Que dénoncez-vous ?
La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a reconnu les entreprises adaptées (EA) (anciens « ateliers protégés ») comme des entreprises classiques pouvant être gérées par des associations, des sociétés privées à but lucratif ou des établissements publics. Depuis les années 90, à la demande des pouvoirs publics et pour favoriser l'emploi en milieu ordinaire des personnes en situation de handicap, plusieurs établissements publics sociaux et médico-sociaux, qui gèrent notamment des entreprises et services d'aide par le travail, ont d'ailleurs créé des entreprises adaptées. Il en existe aujourd'hui 19 de ce type, représentant plus de 426 emplois. Or leur statut ne leur permet plus de bénéficier des réductions de charges sur les bas salaires instaurées en 2003, dites « dispositions Fillon ». Outre un manque à gagner qui menace les emplois - ces allégements de charges représentent environ 3 750 € par an et par salarié -, cette situation provoque une inégalité de traitement pour des entreprises qui doivent fonctionner avec les mêmes contraintes économiques et sociales que n'importe quelle autre. Alors que la loi du 11 février 2005 était une loi de non-discrimination et que nous avons joué le jeu de la création d'entreprises et de la prise de risque, les gestionnaires se sentent lâchés par les pouvoirs publics !
Pourquoi une telle situation cinq ans après la loi ?
Après que l'Urssaf avait engagé une procédure contre une EA publique en 2005, Phillipe Bas, alors ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, avait décidé d'appliquer les « dispositions Fillon » à ces structures à titre dérogatoire. Le gouvernement a changé son fusil d'épaule en 2008 et a d'abord opté pour une transformation des EA publiques en établissements ou services publics à caractère industriel et commercial. Une étude de décembre 2009, financée par la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, a examiné cette possibilité, mais celle-ci n'a finalement pas été validée par le Conseil d'Etat. Aujourd'hui, l'administration nous impose de les transformer en EA privées pour pouvoir continuer à bénéficier des réductions de charges sur les bas salaires, ou, à défaut, de perdre ce droit au 30 juin 2010.
Vous refusez cette transformation ?
Cette option n'est juridiquement pas envisageable, car elle obligerait les établissements à avoir deux conseils d'administration, sauf à céder l'EA à une autre structure. Dans ce cas, cela signifierait l'abandon de moyens, avec le risque de mettre en péril l'équilibre économique des établissements gestionnaires et de démanteler le secteur économique et social public. Sur le plan éthique, nous sommes aussi consternés : nous y voyons une volonté de libéralisation et de marchandisation de ce secteur, avec la crainte de voir disparaître les valeurs qu'il partage avec le champ associatif, c'est-à-dire la gestion désintéressée, qui permet de créer des emplois et de favoriser la dignité des personnes.
Que demandez-vous ?
Le vide juridique ne peut entraîner de discriminations dans l'application de la loi ! Nous lançons un appel aux pouvoirs publics afin qu'ils aménagent le cadre réglementaire pour ne pas laisser mourir les EA publiques et leur permettre d'exercer leurs missions. A défaut, le GEPSo soutiendra les structures dans leurs démarches contentieuses. Ce cadre peut être clarifié par l'arbitrage du Premier ministre, auquel nous demandons audience. Nous avons également saisi le Conseil national consultatif des personnes handicapées et engagé des contacts avec les députés.
(1) Groupe national des établissements publics sociaux et médico-sociaux : 92, avenue de Saint-Mandé - 75012 Paris - Tél. 01 44 68 84 60.