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La loi « orientation-formation » La formation en alternance et l'insertion professionnelle des jeunes

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Ne laisser, dans le contexte de crise économique actuel, aucun jeune à l'écart d'une démarche d'insertion professionnelle. C'est l'un des objectifs de la loi du 24 novembre 2009, qui étend par ailleurs l'accès au contrat de professionnalisation à certains titulaires de minima sociaux et aux personnes ayant bénéficié d'un contrat unique d'insertion.

La loi du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie constitue, en premier lieu, la traduction législative d'un accord national interprofessionnel conclu le 7 janvier 2009 par les partenaires sociaux et qu'ils ont signé à l'unanimité (1). Globalement, le législateur a respecté le cadre général et l'esprit de ce texte, en reprenant l'essentiel de ses dispositions, notamment sa mesure la plus emblématique, la création d'un Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (2). La loi comme l'accord poursuivent principalement un double objectif : faire de la formation professionnelle un outil efficace de la sécurisation des parcours professionnels, notamment en l'orientant mieux vers les salariés les moins qualifiés ou les plus fragiles et vers les demandeurs d'emploi, tout en rendant l'ensemble du système plus lisible, plus transparent et donc plus efficace.

D'autres enjeux, comme celui « de ne laisser aucun jeune à l'écart d'une démarche d'insertion professionnelle » - public particulièrement touché par la crise économique -, ont conduit les parlementaires à adopter des mesures fondées avant tout sur l'engagement des acteurs et sur l'expérimentation. Et ainsi à élargir le champ de l'accord des partenaires sociaux, le texte voté comportant finalement une série de dispositions en faveur de l'accès des jeunes à la formation et de leur insertion professionnelle. S'inscrivant dans le prolongement des mesures annoncées par le président de la République en avril et septembre derniers (3), ces dispositions visent à dynamiser l'emploi des jeunes. Un certain nombre d'entre elles ont trait aux formations en alternance, l'objectif étant d'en favoriser l'essor. Pêle-mêle, signalons, en particulier, la possibilité, à titre expérimental, d'entrer en centre de formation d'apprentis (CFA) sans contrat d'apprentissage, l'apprenti bénéficiant d'un délai de 2 mois pour trouver un employeur. Ou, également à titre expérimental, la possibilité pour l'apprenti de poursuivre sa formation en CFA pendant 3 mois en cas de rupture de son contrat de travail, sous réserve que la cause de cette rupture ne lui incombe pas. Toujours à titre expérimental, le législateur permet aussi aux apprentis ayant achevé leur contrat d'apprentissage, sans que celui-ci ait été sanctionné par la validation d'un diplôme ou d'un titre, de demander à bénéficier de la prise en compte de leurs acquis en vue de l'obtention d'un certificat de qualification professionnelle. La loi du 24 novembre dernier permet par ailleurs à l'Etat de conclure avec les entreprises et les branches professionnelles des conventions d'objectifs sur le développement de la formation des jeunes par l'alternance, en fixant comme horizon un objectif de 5 % de jeunes en alternance dans les effectifs des entreprises au 1er janvier 2015.

Pour prévenir l'errance des jeunes en décrochage scolaire, le législateur institue un dispositif de repérage des jeunes « décrocheurs » sous l'égide du préfet de département. Il pose par ailleurs le principe d'une couverture complète et équilibrée du territoire par le réseau des « écoles de la deuxième chance ».

Au-delà, la loi du 24 novembre 2009 étend le bénéfice du contrat de professionnalisation à des publics très éloignés de l'emploi (bénéficiaires de certains minima sociaux, sortants de contrat aidé), tout en prévoyant à leur égard, mais aussi au profit des jeunes sans qualification, la mise en oeuvre de conditions particulières d'exécution de ce dispositif. Est également prévue la délivrance de droit d'une autorisation de travail aux étrangers autorisés à séjourner en France pour la conclusion d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation à durée déterminée.

