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Information préoccupante : à la recherche du consensus

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L'ANAS, l'ONES et le SNMPMI rendent publique leur proposition de définition de l'« information préoccupante », notion majeure introduite par la réforme de la protection de l'enfance, objet d'un long débat qui doit être tranché dans le cadre des « états généraux de l'enfance ».

La notion d'information préoccupante introduite par la réforme de la protection de l'enfance du 5 mars 2007 est-elle enfin en passe d'être clarifiée ? Selon la loi, les professionnels de la protection de l'enfance ou lui apportant son concours transmettent sans délai au président du conseil général toute information préoccupante sur un mineur en danger ou en risque de l'être au sens de l'article 375 du code civil (1), afin d'évaluer la situation de ce dernier et de déterminer les actions d'aide et de protection nécessaires. Le conseil général doit centraliser ces informations au sein d'une cellule de recueil, de traitement et d'évaluation.

Or l'absence de définition précise de cette information au niveau national et la non-prise en compte de la diversité des émetteurs potentiels ont laissé le champ libre aux interprétations et introduit des risques de dérive. Lors d'une journée technique sur l'application de la réforme organisée le 2 décembre dernier par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse, la direction générale de l'action sociale et l'Assemblée des départements de France (ADF), une proposition de définition issue de travaux interministériels a été présentée, s'appuyant sur toutes les définitions existantes (2). Depuis, la réflexion s'est poursuivie dans le cadre des « état généraux de l'enfance », au sein d'un atelier consacré au sujet, présidé par Fabrice Heyriès, directeur général de la cohésion sociale. Une réunion de clôture de ce groupe doit avoir lieu le 6 mai et il faudra attendre la conclusion des états généraux, prévue au 1er juin, pour en connaître l'issue.

Dans l'attente, l'Association nationale des assistants de service social (ANAS), l'Organisation nationale des éducateurs spécialisés (ONES) et le Syndicat national des médecins de PMI (SNMPMI), qui ont refusé de participer aux « états généraux » mais avaient été associés aux travaux du 2 décembre, viennent d'adresser leur définition à la secrétaire d'Etat à la famille. Leur objectif : limiter son périmètre « afin, d'une part, de ne pas élargir le champ de la protection de l'enfance à des faits finalement mineurs et, d'autre part, de ne pas ainsi cibler une large partie de la population qui, du seul fait de l'émission d'une information préoccupante, serait catégorisée dans le champ de la protection de l'enfance ». Pour les organisations, lorsqu'elle est transmise par les professionnels, une information préoccupante doit être qualifiée comme telle seulement après évaluation de la situation par ces derniers au sens de l'article 375 du code civil et de l'article 221-1 du code de l'action sociale et des familles (qui définit le rôle des professionnels de la protection de l'enfance dans le circuit de ces informations) et quand le mineur « ne bénéficie d'aucune décision de protection visant à le mettre hors de danger, ou que la décision de protection dont il bénéficie ne permet pas de le mettre hors de danger ou d'enrayer l'aggravation du danger ». En cas de transmission directe sans évaluation par des professionnels, la cellule doit faire ou demander une évaluation avant de définir l'information comme préoccupante.

La définition interministérielle présentée le 2 décembre ne fait pas référence à ces préalables. Selon celle-ci, l'information préoccupante « alerte les services de la protection de l'enfance sur l'existence possible d'un danger ou risque de danger pour un mineur, soit que la santé, la sécurité ou la moralité de ce mineur soient supposées être en danger ou en risque de danger, soit que les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social soient supposées être gravement compromises ». L'administration considère que la supposition de danger ou de risque de danger émanant de professionnels, « étayée par une réflexion partagée », devient préoccupante lorsque ces derniers « ont identifié le besoin de procéder à une évaluation pluridisciplinaire, de réévaluer une situation, d'approfondir une aide apportée, ou bien d'assurer une protection immédiate à l'enfant ». Elle souligne que les informations émanant des professionnels « isolés » sont fondées sur des « appréciations individuelles » et que celles provenant de particuliers peuvent être le fruit « d'une appréciation plus subjective ».

Supprimer la notion de gravité ?

Dans son avis sur cette proposition interministérielle, l'Assemblée des départements de France a fait d'autres commentaires. Elle recommande notamment de supprimer la notion de gravité due à la référence à l'article 375 du code civil, qui est « le critère de signalement direct au parquet », selon elle, et est en décalage avec l'esprit de la loi qui place l'intervention des professionnels dans le champ de la prévention. Le groupe d'appui à la mise en oeuvre de la réforme de la protection de l'enfance, piloté par la CNAPE (ex-Unasea), la rejoint sur ce point. Il recommande en revanche que le « besoin d'aide » soit introduit dans la définition. Il suggère de supprimer le terme de « supposition » de danger ou de risque, trop ambigu à ses yeux, ainsi que la référence aux particuliers, ces repères devant, selon lui, s'adresser prioritairement aux professionnels.

Reste que les « états généraux de l'enfance » devaient aussi, selon les orientations initiales du gouvernement, réfléchir aux moyens de « garantir la collaboration entre communes et départements afin d'enfinir avec un nomadisme de certaines familles ». Cet objectif avait suscité un véritable tollé. « Il s'est plutôt agi de réfléchir à la transmission de dossiers d'enfants en danger ou en risque de l'être d'un conseil général à l'autre lorsque les familles quittent le département », précise-t-on à l'ADF. Cette volonté a déjà fait l'objet d'une proposition de loi de la députée (UMP) Henriette Martinez (Hautes-Alpes), membre de l'atelier concerné, enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 21 décembre dernier.

Par ailleurs, un projet de texte réglementaire devant définir la nature des données transmises sous forme anonyme aux observatoires (national et départementaux) de l'enfance en danger est en cours d'élaboration. Il fait suite aux recommandations de la Commission nationale de l'informatique et des libertés du 29 décembre, dans un avis défavorable aux formulaires élaborés par l'ONED pour mettre en oeuvre le décret du 19 décembre 2008 sur la transmission à ces observatoires, à des fins statistiques, d'informations préoccupantes sous forme anonyme (3).

Notes

(1) Qui prévoit que « si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises », des mesures d'assistance éducative peuvent être ordonnées par la justice.

(2) Il s'agit des définitions de l'ONED, qui a également présenté une définition conjointe avec l'ODAS, de l'ANAS et de celle figurant dans le guide ministériel sur les cellules de recueil, de traitement et d'évaluation de l'information préoccupante.

(3) Voir ASH n° 2643 du 22-01-10, p. 22.

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