CORRESPONDANCE

ÉCHANGES DE FOND. Quand un éduc et un psy se rencontrent, qu'est-ce qu'ils se racontent ? Des histoires d'enfants dont le parcours n'est pas un long fleuve tranquille. L'éducateur, c'est Jean Cartry, fondateur, avec sa femme Janine, éducatrice elle aussi, d'une famille d'accueil thérapeutique pour des enfants souffrant de carences graves. Le professeur émérite de psychologie, c'est Paul Fustier, qui a longtemps arpenté les « corridors du quotidien » - titre d'un de ses livres - aux côtés d'équipes travaillant en institutions sociales, médico-sociales ou psychiatriques. Différemment situés sur l'échiquier du soin, les deux professionnels analysent, par missives interposées, des situations concrètes qui, pour la plupart, se sont déroulées au foyer du couple parental spécialisé. Relatées avec bonheur par Jean Cartry, ces tranches de vie donnent au psy matière à rebondir sur les affects mobilisés dans la relation éducative. « Est-ce que je suis encore important pour vous ? », demande Sébastien, jeune adulte au bord du suicide, à l'éduc chez qui il a vécu plus de dix ans. A cette question, Jean Cartry, telle une pythie, répond par une énigme destinée à amener son interlocuteur à trouver lui-même sa réponse. « Tu lui apportes du grain à moudre, des mots pour une pensée qui sera la sienne et pas la tienne. C'est cela qui s'appelle l'accompagnement », estime Paul Fustier. S'agissant de Sébastien, comme pour ce qui concerne Grégoire, Nadine, Eric, Pierre, François ou Fanny, qui partagent ou ont longtemps partagé la vie des Cartry, c'est bien toujours la nature du lien entre accueillants et accueillis qui est au coeur des échanges entre l'éduc et le psy. Et c'est passionnant.