Par ailleurs, la loi généralise temporairement les clauses d'insertion au bénéfice des jeunes peu ou pas qualifiés dans les marchés publics. Elle prévoit aussi expressément que les résultats obtenus par les missions locales, en matière notamment d'insertion des jeunes, doivent être mesurés et conditionnent le financement de ces structures au bilan de cette évaluation.

Enfin, signalons l'abaissement de 3 à 2 mois de la durée minimale du stage à l'issue de laquelle une gratification est due au stagiaire, ainsi que l'interdiction des stages hors cursus pédagogique.

I. LES CONTRATS EN ALTERNANCE

A. LE CONTRAT D'APPRENTISSAGE

1. L'AMÉLIORATION DE LA TRANSITION ENTRE LA SCOLARITÉ ET L'APPRENTISSAGE (ART. 29 DE LA LOI)

Dans l'objectif d'amortir la transition souvent brutale entre la scolarité et l'apprentissage, la loi du 24 novembre 2009 prévoit que les centres de formation d'apprentis (CFA) pourront accueillir, pour une durée maximale de 1 an, les élèves ayant atteint l'âge de 15 ans pour leur permettre de suivre, sous statut scolaire, une formation en alternance destinée à leur faire découvrir un environnement professionnel dans lequel ils envisagent d'entrer en apprentissage. Ce dispositif doit encore être précisé par décret mais il est d'ores et déjà acquis que, à tout moment du parcours, l'élève pourra (code de l'éducation [C. éduc], art. L. 337-3-1 nouveau) :

soit accéder à un contrat d'apprentissage, sous la réserve d'avoir 16 ans révolus ou d'avoir accompli la scolarité du premier cycle de l'enseignement secondaire ;

soit reprendre sa scolarité dans un collège ou un lycée.

De nombreux jeunes s'engagent en effet dans une formation par apprentissage sans avoir pu valider leur projet professionnel ou sans avoir eu la possibilité de découvrir le métier et l'environnement professionnel conduisant au diplôme préparé. Il en résulte souvent des déconvenues tant pour l'apprenti que pour le maître d'apprentissage et un taux élevé de ruptures de contrats. Le dispositif prévu par la loi a vocation à exercer « une fonction de sas à une période charnière pour l'adolescent et devrait contribuer à lutter contre le décrochage à 16 ans, en préparant en amont la fin de la scolarité obligatoire et l'entrée en apprentissage », a expliqué le rapporteur du texte au Sénat, Jean-Claude Carle (Rap. Sén. n° 618, Carle, septembre 2009, page 88).

2. LE MAINTIEN TEMPORAIRE DE LA RÉMUNÉRATION EN CAS DE RUPTURE DU CONTRAT (ART. 25, IV)

Tenant compte de la conjoncture économique, la loi du 24 novembre 2009 prévoit que l'Etat ou les régions peuvent assurer, pendant une durée maximale de 3 mois, le financement de la rémunération des apprentis dont le contrat a été rompu sans qu'ils soient à l'initiative de cette rupture et qui continuent à suivre une formation en CFA. Est ainsi ouverte la possibilité de faire bénéficier du statut de stagiaire de la formation professionnelle des apprentis ayant subi la rupture de leur contrat (code du travail [C. trav.], art. L. 6341-3 modifié).

3. L'ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS D'INSCRIPTION EN CFA (ART. 25, V)

Par ailleurs, la loi tend à apporter une réponse aux jeunes souhaitant entrer en apprentissage mais dont la conclusion du contrat est retardée en raison de difficultés à trouver un employeur, en permettant à des CFA qui le souhaitent, en premier lieu ceux dont les classes ne sont pas remplies, de les accueillir. Le dispositif est expérimental, le législateur prévoyant que peuvent être agréées les formations, dont la durée est de 2 mois maximum, entamées jusqu'au 31 octobre 2010 dans les CFA volontaires par des jeunes à la recherche d'un employeur susceptible de les recruter en qualité d'apprentis (C. trav., art. 25, V de la loi). En clair, il est donné la possibilité aux apprentis sans employeur d'entamer leur formation en CFA et ainsi de bénéficier du statut de stagiaire de la formation professionnelle pendant 2 mois (4). L'idée est que ces jeunes puissent être formés et accompagnés dans leur recherche d'emploi tout en bénéficiant d'une protection sociale.

