Lorsque des dommages sont commis par deux mineurs confiés à un foyer au titre de mesures différentes - assistance éducative et enfance délinquante -, la responsabilité de l'Etat est limitée à ceux causés par le mineur relevant de l'ordonnance du 2 février 1945. Telle est la décision rendue par le Conseil d'Etat le 17 mars.
Dans cette affaire, des vols et des dégradations sur plusieurs véhicules ont été commis par trois mineurs, l'un placé auprès du département du Tarn, les deux autres auprès d'un foyer au titre, pour l'un, de l'assistance éducative sur le fondement des articles 375 et suivants du code civil et, pour l'autre, de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante. Le tribunal pour enfants d'Albi a condamné solidairement les trois mineurs à indemniser les victimes. La compagnie AXA, assureur du département déclaré civilement responsable de l'un des mineurs en cause, a versé aux victimes une somme de 6 000 € en réparation de l'intégralité des dommages. Elle a ensuite demandé à la MAIF, assureur du foyer, de lui rembourser les deux tiers de l'indemnité versée aux victimes, correspondant à la part imputable aux deux autres mineurs. Après avoir versé à la compagnie AXA une somme de 4 000 € , la MAIF a obtenu devant le tribunal administratif de Toulouse la condamnation de l'Etat à lui rembourser cette somme. L'Etat a porté l'affaire devant le Conseil d'Etat, lui demandant de partager la responsabilité entre lui-même et le foyer.
Le Conseil d'Etat rappelle tout d'abord que la décision par laquelle une juridiction confie la garde d'un mineur sur le fondement de l'ordonnance du 2 février 1945 transfère à la personne qui en est chargée la responsabilité d'organiser, de diriger et de contrôler la vie du mineur. Sa responsabilité peut être engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur. Toutefois, cette règle ne fait pas obstacle à ce que soit également recherchée, devant la juridiction administrative, la responsabilité de l'Etat en raison du risque spécial créé pour les tiers du fait de la mise en oeuvre d'une des mesures de liberté surveillée prévue par l'ordonnance du 2 février 1945. Puis le Conseil d'Etat rappelle que la décision par laquelle le juge des enfants confie la garde d'un mineur à un établissement ou service, dans le cadre d'une mesure d'assistance éducative, transfère la responsabilité d'organiser, de diriger et de contrôler la vie du mineur à cette structure, dont la responsabilité est engagée pour les dommages causés aux tiers par ce mineur, même sans faute. Lorsque la structure ne relève pas de l'autorité de l'Etat, elle ne peut rechercher la responsabilité pour risque de ce dernier au titre des agissements du mineur concerné.
En outre, indique la Haute Juridiction, lorsque l'un des coauteurs d'un dommage a indemnisé intégralement la victime des préjudices qu'elle a subis, il ne peut, par la voie de l'action subrogatoire, se retourner contre un autre coauteur que dans la limite de la responsabilité encourue individuellement par ce dernier. En conséquence, en mettant à la charge de l'Etat l'intégralité de cette somme au seul motif que sa responsabilité sans faute était engagée pour l'un des deux mineurs à l'origine des faits, sans rechercher quelle était la part respective des deux mineurs coauteurs dans la réalisation du dommage, le tribunal administratif de Toulouse a commis une erreur de droit. Le Conseil d'Etat annule donc cette décision et condamne l'Etat à verser à la MAIF une somme de 2 000 € .