La colère monte du côté des fédérations gestionnaires de services de soins infirmiers à domicile (SSIAD). Les 14 organisations gestionnaires (1) ont adressé le 23 mars, un courrier à Fabrice Heyriès, directeur général de la cohésion sociale (DGCS), pour contester le projet de nouveau mode d'allocation des ressources de ces services, prévu pour début 2011. En janvier dernier, elles avaient déjà manifesté, dans un avis, leur désaccord sur cette réforme (2). La réunion de concertation qui a eu lieu le 12 février n'a pas calmé leurs inquiétudes. « Lors de cette rencontre, on nous a indiqué que la réforme se mettrait en place progressivement sur cinq ans mais nous n'avons eu aucune réponse sur le fond, explique Paloma Morano-Elgard, responsable santé-action sociale à l'UNA (Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles). Nous sommes toujours dans le brouillard sur les conséquences de cette réforme pour les services. » Les organisations contestent toujours les critères retenus par l'étude réalisée par l'administration pour justifier cette réforme, qui associe une tarification à l'activité (coût attribué en fonction des besoins du malade) et une dotation globale par structure. Ces critères ne sont pas représentatifs de l'ensemble des SSIAD et ne suffisent pas, pour les organisations, à tirer des conclusions pour un modèle national. Le risque, si une tarification standardisée était appliquée, est de « créer un système discriminatoire qui entraînerait inévitablement une sélection des patients », laissant de côté les malades les plus lourds. Le 12 février, la DGCS a bien annoncé la constitution de deux groupes de travail, l'un sur la prise en charge des personnes handicapées, l'autre sur le système d'information, mais aucun élément n'a été depuis transmis aux fédérations qui ne savent pas encore si elles seront associées.
Dans ce contexte, les organisations réitèrent leur demande formulée en janvier, à savoir que le modèle de cette nouvelle tarification soit testé avant d'être déployé, de façon à connaître son impact financier sur chaque SSIAD. Elles demandent en outre qu'un certain nombre de paramètres soient pris en compte dans les coûts. Il s'agit notamment du niveau des conventions collectives, des revalorisations statutaires, de l'ancienneté, des aires géographiques des services et des augmentations des tarifs des actes de soins des professionnels libéraux.
Elles proposent aussi qu'une enquête complémentaire soit réalisée par la CNSA (caisse nationale de solidarité pour l'autonomie), qui peut désormais faire des enquêtes de coûts. Enfin, elles souhaitent que l'application de la réforme du financement des SSIAD n'intervienne pas avant 2012. L'année 2010 apporte en effet déjà de nombreux changements pour le secteur avec la mise en place des agences régionales de santé. Cela laisserait le temps aux SSIAD de mettre en place les systèmes d'information qui vont accompagner cette réforme. Sans réponse de la part de la DGCS, les fédérations sont déterminées à se mobiliser plus fortement dans les mois à venir, en coordonnant des actions en région.
Nora Berra, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, a manifesté un signe d'apaisement le 23 mars à l'occasion de l'assemblée générale de la FEHAP (Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs). Elle a souhaité que la concertation se poursuive « d'une part pour évaluer l'impact de cette réforme sur le budget des SSIAD, d'autre part pour travailler sur la question des critères d'accès à ces services ».
(1) AD-PA, Adessa A Domicile, ADMR, APF, Croix-Rouge française, Familles rurales, Fnaafp/CSF, FEHAP, FHF, GIHP National, UNA, Unassi, Unccas, Uniopss.