Une évaluation de la mise en oeuvre de cette mesure est confiée à un comité composé de parlementaires.

4. LA POSSIBILITÉ DE PRÉVOIR UNE PÉRIODE D'ESSAI (ART. 25, I)

La loi du 24 novembre 2009 ouvre la possibilité de prévoir une période d'essai, dans les conditions de droit commun des contrats à durée déterminée, pour les contrats d'apprentissage conclus avec un nouvel employeur afin d'achever la formation après la rupture d'un premier contrat (C. trav., art. L. 6222-18 modifié).

Cette période d'essai ne peut excéder une durée calculée à raison de 1 jour par semaine, dans la limite de 2 semaines lorsque la durée initialement prévue au contrat est au plus égale à 6 mois, et dans la limite de 1 mois dans les autres cas. Lorsque le contrat ne comporte pas de terme précis, la période d'essai est calculée par rapport à la durée minimale du contrat (C. trav., art. L. 1242-10).

5. LA SUPPRESSION DE L'AGRÉMENT PRÉFECTORAL DANS LE SECTEUR PUBLIC (ART. 24)

Estimant qu'il alourdit inutilement la procédure de conclusions de contrats d'apprentissage dans le secteur public, les parlementaires ont supprimé l'agrément préfectoral obligatoire pour les organismes de droit public souhaitant recruter des apprentis, agrément qui était prévu par la loi du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail.

En levant cet obstacle législatif, leur objectif était de contribuer au développement de l'apprentissage dans le secteur public. Sachant que bien d'autres freins ont été identifiés (5). Citons, pêle-mêle, une culture limitée de l'apprentissage dans le secteur public, le principe du recrutement par concours qui rend difficile la transition entre le contrat d'apprentissage et l'entrée dans la fonction publique, l'absence des incitations financières dont bénéficient les entreprises (déduction de taxe d'apprentissage, indemnité forfaitaire versée par les régions, crédit d'impôt)...

6. LE CONCOURS FINANCIER DÛ PAR L'EMPLOYEUR D'UN APPRENTI (ART. 25, III)

La loi du 24 novembre 2009 prévoit que, à défaut de publication par le préfet de région du montant du concours financier dû par l'employeur d'un apprenti au CFA ou à la section d'apprentissage où est inscrit l'apprenti, le montant de ce concours est égal à un montant forfaitaire fixé par arrêté (C. trav. L. 6241-4 modifié). Ce montant a été fixé, par un arrêté du 18 janvier 2010 (6), à 3 000 € par apprenti inscrit dans un CFA ou dans une section d'apprentissage au 31 décembre de l'année au titre de laquelle est due la taxe d'apprentissage (au lieu de 1 500 € depuis 2005), dans la limite de la fraction de la taxe d'apprentissage dénommée « quota » (7). L'employeur doit se libérer de ce versement avant le 1er mars de l'année suivant l'année d'imposition. Ces dispositions sont applicables à partir de la collecte des versements libératoires de la taxe d'apprentissage assise sur les salaires versés à compter du 1er janvier 2009. Le législateur a ainsi précisé le régime selon lequel une entreprise employant un apprenti peut s'acquitter de son obligation de financement en matière de taxe d'apprentissage, par l'institution d'un mécanisme de paiement forfaitaire.

