Dix femmes mises en beauté par les apprentis coiffeurs et esthéticiennes de la chambre d'apprentissage et de formation du Gard nous regardent d'un air impertinent. Ces femmes d'âge et d'origine différents, qui ont posé devant l'objectif de Lionel Cattirolo, sont toutes en situation de handicap - moteur, psychique ou sensoriel. Quel regard portent Claudia, Nabila, Lisette ou Michèle sur leur corps, leur féminité ? Quel est leur rapport à la séduction ? Et quel regard porte le grand public sur le handicap, dans une société qui valorise des normes inaccessibles à la majorité des femmes ? Toutes ces questions sont soulevées par l'exposition « Beauté et handicap », organisée par la délégation gardoise de l'Association des paralysés de France (APF). Les clichés sont présentés par binômes : à gauche, en noir et blanc, les femmes posent au naturel, souvent dans leur fauteuil roulant ; à droite, elles sont glamour, en portrait, en couleurs. « Des stars d'un jour ! », commente Dolorès Orlay-Moureau, directrice départementale de l'APF du Gard. L'été dernier, le photographe de mode Lionel Cattirolo lui propose d'immortaliser des femmes handicapées à la façon de top models. La directrice saisit l'occasion pour développer un projet plus ambitieux et engager une réflexion sur la féminité des personnes handicapées. Elle lance un appel parmi les membres de l'APF puis, afin de « recruter » des femmes atteintes d'autres handicaps, passe une annonce dans les médias locaux. Les dix modèles sont associées d'un bout à l'autre du projet. Elles ont ainsi rédigé de courts textes qui accompagnent leurs photos « avant »/ « après ». « Ma vie grisâtre se teinte de bleu en voyant des petites lumières briller en regardant les photos. Quel bonheur ! », écrit Michèle, handicapée moteur, qui a du mal à se reconnaître. « Pour ces femmes, beauté ne peut pas rimer avec handicap, relate Dolorès Orlay-Moureau. Cette expérience originale leur a permis de reprendre confiance et de retrouver leur identité de femme. Pour d'autres, cela a été plus difficile et les séances de pose ont fait ressortir un certain mal-être, ce qui leur a permis d'exprimer des choses qu'elles n'avaient jamais osé confier auparavant. L'association des photos de pied, qui mettent en avant le handicap, et des gros plans qui l'effacent montre bien qu'elles ne renient pas ce qu'elles sont mais que, comme toutes les autres femmes, elles ont la capacité de séduire. » Quant au photographe, s'il a eu la même exigence avec ces femmes qu'avec ses mannequins habituels, il a dû renoncer à des poses qu'il avait envisagées et découvert un tout autre rapport au corps et à la féminité.
« Beauté et handicap : 10 regards de femmes » - Jusqu'au 23 mars, à l'hôtel Novotel Atria de Nîmes - Du 3 au 12 mai, au CFA des Métiers, à Nîmes - Puis sur demande auprès de