Dans un avis du 15 avril (1), la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), qui s'est autosaisie du sujet, émet de nombreuses réserves sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI), adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 16 février dernier.
Les dispositions sur les mineurs, qui avaient déjà fait réagir les professionnels de la protection de l'enfance (2), sont notamment visées. La mesure instaurant un couvre-feu individuel pour les mineurs de 13 ans lui paraît ainsi « tout à fait inutile » dans la mesure où un mineur de cet âge se trouvant la nuit seul sur la voie publique doit déjà être conduit à son domicile au titre de la protection de l'enfance. Elle porterait par ailleurs atteinte aux droits de l'enfant, le projet de loi laissant supposer l'absence de régime spécifique pour la publicité des arrêtés individuels de couvre-feu. Or, pour les mineurs, doit prévaloir le principe de « la non-publication des noms en matière judiciaire, au motif du respect de la vie privée des enfants ». La commission s'interroge par ailleurs sur les objectifs du couvre-feu individuel en termes de « réintégration dans la société » - au regard de la Convention internationale des droits de l'enfant. L'article qui prévoit la communication des condamnations pénales des mineurs à la préfecture doit en outre être abandonné, plaide la CNCDH, puisque le préfet n'a pas, selon le code de procédure pénale, accès aux décisions prononcées en vertu de l'ordonnance du 2 février 1945. D'autres sujets - contrat de responsabilité parentale dont le non-respect peut donner lieu à la suspension des prestations afférentes à l'enfant, placement auprès des services de l'aide sociale à l'enfance par le préfet - « invitent à réfléchir à la manière dont la prévention de la délinquance et la protection de l'enfance s'articulent ».
La commission revient par ailleurs sur d'autres dispositions, en particulier celles concernant les fichiers d'antécédents judiciaires, s'interrogeant sur « les mélanges de finalités et surtout de la nécessité de tels systèmes ». Elle critique enfin les dispositions élargissant les possibilités, au cours d'une procédure judiciaire, de recours aux télécommunications audiovisuelles, ou encore celles permettant les audiences délocalisées du juge des libertés et de la détention au sein même des centres de rétention administrative et les audiences par visioconférence des étrangers retenus. Autant de mesures qui portent gravement atteinte « tant aux garanties du procès équitable qu'aux principes fondamentaux de notre système judiciaire que sont la publicité des débats et les droits de la défense ».
(1) Disponible sur