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Nouvelle loi visant à lutter contre la récidive : les principales mesures

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Présentée en conseil des ministres en novembre dernier, la loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale a été définitivement adoptée par le Parlement le 25 février. Elle complète la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental (1), qui avait fait l'objet d'une censure partielle par le Conseil constitutionnel (2). Au final, le texte est assez fidèle à ce qu'avait annoncé la garde des Sceaux. Ses dispositions relatives à la surveillance judiciaire, à la surveillance de sûreté, ainsi qu'aux modalités d'exécution de la peine de suivi socio-judiciaire ou d'une libération conditionnelle s'appliqueront immédiatement dès la publication de la loi au Journal officiel, loi susceptible de faire l'objet d'un recours devant le Conseil constitutionnel.

L'efficacité des mesures de sûreté

Le Parlement s'est attaché à renforcer le dispositif de la rétention de sûreté, qui, pour mémoire, peut être prononcée à l'encontre des personnes condamnées à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à 15 ans pour les crimes d'assassinat ou de meurtre, de torture ou d'actes de barbarie, de viol, d'enlèvement ou de séquestration, commis sur une victime mineure ou, avec des circonstances aggravantes, sur une victime majeure. La situation des condamnés doit être examinée par une commission pluridisciplinaire de mesures de sûreté au moins un an avant leur libération. Les intéressés sont alors placés au moins six semaines dans un service spécialisé en vue de l'évaluation de leur dangerosité (3). Si la commission conclut à leur particulière dangerosité, elle peut proposer, par un avis motivé, leur placement dans un centre de rétention de sûreté, à trois conditions, dont une nouvelle :

que les obligations résultant de l'inscription dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes, ainsi que celles résultant d'une injonction de soins ou d'un placement sous surveillance électronique mobile, susceptibles d'être prononcées dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire ou d'une surveillance judiciaire apparaissent insuffisantes pour prévenir la commission des crimes pouvant donner lieu à une rétention de sûreté ;

que cette rétention constitue l'unique moyen de prévenir la commission de ces infractions, dont la probabilité est très élevée ;

et, ajoute la loi, que les condamnés aient été mis en mesure de bénéficier, pendant l'exécution de leur peine, d'une prise en charge médicale, sociale et psychologique adaptée au trouble de la personnalité dont ils souffrent. Cette disposition reprend une suggestion faite par le Conseil constitutionnel dans sa décision sur la loi du 25 février 2008.

Sans changement, la mesure de rétention de sûreté est prononcée pour une durée de un an, renouvelable jusqu'à ce que l'intéressé ne présente plus de particulière dangerosité. Lorsqu'elle n'est pas prolongée ou s'il y est mis fin, le condamné peut être placé sous surveillance de sûreté pendant une durée désormais égale à deux ans, contre un an auparavant (4), une période renouvelable pour la même durée. Toutefois, précise le texte, la mainlevée de la surveillance de sûreté peut être demandée à la juridiction régionale de la rétention de sûreté après un délai de trois mois suivant la décision définitive de surveillance de sûreté.

Comme auparavant, la juridiction régionale peut aussi prononcer une surveillance de sûreté après un placement sous surveillance judiciaire, sous réserve d'une expertise médicale constatant la dangerosité de l'intéressé, dans les cas où cette mesure est l'unique moyen de prévenir la commission, dont la probabilité est très élevée, d'une nouvelle infraction. Mais tel peut aussi être désormais le cas - sur la recommandation du « rapport Lamanda » (5) - pour la personne placée sous surveillance judiciaire à laquelle toutes les réductions de peine ont été retirées à la suite d'une violation des obligations auxquelles elle était soumise dans des conditions qui font apparaître des risques qu'elle commette à nouveau l'une des infractions pouvant conduire à une mesure de rétention de sûreté. « La surveillance de sûreté s'applique alors dès la libération de la personne », précise le texte. Enfin, comme le prévoyait le projet de loi initial, la rétention et la surveillance de sûreté sont suspendues par toute détention intervenue au cours de leur exécution (6).

Le renforcement de l'injonction de soins et la surveillance judiciaire

En matière d'infractions sexuelles sur mineurs, le juge peut prononcer une injonction de soins à l'égard de l'auteur dès sa condamnation (7), dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire, mais aussi désormais après sa condamnation, dans le cadre de ce suivi, d'une libération conditionnelle, d'une surveillance judiciaire ou de sûreté. Comme l'a souhaité la ministre de la Justice, le médecin traitant peut prescrire à l'intéressé un traitement inhibiteur de libido. En cas de refus ou d'interruption du traitement contre l'avis du médecin traitant, celui-ci le signale sans délai au médecin coordonnateur, qui en informe immédiatement, dans le respect des dispositions relatives au secret médical, le juge de l'application des peines (JAP). Si le médecin coordonnateur est indisponible, le médecin traitant peut informer directement le JAP du refus ou de l'interruption du traitement intervenu contre son avis. 

