« C'est un enfant jailli d'un baiser, un amour, une douleur. » Tahar Ben Jelloun a écrit une quinzaine de romans, des essais et des recueils de poèmes. Mais il n'avait jamais eu l'occasion de présenter son fils Amine, né en 1991 avec une trisomie 21. Professeur à l'université Lumière-Lyon 2, Charles Gardou la lui donne en suscitant le recueil Au nom de la fragilité, qui réunit les nouvelles d'une trentaine d'écrivains autour du thème du handicap. Sylvie Germain, Pierre Assouline, Noëlle Châtelet ou Arnauld Pontier se sont prêtés à l'exercice, touchés par la thématique ou sensibles au sujet imposé. D'autres, parents ou proches de personnes handicapées, se sont sentis concernés.
Ainsi, au travers d'une histoire de chat perdu, Philippe Lefait raconte son enfant aveugle. Des mots simples pour dire en quelques pages la petite fille comme les autres, et pourtant différente. Françoise Lefèvre, elle, a décidé d'écrire à son fils border line un texte en forme de déclaration d'amour : « J'ai adoré être ta mère. J'ai aimé ton silence. Si petit, la force que tu employais à te taire [...] était stupéfiante. » Un choix inattendu. Celui de l'admiration pour un monde inconnu. Pour tenter de s'en approcher, de comprendre cet enfant. Au point d'accéder à ses exigences les plus déroutantes : changer de prénom pour enterrer le petit garçon qu'il n'est plus, ne plus s'adresser à lui directement mais à son reflet dans le miroir... Des images littéraires en chair et en os. Un texte magnifique, dans ce recueil inégal, à parcourir avec plaisir.
Au nom de la fragilité - Charles Gardou - Ed. érès - 20 €