L'enfance de Lisa Mandel a été bercée par des récits abracadabrants, drôles et effrayants : sa mère et son beau-père étaient infirmiers en psychiatrie. L'imaginaire de la dessinatrice a été nourrie par ces histoires, qui l'ont inspirée pour une nouvelle série en trois tomes, baptisée HP. Dans le premier volet - L'asile d'aliénés. De 1968 à 1973, souvenirs d'infirmiers -, la légèreté du dessin en bichromie noir et orange est pondérée par la sombre réalité des témoignages de Michèle, Lulu, Vève, Robert et Albert, tous infirmiers en psychiatrie à Marseille durant cette période. Ces personnages « réels » expriment leur vérité, qui n'est pas toujours à leur honneur. Ils parlent sans tabou des erreurs qu'ils ont pu commettre « parce que le système rétrograde et carcéral, complètement agonisant », de l'époque l'imposait : les coups administrés aux malades, les humiliations aussi, entre les bouillies infâmes servies au déjeuner, la fauche et les contentions - « L'été, on attachait Kiki au platane, l'hiver au radiateur »... Ils relatent aussi les conditions d'hygiène et de travail désastreuses - « Le pire, c'était l'odeur : de merde, de crasse, de pisse. » A l'époque, l'hôpital psychiatrique est une cour des miracles qui sert uniquement à protéger la société des fous, et surtout pas à les guérir. « La réussite, c'est le patient qui arrive à vivre bien entre les murs, sans la velléité de retourner à l'extérieur », assure Robert dans la planche nommée La guérison. Des témoignages « électrochocs ».
HP. Tome 1 : L'asile d'aliénés - Lisa Mandel - Ed. L'Association - 13 €