«Le SSAE (Soutien, solidarité et actions en faveur des émigrants) prend acte de ce que, dans la France d'aujourd'hui, il n'y a plus de place pour une association de sa nature. » C'est, dans un communiqué du 15 décembre, l'amer constat du conseil d'administration de l'association, qui a décidé de proposer à une assemblée extraordinaire, fin janvier 2010, l'arrêt de ses activités. La fin d'une histoire commencée en 1921 - la structure portait alors le nom de Service international d'aide aux émigrants et devint huit ans plus tard le Service social d'aide aux émigrants -, qui a connu un douloureux changement de cap en 2005. C'est à cette date que les missions de service social du SSAE sont transférées à l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations.
Pour poursuivre son objet - accompagner et protéger les migrants en situation de vulnérabilité, faire respecter les droits et lutter contre les discriminations -, le SSAE décide alors de poursuivre, sous un nouveau nom, son activité associative. Il ne compte plus de travailleurs sociaux, mais, doté d'un conseil scientifique, s'érige en plate-forme de ressources et d'échanges sur les questions migratoires et d'expertise au service des acteurs concernés (1). Séminaires, colloques, missions de conseil sont réalisés, tandis que sa revue Accueillir arrive à capter 850 abonnés.
Après avoir failli arrêter ses activités début 2009 du fait d'une situation déjà fragile (2), le conseil d'administration se résout aujourd'hui à mettre fin à l'aventure : « Le soutien très encourageant de certaines grandes collectivités territoriales ou métropoles n'a pas suffi, dans le délai imparti (3), pour prendre partiellement la relève budgétaire d'un Etat défaillant. » De fait, hormis celui de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, l'association ne reçoit aucun soutien des nouvelles agences de l'Etat chargées des questions d'immigration et d'intégration. « Il reste des fonds propres sur le million d'euros conservé par l'association en 2005, qui a permis sa relance, tandis que nous serions arrivés en fin d'année à 200 000 € de rentrées, contre un budget de plus de 300 000 € ces trois dernières années, explique Bernard Wallon, directeur du SSAE. Mais il aurait fallu plus de financements stables pour réunir les moyens nécessaires à notre développement. » L'ambition du SSAE correspond en effet à un réel besoin. Mais comment y répondre avec un effectif qui, au gré des restrictions, ne compte plus que deux postes et demi ? Autre difficulté posée par son modèle économique : « Nous ne répondons pas aux appels d'offres et aux appels à projets - fonctionnement qui tue le projet associatif -, mais à des attentes spécifiques qui nécessitent une réflexion collective », insiste Bernard Wallon.
Toujours convaincu de « l'utilité de travaux non émotionnels sur les questions migratoires et de la nécessité de déjouer l'instrumentalisation politique permanente de ces questions », le conseil d'administration du SSAE espère voir ses travaux - notamment son « livre vert sur les migrations » et sa revue - être repris dans un autre cadre. Tous les engagements contractés au titre de l'année 2009 avec ses partenaires devraient par ailleurs être honorés.
(3) En 2005, l'association s'était fixé une période probatoire de trois ans.