LIVRE

PLONGÉE EN EAUX TROUBLES.

Madame Marie-Line débarque au service social de Neuvel-sur-Treste. Elle veut divorcer. Son mari a sombré dans l'alcoolisme, ne prend plus soin de lui, et la frappe quand elle refuse les rapports sexuels. C'est Anne Dubret, assistante sociale, qui la reçoit. Et finit par comprendre que l'enjeu est ailleurs : madame Marie-Line ne souhaite pas le divorce, mais une aide financière, et noircit le tableau pour l'obtenir. Le ton du livre est donné. Sombre, à la limite du glauque. C'est ainsi que la narratrice vit son quotidien. Comme l'auteure, qui écrit avec vivacité et sens du récit sous le pseudonyme d'Agnès Andersen ? Assistante sociale depuis trente ans, celle-ci a entrepris de le raconter dans une série de livres, dont le deuxième vient d'être publié. Le premier, L'assistante sociale ne répond plus, visait à « retracer un quotidien trop lourd »(1). Il s'agit maintenant de se pencher davantage sur « le rapport des professionnels avec leur mission, leur remise en question personnelle et leur motivation ». Qui croire ? Que leur proposer ? Pourquoi tant s'investir ?

Tess, jeune collègue d'Agnès Andersen, s'épuise à combler ses propres manques affectifs en voulant bien faire. A ces « poupées idéalistes », « le monde paraît deux fois plus cruel alors qu'en réalité, il n'est que ce qu'on veut bien en voir », commente la voix sèche du médecin, qui se veut celle de la raison. Le livre vire à la leçon. C'est dommage. La plongée en eaux troubles, au coeur des pensées de l'assistante sociale, pratiquée çà et là dans l'ouvrage, se révèle bien plus palpitante.