Ils ne sont pas nombreux les chanteurs français qui savent prêter leur voix aux petits, aux exclus, à tous ceux qui sont dans la galère. Bill Deraime est de ceux-là. Voilà quarante ans qu'il traîne sa grande carcasse et sa guitare entre blues, reggae et ballade. Dans ce double album, il reprend 26 titres qui ont émaillé sa longue carrière et auxquels il souhaitait donner une seconde chance. Dans Chanteur maudit, il évoque ses débuts dans les couloirs du métro. Une période « heureuse malgré les difficultés », raconte-t-il, s'inquiétant de la régression actuelle du droit d'exister. La chanson Esclaves ou exclus, dédiée au collectif Les Morts de la rue, lui a été inspirée par la lecture de Du bon usage de l'exclusion (1). Dans Babylone tu déconnes, l'un de ses tubes, il brosse le portrait d'un personnage étrange, sorti tout droit des murs d'un hôpital psychiatrique. Un personnage qui n'est autre que lui-même, explique-t-il dans le livret, et que l'on retrouve dans Maniaco-dépressif. On réécoutera aussi avec bonheur des chansons plus lumineuses, comme Energie positive ou Encore bouger, à propos de laquelle il écrit : « Bouger vraiment, c'est changer de regard avant tout en croyant que le partage des richesses est possible. » Bill Deraime n'est pas un chanteur engagé, c'est un chanteur profondément humain.
Brailleur de fond - Bill Deraime - Coffret de 2 CD - Dixiefrog - 21,65 € - Concerts : le 18 mai, au Cabaret sauvage, à Paris ; le 18 juillet, au festival Musiques et Terrasses de Verdun ; le 4 septembre, au Rassemblement des Brescudos, au Cap-d'Agde ; le 14 octobre, à l'Espace culturel de Romorantin
(1) Corédigé par Albert Rouet, évêque de Poitiers, et Philippe Caumartin, économiste, cet essai démonte le mécanisme de l'exclusion, tout en dénonçant le système d'assistanat mis en oeuvre pour y répondre (Ed. Desclée de Brouwer, 2000).