Recevoir la newsletter

« LA FONCTION DE MÉDIATEUR N'EST PAS UNE PRIORITÉ DE PÔLE EMPLOI »

Article réservé aux abonnés

Le 15 avril, soit un mois après la remise de son rapport d'activité, Benoît Genuini (1) a démissionné de ses fonctions de médiateur de Pôle emploi. Il estime que ses propositions pour améliorer le service rendu aux usagers n'ont guère été entendues et que son rôle n'est pas reconnu en interne.

Vous avez expliqué n'avoir ni les moyens, ni le soutien nécessaire pour continuer à faire votre travail. Vous aviez pourtant toute une équipe autour de vous...

J'avais une équipe de quatre personnes autour de moi et je pouvais m'appuyer sur 26 médiateurs régionaux. Mais le nombre de réclamations'est rapidement mis à croître pour atteindre un millier par mois. Aussi, pour pouvoir faire un travail approfondi et suivre chaque réclamation, j'avais besoin de renforts que je n'ai obtenu qu'au compte-gouttes. Mais le problème, c'est aussi la légitimité de la fonction : sur les 26 médiateurs régionaux, certains sont à temps très partiel et occupent une autre fonction comme celle de chef de cabinet du directeur régional. Leur liberté de parole n'est donc pas garantie. J'avais demandé qu'on crée un corps indépendant de médiateurs. Sans succès. De même, j'ai dû attendre le mois d'août pour avoir une page sur le site Internet de Pôle emploi donnant la marche à suivre pour saisir le médiateur. Il est clair que ma fonction n'était pas une priorité du management. J'en ai eu une nouvelle illustration avec la remise de mon rapport d'activité 2009 (2).

Vous dites que la direction n'a pas vu son intérêt. Pourquoi ?

Dans ce rapport, je faisais des propositions d'aménagement de l'assurance chômage qui ont été très bien accueillies par le conseil d'administration, notamment par les partenaires sociaux. Elles devraient d'ailleurs être reprises dans la future convention d'assurance chômage. En revanche, les propositions que j'avais formulées pour améliorer le fonctionnement interne de Pôle emploi ont été suivies d'un grand silence. Je n'ai eu qu'un mail de la direction m'indiquant que je manquais de respect aux conseillers de Pôle emploi. J'ai compris que ma fonction devenait encombrante, j'ai préféré partir.

Vous aviez pointé une soixantaine de situations à améliorer...

J'avais voulu éviter de donner des leçons. Aussi j'avais choisi de raconter 60 histoires vraies qui étaient parvenues au médiateur. Je voulais montrer que bon nombre de situations - rejets de demandes d'indemnisation, oublis, erreurs de traitement... - auraient pu être évitées si l'on avait pris plus de temps pour examiner et comprendre les situations particulières afin d'appliquer avec bon sens et humanité les textes. Car, à l'inverse, on a plutôt le sentiment qu'il s'agit de faire rentrer les chômeurs dans les cases de la réglementation. J'ai d'ailleurs eu beaucoup de réactions de conseillers ou de directeurs d'agence : ils m'ont dit se reconnaître dans ma description de la vie à Pôle emploi et apprécier que, pour la première fois, on parle de leur métier difficile ; ils aimeraient également qu'on les mobilise sur des valeurs comme la qualité de service aux usagers, et pas seulement sur des objectifs chiffrés.

Votre démission fait écho à la souffrance au travail vécue par les agents de Pôle emploi...

Je ne veux pas m'engager sur ces questions, qui relèvent du management. C'est vrai que j'ai senti autant chez les conseillers que parmi les demandeurs d'emploi une profonde détresse et un besoin d'être écouté. Je crois que la fusion ANPE-Unedic a été menée rapidement sans se préoccuper du facteur humain. Beaucoup ne trouvent plus de sens à leur action.

Comment pourrait-on améliorer la fonction du médiateur ?

J'espère qu'au moins ma démission aura ouvert les yeux de la direction et permettra que mon successeur ait plus de moyens et une véritable indépendance. Il faudra également que la fonction soit reconnue en interne : jusqu'ici la hiérarchie ne répondait pas forcément à nos appels et résistait à appliquer nos recommandations. Il faudrait surtout que l'objectif que j'essayais d'incarner - aider les demandeurs d'emploi en difficulté et contribuer à ce que Pôle emploi rende un meilleur service à l'usager - devienne une priorité.

Notes

(1) Ancien président d'Accenture, cofondateur de l'Agence nouvelle des solidarités actives, Benoît Genuini préside l'association humanitaire « Passerelles numériques ».

(2) Voir ASH n° 2651 du 19-03-10, p. 13.

Questions à

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur