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Défenseur des droits : la CNCDH propose une redéfinition de ses missions et de ses modalités d'intervention

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Dans un avis du 4 février (1), la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) critique les missions et les modalités d'intervention du défenseur des droits, telles qu'elles résultent de deux projets de loi présentés en conseil des ministres en septembre dernier (2). Si elle adhère à l'objectif qui consiste à renforcer, au profit du défenseur des droits, les pouvoirs actuellement dévolus au médiateur de la République, la commission se prononce en revanche pour le maintien des autres autorités administratives indépendantes auxquelles il entend se substituer - défenseur des enfants et Commission nationale de déontologie et de la sécurité (CNDS) (3) -, qu'elle considère comme efficaces et utiles. A ses yeux, supprimer ces autorités constituerait une « régression ».

Le défenseur des droits a été créé par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 (4) afin de renforcer les possibilités de recours non juridictionnel dont dispose le citoyen pour assurer la défense de ses droits. Une création intervenue « sans qu'ait été nécessairement prise la mesure du bouleversement que pourrait susciter l'introduction dans le paysage institutionnel français d'une autorité encore largement indéterminée », déplore la commission. Et sans que les autorités indépendantes dont la suppression est programmée n'aient été associées et consultées.

Les incohérences des projets de loi

De façon générale, regrette la CNCDH, les projets de loi prévoient que le défenseur des droits intègre « deux fonctions relevant de logiques différentes, à savoir le contrôle et la médiation, regroupement qui nuit à l'impératif d'effectivité des droits ». Contrairement à la chancellerie, la commission estime que « l'une de ces deux fonctions se verrait nécessairement privilégiée et l'autre neutralisée si elles étaient regroupées et détenues par une autorité unique ». En outre, dans le domaine de la protection des droits de l'Homme, la spécialisation et l'expertise sont capitales, rappelle la CNCDH. Or, selon elle, elles ne sont pas garanties par les projets de loi. « La dilution des compétences, le mélange et l'amoindrissement des fonctions des autorités actuelles, ainsi que le manque de spécialisation de l'institution du défenseur des droits, des collèges qui l'entourent, et le rôle seulement consultatif de ces derniers, contraindront à des arbitrages et à l'établissement de priorités nuisibles à la protection et au respect des droits et des libertés », soutient la CNCDH. Ajoutant que, « au regard de l'étendue du mandat [et de l'organisation] du défenseur des droits, celui-ci n'aura pas en pratique le temps nécessaire pour s'assurer du bon exercice de chacune des missions qui lui seront confiées », ni même « la flexibilité et la réactivité nécessaires pour traiter notamment des situations d'urgence ». Au-delà, la commission s'interroge sur l'indépendance du défenseur qui doit être nommé par décret en conseil des ministres, un mode de nomination qui, selon elle, « ne donne pas de gages réels d'indépendance ».

Par ailleurs, la CNCDH relève que les pouvoirs conférés au défenseur seront limités. Elle regrette ainsi que son pouvoir d'injonction ne soit pas accompagné d'une obligation d'exécution assortie de sanctions afin d'assurer l'efficacité de ses recommandations. Autre exemple : à l'heure actuelle, la CNDS bénéficie d'une liberté totale pour visiter les lieux publics et les locaux professionnels, ce qui ne sera pas le cas du défenseur à qui l'on pourra opposer des raisons tenant à la défense nationale ou à la sécurité publique.

Des propositions pour aménager le dispositif envisagé

Au final, conclut la commission, « afin d'offrir aux citoyens une défense de leurs droits fondamentaux la plus efficace possible, c'est le maintien des autorités existantes ainsi que l'amélioration de leur visibilité et de leur accessibilité qu'il faut renforcer ». Et d'ajouter que « la visibilité est moins une question de regroupement qu'une question de moyens ». Dans ce cadre, la CNCDH considère que le défenseur des droits devrait « contribuer à la coopération et à la coordination d'autorités, non pas concurrentes mais complémentaires, en favorisant une communauté de moyens, de projets et d'idées au service d'une même cause : une défense efficace et effective des droits de l'Homme ». Il devrait en outre « transmettre les réclamations relevant du domaine spécialisé d'autres autorités à l'autorité la plus compétente pour la traiter, ce, de manière systématique, coordonnée et concertée ». Selon la commission, le défenseur devrait aussi garantir une meilleure information sur la mission de chacune de ces autorités et sur leur voie de saisine, « par le biais notamment d'un portail Internet commun [...] et d'un mécanisme de transmission des réclamations efficace et opérationnelle ». Ces autorités - qui conserveraient leur indépendance - pourraient, de leur côté, solliciter le défenseur pour qu'il use d'un des pouvoirs qui lui sont conférés et qu'elles n'ont pas et dont l'exercice pourrait leur être ponctuellement utile.

Notes

(1) Avis disponible sur www.cncdh.fr.

(2) Ces deux textes - un projet de loi organique et un projet de loi ordinaire - attendent encore d'être inscrits à l'ordre du jour du Parlement - Voir ASH n° 2624 du 18-09-09, p. 5.

(3) La CNCDH exprime également clairement son « opposition à une intégration future du contrôleur général des lieux de privation de liberté dans le cadre du défenseur des droits » .

(4) Voir ASH n° 2569 du 22-08-08, p. 17.

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