefois, elle regrette « que la proposition de résolution se concentre sur le port du voile intégral et apparaisse comme un préalable à une loi d’interdiction générale, sur laquelle la CNCDH a émis des réserves ». En effet, a expliqué l’instance, « les pratiques radicales ne peuvent se réduire au port du voile intégral et, d’une manière plus générale, les intégrismes à l’œuvre sous couvert de revendications identitaires, qui portent atteinte aux droits des personnes, mériteraient une condamnation de la même solennité ».
(1) A ce sujet, voir en dernier lieu ASH n° 2653 du 2-04-10, p. 18.
(2) Pour mémoire, c’est l’article 34-1 de la Constitution qui ouvre la possibilité aux assemblées de voter des résolutions pour exprimer un avis sur une question de leur choix, dans certaines limites. Les propositions de résolution peuvent être déposées à l’Assemblée ou au Sénat par un ou plusieurs parlementaires, ou par un président de groupe, de la majorité comme de l’opposition. Elles sont principalement utilisées par les parlementaires pour formuler un vœu, une recommandation.