Depuis la loi du 6 mai 1996 portant réforme du financement de l'apprentissage, les entreprises employant un apprenti ont en effet l'obligation d'apporter au CFA ou à la section d'apprentissage où est inscrit l'apprenti un concours financier, qui vient s'imputer sur la fraction de la taxe d'apprentissage dite du quota. La loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale a précisé que ce concours est au moins égal, dans la limite de cette fraction, au coût par apprenti fixé par la convention de création du CFA ou de la section d'apprentissage (C. trav. art. L. 6241-4). Ce qui revient à un financement aux frais réels de la formation d'un apprenti par son employeur.

Cette règle une fois établie, encore convenait-il de prévoir les modalités de détermination de ces coûts. Depuis 2002, existe la règle selon laquelle le préfet de région doit publier, au plus tard le 31 décembre de l'année au titre de laquelle la taxe d'apprentissage est due, la liste, par établissement ou par organisme, des premières formations technologiques et professionnelles (8), dont l'ouverture ou le maintien ont été arrêtés pour l'année suivante. Pour les formations assurées dans un CFA ou dans une section d'apprentissage, cette liste indique le coût par apprenti (C. trav., art. R. 6241-3). Parce que de très nombreuses difficultés ont été rencontrées dans la mise en oeuvre de cette règle - que ce soit en raison de divergences entre les méthodes d'estimation des coûts selon les CFA, d'une transmission tardive des données aux préfectures ou d'un défaut de publication des listes par les préfets -, la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne a prévu à titre transitoire, jusqu'au 1er janvier 2008, que le montant minimal du concours financier au titre du financement du CFA par l'employeur d'un apprenti est établi de manière forfaitaire, par arrêté commun des ministres chargés de l'emploi et du budget. Par un arrêté du 28 novembre 2005 (9), il a été fixé à 1 500 € par apprenti inscrit dans un CFA ou dans une section d'apprentissage au 31 décembre de l'année au titre de laquelle est due la taxe d'apprentissage. Au 1er janvier 2008, cette dérogation est arrivée à échéance et l'article L. 6241-4 du code du travail prévoyant un paiement aux frais réels a repris toute sa force. Pour autant, les difficultés de mise en oeuvre constatées en 2005 n'ont pas été complètement résolues et l'accessibilité aux listes dressées par les préfectures demeure variable. C'est la raison pour laquelle la loi du 24 novembre 2009 a prévu que, à défaut de publication du coût par apprenti, le montant du concours financier de l'employeur est égal à un montant fixé forfaitairement par arrêté, l'objectif étant de permettre de pallier efficacement l'absence de publication des coûts de formation des apprentis sur les listes préfectorales.

7. LE RENFORCEMENT DU FONDS NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT ET DE MODERNISATION DE L'APPRENTISSAGE (ART. 27)

a. L'objet du FNDMA

La loi fixe pour objet au Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage (FNDMA) de favoriser l'égal accès à l'apprentissage sur le territoire national et de contribuer au financement d'actions visant à son développement quantitatif et qualitatif (C. trav., art. L. 6241-3 modifié). Jusqu'alors, le code du travail se contentait de mentionner le FNDMA, de décrire les recettes qui lui sont affectées ainsi que la nature des actions qu'il est susceptible de financer, sans jamais préciser sa finalité.

b. Les recettes du fonds

Avant la loi du 24 novembre 2009, une majoration de 0,1 % de la taxe d'apprentissage était appliquée aux entreprises de 250 salariés et plus employant moins de 3 % de leur effectif en contrat d'apprentissage ou de professionnalisation. Le produit de cette majoration était ensuite réparti entre le quota et le barème de la taxe d'apprentissage. La loi « orientation-formation » transforme cette majoration en une contribution supplémentaire du même taux et affecte intégralement son produit au FNDMA, dont les recettes sont utilisées pour la péréquation entre les régions et pour le financement des actions arrêtées d'un commun accord avec l'Etat dans le cadre de contrat d'objectifs et de moyens. Cette modification est applicable pour les rémunérations versées depuis le 1er janvier 2009.