Par ailleurs, la personne placée sous surveillance de sûreté qui refuse de commencer ou de poursuivre le traitement prescrit par le médecin traitant dans le cadre d'une injonction de soins sera considérée comme ayant méconnu les obligations qui lui sont imposées, ce qui pourra donner lieu à un placement en rétention de sûreté. Ce même fait pourra également constituer une violation des obligations incombant au condamné et pouvant donner lieu, selon les cas, à la délivrance d'un mandat d'amener, à la suspension d'une mesure d'aménagement de peine, à l'incarcération provisoire, ou encore au retrait ou à la révocation d'une mesure de travail d'intérêt général, par exemple.

Concernant la surveillance judiciaire, elle pourra dorénavant être prononcée lorsqu'une personne a été condamnée à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à sept ans - et non plus dix ans - pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru. En outre, la situation de chaque condamné susceptible de faire l'objet d'une telle mesure devra à l'avenir être examinée avant la date prévue pour sa libération dans les conditions stipulées par la nouvelle loi.

Enfin, cette dernière dispose que, lorsqu'une personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'une des infractions pouvant donner lieu à une mesure de rétention de sûreté fait l'objet d'une libération conditionnelle avec une injonction de soins, la juridiction régionale de la rétention de sûreté pourra décider - après expertise médicale constatant que le maintien de l'injonction de soins est indispensable - de prolonger tout ou partie des obligations auxquelles est astreinte la personne, au-delà de la période de la libération conditionnelle, en la plaçant sous surveillance de sûreté avec injonction de soins pour une durée de deux ans.

La protection des victimes

La nouvelle loi précise les obligations pouvant être prononcées dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve prévues à l'article 132-45 du code pénal. Par exemple, l'une d'elles consistait à ne pas se livrer à l'activité professionnelle dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise. La loi est plus large maintenant puisqu'elle stipule que le condamné doit s'abstenir de toute activité dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ou - ce qui est nouveau - ne pas exercer une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs. Autre mesure pouvant être envisagée : s'il existe un risque que le condamné puisse se trouver en présence de la victime ou de la partie civile et que, au regard de la nature des faits ou de la personnalité de l'intéressé il apparaît qu'une telle rencontre semble devoir être évitée, le JAP doit assortir toute décision entraînant la cessation temporaire ou définitive de l'incarcération d'une interdiction d'entrer en relation avec la victime ou la partie civile et, le cas échéant, de paraître à proximité de son domicile et de son lieu de travail. Une interdiction qui doit être prononcée systématiquement lorsque l'intéressé a commis une infraction de nature sexuelle sur mineurs. Afin de garantir l'efficacité d'une telle mesure, le Parlement a également adopté une disposition autorisant les forces de l'ordre à appréhender, sous certaines conditions, toute personne placée sous le contrôle du JAP et à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a manqué aux obligations qui lui incombent et spécialement à son interdiction d'entrer en relation avec certaines personnes, dont la victime, ou de paraître en un lieu, une catégorie de lieux ou une zone spécialement désignés (8)

Signalons enfin que la loi ajoute aux cas dans lesquels les mineurs âgés de 13 à 18 ans mis en examen par le juge d'instruction ou le juge des enfants peuvent être placés en détention provisoire le fait qu'ils se soient volontairement soustraits aux obligations d'une assignation à résidence avec surveillance électronique, créée par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 (9).

[Loi à paraître]
Notes

(1) Voir ASH n° 2545 du 15-02-08, p. 17 et n° 2581 du 14-11-08, p. 5.

(2) Voir ASH n° 2547 du 29-02-08, p. 5.

(3) Signalons que la loi crée un répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires, centralisant les expertises, examens psychiatriques, médico-psychologiques... des criminels dangereux. Objectif : « faciliter et fiabiliser la connaissance de la personnalité et l'évaluation de la dangerosité des personnes poursuivies ou condamnées pour l'une des infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru, et prévenir le renouvellement de ces infractions ».

(4) La loi harmonise en conséquence les dispositions du code de procédure pénale relatives au placement sous surveillance judiciaire et au suivi socio-judiciaire, dont les obligations peuvent être prolongées dans le cadre d'une surveillance de sûreté.

(5) Voir ASH n° 2562 du 13-06-08, p. 17.

(6) Si cette détention excède six mois, la reprise de la mesure doit être confirmée par la juridiction régionale de la rétention de sûreté au plus tard dans un délai de trois mois après la cessation de la détention, à défaut de quoi il est mis fin d'office à la mesure.

(7) Comme auparavant, l'intéressé doit avoir été soumis, avant tout jugement au fond, à une expertise médicale. C'est dans ce cadre que l'expert est interrogé sur l'opportunité de l'injonction de soins.

(8) La personne peut alors, sur décision d'un officier de police judiciaire, être retenue pendant 24 heures au plus dans un local de police ou de gendarmerie afin que soit vérifiée sa situation et qu'elle soit entendue sur la violation de ses obligations.

(9) Voir notamment ASH n° 2628 du 16-10-09, p. 16, n° 2635 du 4-12-09, p. 17 et n° 2636 du 11-12-09, p. 16 et 41.

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