De la mise en oeuvre de programmes d'apprentissage des règles de vie en société dans les écoles maternelles à la mise en place de mesures de soutien aux parents de jeunes majeurs, en passant par la création d'un nouveau métier d'« éducateur de prévention de la délinquance » dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville : le responsable du « pôle prévention citoyenneté » de la ville de Mulhouse, Jean-Yves Ruestch, avance, dans le rapport d'étape qu'il a remis le 18 février au secrétaire d'Etat à la justice, 60 propositions pour mieux prévenir la délinquance des jeunes.
Des propositions qui, selon leur auteur, constituent « une première base de travail », ont vocation à s'articuler avec le plan national de prévention de la délinquance et d'aide aux victimes présenté par le chef du gouvernement en octobre dernier (1) et pourraient « apporter leur contribution à une large démarche de réflexion et de concertation à travers l'organisation d'états généraux de la prévention » en 2010. « On peut faire mieux ensemble, le sujet mérite que tout soit remis à plat », a déclaré, de son côté, Jean-Marie Bockel, indiquant qu'il allait précisément « proposer au Premier ministre, dans un délai raisonnable, des assises sur la prévention de la délinquance juvénile ».
Certaines des propositions sont nouvelles, d'autres « confortent des évolutions institutionnelles déjà engagées » et plusieurs « s'inspirent de bonnes pratiques repérées, évaluées et généralisables ». Le rapport préconise notamment de diversifier les mesures d'accompagnement éducatif auprès des familles et d'étendre les stages parentaux dans le cadre des alternatives aux poursuites. Il suggère également de créer, avec les conseils généraux, des mesures d'« aide éducative à domicile (AED) jeunes majeurs » pour soutenir les parents de jeunes adultes dans leur rôle éducatif. L'AED concerne actuellement uniquement les parents de mineurs dans le cadre de la protection de l'enfance et consiste en l'intervention à domicile d'un éducateur. Elle est réalisée à la demande des parents ou, sous réserve de l'adhésion de ces derniers, sur proposition de l'aide sociale à l'enfance. Or, explique Jean-Yves Ruetsch, « les parents de jeunes majeurs encore au domicile sont souvent confrontés à des difficultés éducatives nouvelles ou persistantes après le passage à la majorité, ou auraient encore besoin du soutien éducatif engagé à la minorité ». Il lui paraît donc pertinent de créer une nouvelle mesure d'AED spécifique pour les parents de jeunes majeurs mais aussi, par ailleurs, de « laisser la possibilité à l'éducateur intervenant avant le passage à la majorité de continuer d'intervenir après les 18 ans du jeune si la famille en exprime le besoin, et ce jusqu'à 21 ans maximum ». Une telle mesure pourrait selon lui, « dans certains cas, permettre de positionner le jeune sur un contrat jeune majeur en relais, en consolidant les pré-requis suffisants ».
Parmi les mesures proposées pour favoriser la prévention et la citoyenneté à l'école, on retiendra notamment celle, inspirée d'une expérience canadienne, visant à mettre en oeuvre un programme « d'acquisition d'habiletés sociales » dans les écoles maternelles. Ce programme d'apprentissage des règles de vie en société impliquerait en particulier les parents et les associations les représentant, les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents et les collectivités territoriales. Il intégrerait « à la fois des actions de prévention primaire, visant tous les enfants, et de prévention secondaire pour des enfants plus fragiles ou évoluant dans un contexte exposé », explique l'auteur du rapport.
Au-delà, Jean-Yves Ruestch préconise d'encourager les mesures de réparation dans les établissements scolaires en cas de faute ou de manquement à une obligation, d'étendre les dispositifs de prise en charge des élèves en voie de rupture ou exclus de leur établissement, ou encore de favoriser l'accueil des mesures de travaux d'intérêt général par les collectivités.
Le rapport avance aussi tout un ensemble de propositions destinées à améliorer la coopération entre les professionnels. Evoquant la « charte déontologique type du partage d'informations » prévue dans le cadre du plan national de prévention de la délinquance et d'aide aux victimes, il suggère de l'accompagner d'un guide méthodologique à l'usage de tous les acteurs, élaboré en lien avec le Conseil supérieur du travail social. « Dans chaque département, des formations interinstitutionnelles pourraient être organisées par les préfets » sur ce thème du partage d'informations, propose-t-il encore.
Jean-Yves Ruestch préconise également une professionnalisation de tous les métiers de la prévention sociale par le recrutement de personnes diplômées ou le développement de la formation en alternance.
Enfin, il suggère de réfléchir à la création d'un nouveau métier d'« éducateur de prévention de la délinquance » pour intervenir en particulier dans les quartiers des zones urbaines sensibles et les établissements scolaires prioritaires.
(1) Prévenir la délinquance des jeunes : un enjeu pour demain - Jean-Yves Ruetsch - Rapport disponible sur