Le FNDMA recevait jusqu'alors une part du quota de la taxe d'apprentissage. En lui affectant intégralement le produit de la « surtaxe » apprentissage, la loi accroît légèrement les ressources attribuées à la péréquation et à la contractualisation Etat-régions, et diminue d'autant les fonds dont l'affectation est laissée à la libre initiative des entreprises (code général des impôts [CGI], art. 225 modifié et 230 H nouveau ; C. trav., art. L. 6241-3 modifié).

c. Le calcul de la contribution supplémentaire

Le calcul du seuil de 3 % de salariés en alternance déclenchant le versement de la contribution supplémentaire de 0,1 % est modifié (CGI, art. 230 H nouveau). Sont désormais pris en compte dans le calcul du quota de salariés en formation en alternance les jeunes en volontariat international en entreprise et ceux bénéficiant d'une convention industrielle de formation par la recherche (CIFRE) (10).

B. LE CONTRAT DE PROFESSIONNALISATION (ART. 23)

La loi du 24 novembre 2009 étend le bénéfice du contrat de professionnalisation à des publics particulièrement éloignés de l'emploi, tout en prévoyant à leur égard, mais aussi au profit d'autres bénéficiaires, la mise en oeuvre d'un nouveau dispositif renforcé.

Destiné à favoriser l'insertion ou la réinsertion professionnelle de certains publics en leur permettant d'acquérir un diplôme, un titre ou une qualification professionnelle, le contrat de professionnalisation peut, pour mémoire, prendre la forme d'un contrat à durée déterminée ou à durée indéterminée. Dans ce dernier cas, il doit débuter par une action de professionnalisation qui, lorsqu'il s'agit d'un contrat à durée déterminée, se confond avec le contrat (11).

1. UN ACCÈS ÉLARGI À DES PUBLICS TRÈS ÉLOIGNÉS DE L'EMPLOI

Jusqu'alors réservé aux personnes âgées de 16 à 25 ans révolus (c'est-à-dire de moins de 26 ans) et aux demandeurs d'emploi de 26 ans et plus, le contrat de professionnalisation est dorénavant ouvert à de nouveaux publics (C. trav., art. L. 6325-1 modifié) :

les bénéficiaires de certains minima sociaux, à savoir :

- le revenu de solidarité active (RSA),

- l'allocation de solidarité spécifique (ASS),

- l'allocation aux adultes handicapés (AAH),

- dans les départements d'outre-mer (DOM), le revenu minimum d'insertion (RMI) et l'allocation de parent isolé (API), deux prestations qui doivent être remplacées par le RSA au plus tard le 1er janvier 2011 ;

les personnes ayant bénéficié d'un contrat unique d'insertion (CUI) (12).

« La vocation de réinsertion professionnelle du contrat de professionnalisation, qui le distingue du contrat d'apprentissage [qui vise] plutôt l'achèvement en alternance de la formation initiale, se trouve ainsi amplifiée », a expliqué Jean-Claude Carle (Rap. Sén. n° 618, Carle, septembre 2009, page 77).

2. DES CONDITIONS PARTICULIÈRES D'EXÉCUTION POUR CERTAINS PUBLICS PRIORITAIRES

Parallèlement, le législateur fait bénéficier des publics prioritaires de certaines conditions particulières d'exécution du contrat. Sont concernés les nouveaux publics éligibles aux contrat de professionnalisation (voir ci-dessus), mais pas seulement : les jeunes de 16 à 25 ans qui n'ont pas validé un second cycle de l'enseignement secondaire et qui ne sont pas titulaires d'un diplôme de l'enseignement technologique ou professionnel - autrement dit, les jeunes sans diplômes - sont également visés (C. trav., art. L. 6325-1-1 nouveau).

a. L'augmentation de la durée de la professionnalisation et de la part de la formation

Les possibilités d'allonger par accord collectif la durée de la professionnalisation jusqu'à 24 mois, d'une part, et de porter la part de la formation au-delà de 25 % de la durée totale du contrat ou de l'action de professionnalisation, d'autre part, sont étendues :

aux bénéficiaires du RSA, du RMI, de l'API, de l'AAH et de l'ASS ;

aux personnes ayant bénéficié d'un CUI.

