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Dans un contexte financier tendu, des craintes pour la prévention spécialisée

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«La prévention spécialisée est en danger. Et la protection de l'enfance avec elle. » Le directeur général de l'Unasea (Union nationale des associations de sauvegarde des enfants, des adolescents et des adultes) ainsi que le président et le directeur général de la Sauvegarde 71 lancent, dans une lettre ouverte adressée aux présidents de conseils généraux le 25 janvier, un cri d'alarme sur le risque de voir cette intervention disparaître du paysage social et éducatif. Car les conseils généraux, dans une mauvaise passe financière, pourraient tailler dans les financements accordés à ce secteur en se recentrant sur leurs dépenses obligatoires. « Parce que la situation commence à se produire et pourrait se généraliser, nous avons voulu lancer une alerte préventive afin que les départements conservent leur identité et restent en situation d'exercer leurs responsabilités, au lieu de tomber dans la facilité du choix comptable », explique Michel Franza, directeur général de l'Unasea.

L'alerte est partie de la Saône-et-Loire. Engagé dans une bataille contre les carences de l'Etat dans la compensation de ses transferts de charge, Arnaud Montebourg, président (PS) du conseil général, a annoncé un plan drastique d'économies. Le Journal de Saône-et-Loire du 16 janvier rapporte ces propos sans ambiguïté, prononcés lors de ses voeux à la presse : « Des associations, dans le sport, la culture, le social... vont devoir licencier et fermer leurs portes. » Le débat budgétaire aura lieu le 4 février. « Le département va essayer de conserver au mieux ses missions sociales », nuance Joëlle Marzio, vice-présidente du conseil général chargée de l'enfance et des familles. Néanmoins, « des suppressions sont prévues pour les actions ne relevant pas du tout de notre compétence, comme la prévention en santé, ainsi que des réductions dans d'autres champs », confirme-t-elle. S'agissant spécifiquement de la prévention spécialisée, si « le département va réduire sa participation financière, il conservera une somme significative pour assurer ce service », précise-t-elle, ajoutant que la réflexion porte aussi sur « le partage de cette compétence avec les communes et la clarification des dispositifs qui contribuent au lien social ». Ce qui ne rassure pas les acteurs concernés, pour qui un changement de régime financier n'est pas sans conséquence sur la nature des missions. « La prévention spécialisée, qui relève, selon le code de l'action sociale et des familles, de la protection de l'enfance, est une compétence départementale. En outre, il n'est pas certain que d'autres financeurs veuillent prendre le relais », commente Philippe Ropers, directeur général de la Sauvegarde 71.

La situation de la Saône-et-Loire pourrait ne pas être isolée, alors que l'Assemblée des départements de France (ADF) a alerté les pouvoirs publics de graves difficultés financières rencontrées par un quart d'entre eux. « Compte tenu du contexte, les départements adoptent des taux d'évolution des dépenses très bas, entre 0 et 1 % », confirme Jean-Pierre Hardy, chef du service des politiques sociales de l'ADF. L'Unasea et la Sauvegarde 71 prennent donc les devants contre « une approche budgétaire vide de sens », qui consisterait à faire diminuer les effectifs des éducateurs de rue, dont la mission, tout en relevant de la protection de l'enfance, ne s'impose pas pour autant aux départements. Cette intervention est aujourd'hui tiraillée entre le département et la ville, entre son volet social et éducatif et « la sécurité civile, dans laquelle on cherche à l'enfermer et à la marginaliser », constatent les signataires de la lettre ouverte. Mais en l'amputant « au rythme d'une dépense sociale graduée par les appels d'offres et des obligations de plus en plus contradictoires, c'est le lien social que l'on brise, la marginalité qu'on installe et la fracture que l'on rend irréversible ».

En dépit d'un contexte difficile pour les départements - suppression de la taxe professionnelle et remise en cause de la clause de compétence générale des régions et des départements dans le cadre de la réforme des collectivités territoriales -, les organisations demandent aux élus « de ne pas condamner les acteurs du social à payer une addition dont ils ne sont pas responsables ». Il appellent à un effort partagé et collectif, dans lequel les associations peuvent de leur côté, soulignent-ils, « révolutionner [leurs] méthodes, briser des modèles et revisiter [leurs] modes de financement », sans que les dispositifs soient pour autant déconstruits.

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