Sont également concernés les jeunes de 16 à 25 ans n'ayant pas validé un second cycle de l'enseignement secondaire et qui ne sont pas titulaires d'un diplôme de l'enseignement technologique ou professionnel (C. trav., art. L. 6325-11, L. 6325-12 et L. 6325-14 modifiés).

Dans le régime de droit commun, le contrat de professionnalisation, ou bien l'action de professionnalisation au début d'un contrat à durée indéterminée, dure de 6 à 12 mois, et la formation proprement dite représente entre 15 % et 25 % de la durée du contrat ou de l'action de professionnalisation sans pouvoir être inférieure à 150 heures (C. trav., art. L. 6325-13). Par accord de branche ou accord collectif entre les partenaires sociaux à l'origine de la création d'un organisme paritaire collecteur agréé (OPCA), la durée minimale de l'action de professionnalisation peut néanmoins être allongée jusqu'à 24 mois, notamment, jusqu'alors, pour la personne sortie du système éducatif sans qualification professionnelle reconnue ou lorsque la nature des qualifications prévues l'exige. La loi du 24 novembre 2009 ouvre cette possibilité aux bénéficiaires de minima sociaux mentionnés ci-dessus et aux personnes ayant conclu un CUI.

De même, un accord de branche ou un accord collectif entre les partenaires sociaux à l'origine de la création d'un OPCA peut porter au-delà de 25 % de la durée totale du contrat ou de l'action de professionnalisation la durée des actions d'évaluation, d'accompagnement et de formation pour certaines catégories de bénéficiaires, notamment, jusqu'ici, pour les jeunes n'ayant pas achevé un second cycle de l'enseignement secondaire et qui ne sont pas titulaires d'un diplôme de l'enseignement technologique ou professionnel ou pour ceux qui visent des formations diplômantes. La logique de mise en place d'un dispositif renforcé à l'attention, en particulier, des jeunes sans diplômes était donc déjà présente dans le droit existant. La loi renforce cette logique en l'étendant à l'ensemble des publics définis comme prioritaires, qui pourront donc, sous la réserve de la conclusion d'un accord collectif à cet effet, bénéficier d'un accroissement de la durée des actions de professionnalisation au-delà de 25 % du total de la durée du contrat ou de l'action de professionnalisation.

b. L'amélioration de la prise en charge des actions de formation

1) Des forfaits horaires spécifiques de prise en charge

Les OPCA prennent en charge le financement des actions d'évaluation, d'accompagnement et de formation (13) des salariés en contrat de professionnalisation sur la base de forfaits horaires déterminés par accord de branche ou accord collectif entre les partenaires sociaux à l'origine de la création de l'OPCA ou, à défaut, par décret. Ces forfaits peuvent faire l'objet d'une modulation en fonction de la nature et du coût de la prestation, a précisé l'administration (14).

De manière à favoriser une prise en charge plus importante des frais de formation des salariés en contrat de professionnalisation par les OPCA, la loi du 24 novembre 2009 prévoit que les accords collectifs peuvent déterminer des forfaits horaires spécifiques pour les contrats conclus avec des jeunes sans qualification, les bénéficiaires de certains minima sociaux (RSA, AAH, ASS, RMI et API) ou les personnes ayant bénéficié d'un CUI. A défaut de forfait spécifique fixé par accord collectif, le forfait de prise en charge par les organismes collecteurs des dépenses de formation et d'accompagnement de ces publics prioritaires est fixé à 15 € par heure et par contrat (15), contre 9,15 € en règle générale (C. trav., art. L. 6332-14 et D. 6332-87 modifiés).

2) La poursuite de la prise en charge après la rupture du contrat

La loi du 24 novembre 2009 prévoit expressément que les OPCA peuvent poursuivre la prise en charge de l'évaluation, de l'accompagnement et de la formation des bénéficiaires de contrats de professionnalisation, à durée indéterminée ou déterminée, dont le contrat est rompu pour des raisons économiques (licenciement pour motif économique, rupture anticipée du contrat à durée déterminée à l'initiative de l'employeur, redressement ou liquidation judiciaire de l'entreprise) (C. trav., art. L. 6332-14 modifié).

c. La prise en charge des coûts liés à la fonction tutorale

plafond mensuel spécifique durée spécifique de financement prise en charge du « tutorat externe »

1) Le tutorat interne

L'OPCA peut prendre en charge, dans la limite d'un plafond mensuel et d'une durée maximale déterminés par décret, les coûts liés à l'exercice de la fonction tutorale par des salariés qualifiés de l'entreprise auprès de bénéficiaires de contrats de professionnalisation (C. trav. L. 6332-15 modifié). Peuvent être ainsi pris en charge au titre du tutorat interne à l'entreprise les rémunérations, les cotisations et contributions sociales légales et conventionnelles ainsi que les frais de transport (C. trav., art D. 6332-92). La loi du 24 novembre 2009 prévoit la fixation d'un plafond spécifique de prise en charge pour le tutorat de jeunes sans qualification et de bénéficiaires de certains minima sociaux (RSA, AAH, ASS, RMI et API) ou ayant bénéficié d'un CUI. Ce plafond a été fixé par voie réglementaire à 345 € par mois (16), une somme versée pendant 6 mois au maximum, contre 230 € pour le droit commun (soit une majoration de 50 %). Ce montant maximal de prise en charge par l'OPCA vaut également lorsque le tuteur est âgé de 45 ans ou plus (C. trav., art D. 6332-91 modifié).

2) Le tutorat externe

La loi prévoit également une prise en charge par l'OPCA, dans les mêmes conditions que pour le tutorat interne, d'une partie des dépenses de tutorat externe pour :

les bénéficiaires du RSA, du RMI, de API, de l'AAH et de l'ASS ;

les personnes ayant bénéficié d'un CUI ;

les jeunes de 16 à 25 ans n'ayant pas validé un second cycle de l'enseignement secondaire et qui ne sont pas titulaires d'un diplôme de l'enseignement technologique ou professionnel.

Sont également concernées les personnes qui ont été suivies par un référent avant la signature du contrat de professionnalisation et celles qui n'ont exercé aucune activité professionnelle à plein temps et en contrat à durée indéterminée au cours des 3 années précédentes (C. trav., art. L. 6332-15 modifié).

A la différence du tutorat interne, le tutorat externe n'est pas effectué par un salarié de l'entreprise et ne vise pas à organiser l'activité du titulaire d'un contrat de professionnalisation en son sein, ni à contribuer directement à l'acquisition des savoir-faire professionnels. Il sert plutôt à accompagner et à aider les personnes qui en bénéficient pour toutes les questions extérieures à leur activité professionnelle stricto sensu mais qui conditionnent la réussite de leur insertion, que ce soit dans les domaines des transports, du logement ou de la santé par exemple.

d. L'utilisation d'équipements de travail d'ordinaire interdits

Les mineurs titulaires d'un contrat de professionnalisation pourront utiliser au cours de leur formation professionnelle certains équipements de travail d'ordinaire interdits aux jeunes travailleurs, à l'instar de ce qui se pratique déjà pour les apprentis et les élèves de l'enseignement technologique et professionnel, dans des conditions qui seront définies par décret (C. trav., art. L. 6325-6-1 nouveau).

PLAN DU DOSSIER

DANS CE NUMÉRO

I. Les contrats en alternance

A. Le contrat d'apprentissage

B. Le contrat de professionnalisation

DANS UN PROCHAIN NUMÉRO

II. L'insertion professionnelle des jeunes

AUTRES DISPOSITIONS CONCERNANT L'APPRENTISSAGE

CONGÉS POUR RÉVISION (ART. 25)

La loi du 24 novembre 2009 modifie l'article L. 6222-35 du code du travail, désormais rédigé ainsi : « Pour la préparation directe des épreuves [du diplôme ou du titre prévu par le contrat d'apprentissage], l'apprenti a droit à un congé supplémentaire de 5 jours ouvrables. Il doit suivre les enseignements spécialement dispensés dans le CFA dès lors que la convention [portant création de ce centre] en prévoit l'organisation. ». Cette nouvelle rédaction vise à protéger les droits des apprentis pour lesquels le CFA n'organise pas de révision, afin d'assurer une égalité dans la préparation de l'examen. En effet, l'ancienne version de ce texte pouvait laisser entendre que seuls les apprentis dont le CFA organisait une session de révision avaient droit à ce congé, qui s'ajoute à la formation normale.

TRAVAUX DANGEREUX (ART. 26)

Afin d'alléger les contraintes administratives des employeurs, le législateur leur permet de confier à leurs apprentis, pour certaines formations professionnelles limitativement énumérées et dans des conditions qui seront fixées par décret, tous les travaux, y compris dangereux, sans avoir, pour cela, à solliciter au préalable l'autorisation de l'inspection du travail. Il suffit d'une simple déclaration à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ou, dans les départements où elle est créée, l'unité territoriale de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (C. trav., art. L. 6222-31 modifié).

Notes

(1) Voir ASH n° 2593 du 23-01-09, p. 8.

(2) Voir en dernier lieu ASH n° 2648 du 26-02-10, p. 14.

(3) Voir respectivement ASH n° 2607 du 1-05-09, p. 5 et n° 2626 du 2-10-09, p. 5.

(4) Sauf dérogation, le début de l'exécution d'un contrat d'apprentissage ne peut être postérieur de plus de 3 mois au début du cycle de formation que suit l'apprenti (C. trav., art. L. 6222-12).

(5) Sur l'analyse des freins à l'essor de l'alternance dans le secteur public, voir le récent rapport du député Laurent Hénart, ASH n° 2628 du 16-10-09, p. 14.

(6) J.O. du 23-01-10.

(7) La taxe d'apprentissage est divisée en deux fractions : l'une, appelée quota, représente 52 % de la taxe due et est entièrement dédiée au financement de l'apprentissage ; l'autre, communément appelée barème, est affectée par l'entreprise redevable à des formations technologiques et professionnelles de son choix.

(8) Les premières formations technologiques et professionnelles sont celles qui, avant l'entrée dans la vie active, préparent les jeunes à un emploi d'ouvrier ou d'employé, spécialisé ou qualifié, de travailleur indépendant et d'aide familial, de technicien, technicien supérieur, d'ingénieur ou de cadre supérieur des entreprises des divers secteurs économiques.

(9) J.O. du 9-12-05.

(10) Les Cifre permettent aux doctorants de préparer leur thèse en entreprise en menant un programme de recherche et développement en liaison avec une équipe de recherche extérieure à l'entreprise. Un contrat de travail, à durée indéterminée ou à durée déterminée de 3 ans, est conclu entre l'entreprise et le doctorant.

(11) Pour une présentation détaillée du contrat de professionnalisation, voir ASH n° 2385 du 10-12-04, p. 21.

(12) Voir ASH n° 2638 du 25-12-09, p. 39.

(13) Sont couverts les frais pédagogiques, les rémunérations, les cotisations sociales légales et conventionnelles, les frais de transport et d'hébergement, etc.

(14) Circulaire DGEFP n° 2007-21 du 23 juillet 2007, B.O. Emploi-Travail-Formation professionnelle-Cohésion sociale n° 2007/9 du 30-09-07.

(15) Le montant a été fixé par le décret n° 2010-60 du 18 janvier 2010, J.O. du 19-01-10.

(16) Décret n° 2010-62 du 18 janvier 2010, J.O. du 19-01-10.

Le cahier juridique

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